Portes du ciel : le passage (extrait)
Sombres eaux du commencement.
Rayons, violets et brefs, perçant la noirceur,
présagent le feu qui est rêvé.
Arc-en-ciel sur les lointains, arqué comme un boa prêt à tuer,
présage une pluie qui est rêvée.
À l’orangerie moi
que la solitude invite,
un hochequeue, pour conter
l’histoire-du-bois-enchevêtré ;
un oiseau de soleil, pour lamenter
une mère sur un rameau.
Pluie et soleil en combat singulier ;
debout sur une jambe,
en silence dans le passage,
le jeune oiseau au passage.
Traduit de l’anglais (Nigéria) par Jean-René Lassalle
Extrait de : Christopher Okigbo : Heavensgate, 1962.
Heaven’s gate : the passage (extrait)
Dark waters of the beginning.
Rays, violet and short, piercing the gloom,
foreshadow the fire that is dreamed of.
Me to the orangery
solitude invites,
a wagtail, to tell
the tangled-wood-tale;
a sunbird, to mourn
a mother on a spray.
Rain and sun in single combat;
on one leg standing,
in silence at the passage,
the young bird at the passage.
Extrait de Christopher Okigbo : Heavensgate, 1962, repris dans Labyrinths, 1971.
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Plainte des sœurs silencieuses (extrait)
Chœur :
Sonnées devant les portes
Dans les vides paysages marins sans mémoire, nous portons
Chacune de nous une urne de la natale
Terre, une double poignée autrefois ramassée.
Et par bouches salées sur les jaunes
Bancs de sables éclaboussés de souvenirs, nous épandons
Aux airs nocturnes nos silences,
Infusés dans ce parfum aux mélodies diverses :
Griot :
Ceci est notre chant du cygne
Ceci est l’accalmie de nos sens :
Chœur :
Nous portons dans nos mondes florissants
Nos mondes qui échouèrent…
Griot :
Ceci est notre chant du cygne
Ceci est le soupir de nos esprits :
Chœur :
D’imperceptibles ombres comme vents aux longs doigts
Tirent de nos cordes pincées
Ce cri, musique de firmament…
Traduit de l’anglais (Nigéria) par Jean-René Lassalle
Extrait de Christopher Okigbo: Silences, 1963.
Lament of the silent sisters (extrait)
Chorus:
Dumb-bells outside the gates
In hollow seascapes without memory, we carry
Each of us an urn of native
Earth, a double handful anciently gathered.
And by salt mouths by yellow
Sand banks sprinkled with memories, we spread
To the nightairs our silences,
Suffused in this fragrance of diverse melodies:
Crier:
This is our swan song
This is our senses’ stillness:
Chorus:
We carry in our worlds that flourish
Our worlds that have failed…
Crier:
This is our swan song
This is the sigh of our spirits:
Chorus:
Unseen shadows like long-fingered winds
Pluck from our strings
This shriek, the music of the firmament…
Extrait de Christopher Okigbo: Silences, 1963, repris dans Labyrinths, 1971.
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Tonnerre peut Éclater
Fanfare à tambours, cloches de bois : chapitre de fer ;
Et nos airs tranchants retournent à la source.
Ce jour relève d’un miracle de tonnerre ;
Le fer apporta un forum
Avec gestes symboliques. Tonnerre a clamé,
Sans laisser signatures : brisées
Barbacanes seules content une histoire que vents dispersent.
Mont ou tour à l’horizon, vois, tes otages –
Le fer, hélas, a créé des chefs d’œuvre –
Statuettes de héros légendaires – oiseaux de fer
Tenus – fruit du vol – serrés ;
Car barricadé dans ferronnerie un miracle encagé.
Libère-les, nous disons, libère-les
Les visages et les mains et les pieds,
Ces témoignages derrière le mythe, le récit
Que le rituel incarne.
Tonnerre peut éclater – Terre, attache-moi vite –
Obstination, la maladie des éléphants.
Traduit de l’anglais (Nigéria) par Jean-René Lassalle
Extrait de Christopher Okigbo: Paths of Thunder, 1968.
Thunder can break
Fanfare of drums, wooden bells: iron chapter;
And our dividing airs are gathered home.
This day belongs to a miracle of thunder;
Iron has carried the forum
With token gestures. Thunder has spoken,
Left no signatures: broken
Barbicans alone tell one tale the winds scatter.
Mountain or tower in sight, lo, your hostages –
Iron has made, alas, masterpieces –
Statuettes of legendary heroes – iron birds
Held – fruit of flight – tight;
For barricaded in iron handiwork a miracle caged.
Bring them out we say, bring them out.
Faces and hands and feet,
The stories behind the myth, the plot
Which the ritual enacts.
Thunder can break – Earth, bind me fast –
Obduracy, the disease of elephants.
Extrait de Christopher Okigbo: Paths of Thunder, 1968, repris dans Labyrinths, 1971.
Biobibliographie de Christopher Okigbo
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