N’y a-t-il pas déjà suffisamment de violence dans la viepour que les artistes eux-mêmes la rendent explicitedans leur création ?Les images violentes exercent sur le public une attractionindéniable… Il suffit de voir comment certaines scèneshorribles sont reprises en boucle par les télévisionsà un niveau planétaire, en garantissant un fort taux d’écouteà leur diffuseur.Notre propos n’est pas de réfléchir à ce stimulus ambiguqui agite alors le spectateur devant de telles images,mais de tenter de comprendre comment et pourquoi l’artistelui-même, s’aventure parfois dans ces territoires obscurs !
Car pour Olivier de Sagazan, peindre ou sculpter, c’est faire l’expérience d’un « corps à corps total ». On impose certes « des épreuves douloureuses » à l’objet mais on partage son martyre, non uniquement par compassion (« on a mal pour la sculpture ») mais en raison des douleurs posturales liées aux conditions de création elles-mêmes (« douleurs musculaires ou nerveuses plus ou moins aiguës », « tendinites » induites par « dissymétrie » : une main tient la palette l’autre le pinceau. La création s’apparente bien à un supplice. Pas de montée en chair sans cela : « Le squelette de ferraille est ajusté à l’aide de toutes sortes d’instruments de torture : chalumeau, fer à souder, pinces ».
Un objet, plus précisément un sujet, concentre les attaques de certains artistes : le "visage", la "face", le "portrait", la "figure", selon les contextes, les registres où il/elle apparaît. Chacune de ces expressions suscite une dimension – l’apparence, la frontalité, l’identité, l’intangibilité de la forme – que vise ce geste commun à tous ces artistes, que j’ai choisi d’appeler défiguration. Défigurer, c’est percer le voile des apparences, affronter la personne en arrachant son masque, découvrir l’identité, déformer pour mieux connaître et sentir.
Lorsqu’il se livre à ses performances, Olivier de Sagazan se décrit comme « un hippopotame métaphysique qui se roule dans sa boue purificatrice ».
L'exposition Olivier de Sagazan est visible à la Galerie 5 de la bibliothèque universitaire rue Lenôtre à Angers du 14 janvier au 26 février 2010