Christopher Okigbo

Par Florence Trocmé


Christopher Okigbo (1932 – 1967) a l’aura d’un Rimbaud dans la poésie africaine de langue anglaise. Ses quelques fragiles plaquettes éditées au Nigéria ont été souvent rééditées en un mince volume, Labyrinths, apprécié de nombreux lecteurs africains ou afro-américains, et incontournable pour les « études postcoloniales ». Ayant brièvement côtoyé à l’école les futurs grands écrivains du Nigéria Chinua Achebe et Wole Soyinka, Okigbo prend le chemin moins perceptible et plus controversé du poète sensible et visionnaire qui finira en jeune officier volontaire broyé dans la guerre de sécession du Biafra. Membre de l’ethnie Igbo (ou Ibo), son grand-père était prêtre de la déesse fluviale Idoto et son père enseignait dans les écoles de missionnaires chrétiens. Sa poésie exprime, entre autres, la difficile recherche d’une nouvelle identité africaine à la charnière des indépendances, entre une réévaluation des traditions (richesse des cultures orales africaines) et un modernisme (esthétique et philosophique) apporté par l’occident. L’ambiance onirique ici n’est pas surréaliste mais transpose des mythes ethniques, et les poèmes sont agencés en cycles thématiques. Ainsi dans « Heaven’s Gate » le « je » est un fils prodigue de la déesse locale qui retourne tourmenté à la source.  « Silences » est une sorte d’oratorio pour un griot et un chœur de femmes, mi-religieuses, mi-sirènes, qui lamentent une mort ou un déclin. Le cycle du tonnerre est prémonitoire d’une ambiance de guerre, avec une syntaxe brassée par les polyrythmies des tambours africains.  
 
Bibliographie sélective : 
Labyrinths (1971), Heinemann, Harlow / Oxford, (réédition prévue pour janvier 2012) 
 
Traduction en français : 
Deux poèmes dans la superbe anthologie de Bernard Magnier : Poèmes d’Afrique au Sud du Sahara 1945 – 1995 chez Actes Sud. 
Sitographie : 
un article sur le Wikipedia anglais avec une des rares photos d’Okigbo 
un article en anglais avec un beau portrait dessiné