Or, entre temps : « Le Sénat a adopté le 27 janvier 2011, en première lecture, la
proposition de loi relative à l’organisation de la médecine du travail avec un retour à une gouvernance paritaire avec présidence alternée des services de santé au travail »
C'est ce texte du Sénat qui met hors de lui, Eric Le Jaouen, le président du Medef Loire. Il l'expliquait au Progrès, le 17 juin dernier : « (...) Tout le monde est d’accord sur le besoin impérieux d’une réforme (...) Le problème à ses yeux, c’est que cette réforme ne correspond pas aux aspirations du patronat.
« Le Sénat vient de faire passer le principe d’une présidence alternée entre les employeurs et les représentants des salariés. Nous ne pouvons pas accepter cela
puisque ce sont les employeurs qui assument, en la matière de santé au travail, la totalité des responsabilités (...) » Et le Président du Medef Loire, de brandir un recours, devant le
Conseil Constitutionnel.
Conseil qui avait, au passage, annulé le « cavalier législatif » introduit par quelques parlementaires
UMP, avec la bienveillance d'Eric Woerth, sous forme
d'amendement et destiné à ... changer la nature de la médecine du travail.
Mais, pourquoi cette crainte du Medef, au sujet de la « présidence alternée des services de
santé au travail » ?
Peut être faut-il se replonger dans l'enquête de 2007 réalisée par Rue89 et France Inter qui expliquait : « Comment l'argent de la santé des salariés finance les comités locaux du patronat »
Extrait : « (...) Un véritable pactole, car la cotisation est obligatoire. En moyenne,
comptez 75 euros par salarié et par an. Soit au total, d'après le Cisme (Centre interservices de santé et de médecine du travail en entreprise), une manne d'un milliard d'euros ! Aujourd'hui, 95%
des 6500 médecins du travail sont employés par des associations. Celles-ci sont toutes contrôlées par des représentants du Medef ou de la CGPME. Depuis 2004, la loi impose la parité dans leur
conseil d'administration : 2/3 de patrons, 1/3 de salariés. Dans les faits, seuls les employeurs ont les moyens de contrôler ces activités (...) »
Si à l'époque, Laurence Parisot avait maladroitement essayée de nier les faits, déclarant toutefois : « S'il y a des pratiques qu'il faut abandonner, on va les abandonner » La même équipe de journalistes montrait, dans un reportage : « Un an plus tard, où en est-on ? » que de nombreux cas
subsistaient, et que Xavier Bertrand, déja en charge du dossier médecine du travail, restait très évasif sur le fond, préférant évoquer la responsabilité des partenaires sociaux.
Evidemment, comme vous l'avez noté plus haut, le texte du Sénat devrait, si les députés le confirmaient, donner un plus large
contrôle des représentants des salariés sur la gestion des fonds de la médecine du travail. Et ça, comme le dit le Medef : « Nous ne pouvons pas accepter
»
Hasard de l'histoire, c'est le même Xavier Bertrand qui doit présenter le texte à l'Assemblée Nationale, probablement le 27
juin. Néanmoins, nous dit Weka, jusqu'à présent, les députés ont joué la montre afin de retarder l'examen du texte : « Depuis, la proposition de loi est
retournée au placard parlementaire, le parlement ayant manifestement d’autres priorités (...) »
S'achemine t-on vers une confirmation ou un rejet du texte des sénateurs ?
Le problème, c'est qu'un rejet par les députés UMP pourrait être regardé négativement par les salariés/électeurs et son
adoption comme une provocation par les employeurs/électeurs !
Car, au delà de la présidence alternée, le texte évoque : des
garanties sur l'indépendance des médecins du travail, la responsabilité des missions de prévention et le droit d'alerte du médecin
C'est pourquoi WEKA écrivait, le 6 juin dernier : « (...) Il se disait sous le manteau que
la réforme de la santé au travail pourrait être reportée après les élections de 2012. Bruno Dupuis a redonné une visibilité au texte. Il convient néanmoins d’être prudent car le créneau indiqué
est étroit et si d’aventure un autre texte devenait prioritaire … »
Slovar