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Marley Marl

Publié le 12 février 2008 par Smaël Bouaici

Marley MarlLe légendaire Marley Marl , acteur essentiel de la old-school new-yorkaise, a produit tout ce qui s’est fait de bon en hip-hop à l’est de Queensbridge dans les 80’s, avant d’influencer toute la génération suivante, en étant le premier à sampler James Brown. Son Juice Crew (Roxane Shante, Eric B & Rakim, Biz Markie…), LL Cool J, tous lui sont redevables pour leurs carrières.

Qui t’a donné la passion de la musique ?

C’est mon frère avec son crew, le Hi-Fidelity. Je les voyais avec tout le matos à la maison, et en soirée à faire bouger les gens. C’était ça que je voulais faire. Je voulais être un DJ, et je voulais avoir mes propres versions. Je voulais des « specials », des « dubplates », et c’est ainsi que je suis devenu producteur.

Les dubplates (une version spéciale d’une chanson, gravée en exemplaire unique) étaient utilisées par les soundsystems reggae.

Oui j’ai réalisé très tôt que ce que je faisais tenait du mode de production jamaïcain, Quand j’ai commencé à faire le DJ je voulais des choses uniques, exclusives. Et beaucoup des dubplates que je produisais sont devenues des morceaux après leur succès en soirée.

Comment as-tu rencontré et recruté les membres du Juice Crew ?

C’était au feeling et au talent. Eric B était mon colocataire. Enfin pas vraiment : il squattait mon appart gratuitement plutôt. Roxane Shanté habitait dans mon quartier.

La légende dit qu’elle a essayé de voler ta voiture ?

(Rires) Non ce n’est pas vrai… Roxane était une des rappeuses les plus célèbres du quartier. Je la voyais pendant les concours de freestyles au coin de la rue. Avec MC Shan, elles étaient les meilleures et gagnaient tout le temps.

Ils étaient tous plus jeunes que toi. Tu te sens comme un père pour eux ? Tu es conscient d’être le garant d’un certain hip-hop ?

Oui c’est vrai, mais je me sens plutôt comme un oncle. J’ai déjà deux enfants ! Je suis très fier d’être considéré ainsi. Je suis toujours un fan de hip-hop, cette musique continue à m’exciter, et je continue avec mes nouveaux poulains, comme Bun-B des UGK (Underground Kingz). Ce sont mes « boys ». J’ai fait une nouvelle « Symphony » avec Kool G Rap, Big Daddy Kane et eux, le résultat était énorme.

Tu as trouvé ta place dans l’ombre du hip-hop, derrière la console ou derrière les platines.

Je n’aime pas être sur le devant de la scène. Ce que je préfère, c’est être celui qui fait tourner le truc derrière. Je n’ai pas besoin des spot-lights, la lumière c’est trop chaud pour moi.

Pourquoi avoir quitté Cold Chilling, ton premier label ?

Je suis parti vers 1989-90. Mon dernier album chez eux était celui de Kool G Rap… Je suis parti parce que chez Cold Chillin, je faisais 200 000 dollars par an pour 4 ou 5 albums. Chez Atlantic, c’était 300 000 dollars pour le seul album de Craig G. Maintenant, j’ai décidé de faire mon propre truc, avec Hot chillin.com. On met des a cappella, des versions dubs avec de l’écho, tout ce qu’on n’entend plus sur les disques de hip-hop.

Raconte-nous l’histoire de « Mama said Knock You Out », le tube de LL Cool J.

Mama, c’est la grand-mère de LL Cool J. Sa carrière était au plus bas, il était parti voir sa grand -mère en disant : « Personne ne veut de moi ». Elle lui a répondu :« What boy ? You’re gonna knock’em out » . Tu es bon, tu retournes dans le monde du rap et tu les retournes tous. Et en studio, il a fait cette chanson, qui a relancé sa carrière.

Pendant la Bridge War entre le Queens et le Bronx, le climat était vraiment tendu avec Boogie Down Productions ?

Oui, c’était de la vraie compétition. Ce n’est pas comme ces fausses embrouilles entre 50 cent et The Game… Après, ils vont faire une trêve devant les caméras ! Pffff… A l’époque, il n’y avait pas moyen que je fasse un show avec KRS One, je ne voulais rien avoir à faire avec le Boogie Down Productions. Aujourd’hui, ça s’est arrangé j’ai produit son dernier album (Hip-Hop Lives).

Tu es le pionnier du sampling. Que penses-tu du travail de Dr Dre, qui sample parfois un morceau entier ?

C’est vrai que les beats de Dr Dre étaient déjà des tubes avant. Mais il a une façon exceptionnelle de remettre les choses au goût du jour. Et surtout, beaucoup des titres qu’il a samplé étaient des classiques de la côte Ouest que nous n’avions jamais entendu à New York.

L’année dernière, tu es intervenu à la radio dans une interview de Jay-Z…

Ha oui ! Il parlait de son album sur la radio new-yorkaise Power 105, à dire combien son dernier disque, Kingdom Come était bien. Et pendant qu’il parlait, des beats de DJ Premier tournaient derrière. Alors j’ai appelé et je lui ai demandé où étaient les beats de Primo sur l’album.

Ca veut dire qu’on ne peut pas faire un bon album sans DJ Premier ?

Je pense que les meilleurs titres de Jay-Z étaient produits par Primo. Mais moi, je veux bien lui donner quelques beats ! A la base, pour son Black album, il devait y avoir DJ Premier, Pete Rock et moi. Et puis la donne a changé, ça ne s’est pas fait.

Lors d’une interview, Questlove de The Roots me disait qu’entre Jay-Z, Nas, Snoop et The Game, il n’avait jamais vu quatre aussi bons albums de hip-hop sortir en même temps. Tu es d’accord ?

Ce sont de bons albums. Et le hip-hop avait besoin de ces disques. Ce ne sont pas les plus grands albums de l’histoire, mais ils sont bons. Mais ils auraient pu être meilleurs avec Primo. Ce mec-là fait des choses tellement phénoménales…

Que penses-tu de l’engagement politique des rappeurs ? Avec leur influence sur les jeunes, ils devraient peut-être en parler un peu plus.

Malheureusement, tant que ce n’est pas chaud, ça ne touche pas les rappeurs. Les brutalités policières OK, ça ils le voient tous les jours. Mais dès qu’on parle politique, ce sont des choses qu’on ne voit pas au quotidien. La communauté hip-hop ne réfléchit pas en profondeur, ils restent en surface. Personne ne veut creuser les choses. « Out of sight, out of mind ». Si ce n’est pas devant leurs yeux, ce n’est pas pertinent. Quand Katrina est arrivé, ça sautait aux yeux des gens, et c’est pour ça qu’on a entendu Kanye West.
http://www.myspace.com/marleymarlmusic


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