Sheva voulait changer d’air et Kakà s’en allait au Réal de Madrid dans des conditions déchirantes. On nous promit alors leurs dignes successeurs en la personne d’Oliveira, Ronaldinho et même le nouveau Lampard en la personne de Flamini. Bien que ce dernier soit un joueur très utile au groupe, la comparaison de Galliani fût proche de la boutade de mauvais goût.
Nous étions nombreux à remettre tout en cause. Nous traitions Galliani, Braida et le reste de l’état major milanais comme des incompétents. Leurs moindres échecs étaient très largement amplifiés même s’il faut avouer qu’ils n’ont pas forcément eu un flair extraordinaire. A un moment, nous pensions même que Galliani était sur la sellette et que son entente avec Berlusconi n’était plus au beau fixe. On parlait de détournements ou encore d’Oliver Bierhoff pour le poste, autant d’histoires où l’on trouvait du réconfort. Pour les autres tifosi, le premier responsable était Berlusconi qui n’investissait plus (autant qu’avant) dans la société. Nous doutions même de son amour envers le club. Le pensant plus occupé par la politique et ses affaires de mœurs que par l’AC Milan, une sorte de dégout naissait.
Comme pour enfoncer le clou, l’équipe n’était plus que l’ombre d’elle-même. Son jeu ne pouvait être caractérisé que par les termes lenteur, lourdeur, arrogance et suffisance. Bien évidemment, pour nous rossoneri, ces mots ne pouvaient être attachés à notre club de cœur. Nous qui avions été habitués à dominer partout et toujours, voilà qu’on se retrouvait à lutter pour une place qualificative à l’Europe. Même l’UEFA ne semblait plus à notre porté. De son coté l’Inter rattrapait son retard et n’arrêtait pas de gagner en Italie. Si bien que souvent le championnat était plié en janvier. Son seul rival n’était pas la Juve ou nous-mêmes mais la Roma de Totti. Milan était relégué au simple rang d’Outsider. Une situation aussi impensable qu’insoutenable pour les milanistes du monde entier. En cinq ans, le club le plus titré du monde n’était même plus considéré comme un cador européen. Certains managers ou clubs parlaient de tirage favorable lorsqu’ils tombaient contre nous. C’est bien ce que révèlent les paroles de Sir Alex Ferguson « Avez-vous peur de Milan après la démonstration de 2007 ? Milan n’est plus le même depuis 2007 et le départ de Kakà ». Didier Deschamps ira jusqu’à qualifier Benfica de Milan en plus remuant. Milan ne comptait plus, considéré comme une équipe de vieux, une équipe du passé, un vestige dont la place était auprès de ses trophées dans un musée.
De notre coté, on essayait de se rassurer comme on le pouvait mais nous devions nous rendre à l’évidence. Milan était en plein déclin. Les seuls renforts ne faisaient pas le poids. On devait se contenter de joueurs plus que moyens, de pépites de sable ou de joueurs en fin de contrat. Nous, Rossoneri nous oubliions que cela ne faisait que quatre ans. Nous parlions de Série B, de Home pour retraités, de rachat potentiel par des russes ou Cheikh en tout genre… Chaque saison, campagne ou match nous devions trouver un bouc émissaire. Même entre-nous une fracture s’était fait. Ceux qui défendaient les dirigeants plus par loyauté que par véritable confiance opposés aux tifosi parlant de boycott. Nous n’avions que faire des Siamo a posto cosi ou des « il n’y a personne de meilleur que nos joueurs sur le marché ». Le stade se vidait pour ne plus compter que quelques milliers d’aficionados présents lors de chaque rendez-vous. Voilà ce qu’était devenu le club que nous pensions le plus beau du monde. Un champ de ruine, un No Man’s Land…
En 2009, une lueur d’espoir nommée Leonardo ralluma la flamme de beaucoup de rossoneri. Cependant, cette lueur ne fit pas illusion longtemps. En fait, juste le temps que l’Inter gagne à nouveau et que Manchester United nous inflige une humiliation. Soit, en fin de saison, (quasi) tous unis derrière le Traditore, nous chantions pour lui et contre ceux qui nous ont amené ici. Berlusconi ne s’embarrassa pas de tout çà. Ni une ni deux, le souriant brésilien est laissé libre de tout contrat. Pendant que nous nous déchirions, l’Internazionale faisait le triplé, Coppa, Scudetto, C1. Une saison ou comment vivre un cauchemar éveillé. Nous étions purement et simplement résignés et dégoutés.
Vint alors ce fameux mercato estival de l’année 2010. Nous n’étions pas forcément heureux au départ, sachant que depuis près de dix ans cette période n’était guère palpitante. Néanmoins dés le début, de nombreuses rumeurs furent relayées par la presse. Dzeko, Krasic, Rafinha, Veloso, Acquafresca étaient les noms qui revenaient le plus. De bons joueurs pour une équipe du subtop mondial. Nous étions donc satisfaits. Malheureusement, plus nous avancions, plus les noms s’envolaient ailleurs comme Krasic et Aquilani à la Juve, Veloso et Rafinha au Genoa et Dzeko à City. Le message était clair, du Low Cost comme chaque année. Nous ne pouvions pas tomber plus bas car plus bas que le fond il n’y a pas. Dans la tête de la plupart, jouer les quatre ou cinquièmes places serait déjà un miracle. Surtout entrainé par un entraineur talentueux mais sans expérience venant d’un club habitué à jouer les seconds rôles : Cagliari. Paradoxalement, bien que nous fassions légitimement grise mine, un air de vent nouveau soufflait sur Via Turatí. Galliani n’avait jamais été aussi souriant et confiant depuis bien longtemps. Il souriait mais surtout il ne parlait pas. Quant à Berlusconi, il avait choisi personnellement Allegri et Braida se faisait très, trop discret. Entre-temps la primavera n’avait jamais été aussi forte. Bien que sentant un léger changement s’opérer, ce n’était pas suffisant pour croire à un quelconque trophée lors de l’exercice arrivant. Les matchs de prè-saisons nous rappelant bien assez vite les carences et limites de l’équipe. On préférait plus légitimement croire à l’émergence d’une pépite comme Verdi, Merkel ou Strasser qu’à un éventuel retour en force. C’est pourquoi nous étions bien naïfs.
En fin de mercato, lors des derniers moments, une annonce officielle fait office de bombe dans le paysage footballistique italien. Zlatan Ibrahimovic signe à Milan et quitte le FC Barcelone. Un véritable séisme aussi bien pour nous que pour les cugini. Un des plus grands avant-centres venait de s’engager à avec l’AC Milan d’Allegri. Assurément un grand renfort mais ce n’était pas assez pour nous. Certains voulaient Dzeko et les autres ne pouvaient accepter un tel mercenaire au sein de l’effectif. Sans parler de Sacchi et Boban qui ne voyaient pas forcément ce transfert d’un bon œil. Bref, cela changeait des choses mais pas tout. Un fuoriclasse ne pouvait pas renverser la vapeur à lui tout seul. C’est alors que le président décide d’offrir un autre joueur. Nous signons Robinho lors des derniers instants. Mais comme pour King Ibra, O Principe n’est considéré que comme un joueur indésirable dans son club. Il est bon, c’est sympa mais pas suffisant. De plus, beaucoup ne les voient pas comme Da Milan. Comme si ce terme (extrêmement subjectif) pouvait être une justification à un transfert. Nous semblions oublier que l’on ne naît pas obligatoirement Da Milan mais qu’on peut le devenir, qu’on le devient même plus souvent qu’on ne l’est à la base. Ce n’est ni un don du ciel, du sol ou encore un don du sang comme certains pourraient ou veulent le croire. En ce qui concerne l’autre Prince, Boateng il l’était encore moins. On entamait la saison 2010/2011 avec peu d’espoir mais de l’espoir quand même. Plus le temps passait, plus la ferveur rejaillissait. Le pessimisme laissait place à l’optimisme. Au fil du temps, les quelques milliers d‘aficionados se transformaient en plusieurs milliers de rossoneri chantant… Vous connaissez la suite !
Quand on fait une brève comparaison entre ce qui s’est passé pendant quatre ans résonnant comme une éternité et ce mercato où l’on espère des joueurs comme Fabregas, Hamsik, Ganso et Robben, nous pouvons dire que nous sommes passés du Désarroi au Bonheur … Mieux que ça, nous fêtons le retour de l’Espoir et c’est certainement le meilleur allié du tifoso.
Forza Milan !! Grazie per tutti…
Article rédigé par R.G
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