Par Stéphane Montabert, de Renens, Suisse
En 2011, on a juste du mal à croire les revendications selon lesquelles les femmes seraient victimes de sous-enchère salariale. Si différence de salaire il y a, elle est selon moi plus à chercher en direction des comportements des uns et des autres. Les femmes choisissent plus souvent l’investissement dans leur vie familiale que dans leur carrière et optent davantage pour le temps partiel.
Je ne fais là qu’énoncer des généralités, les exceptions sont monnaie courante. On peut surtout regretter la paupérisation continue de la classe moyenne suisse à cause des prélèvements obligatoires – impôts et assurances sociales – obligeant de plus en plus les deux conjoints à travailler pour joindre les deux bouts. On peut discuter longtemps de l’opportunité de travailler à temps partiel ou du choix de rester à la maison, encore faut-il en avoir les moyens.
Dans un marché du travail libre, une catégorie de personnes prêtes à travailler à un salaire inférieur toutes choses étant égales tend à s’éliminer d’elle-même. Si une femme et un homme étaient identiques en tout hormis leur rémunération, les chefs d’entreprises se battraient pour embaucher plutôt des femmes, moins chères et tout aussi performantes donc, et réduire d’autant la facture salariale de leur société. A cause de leur rapport qualité-prix supérieur, les femmes seraient très demandées, ce qui amènerait immanquablement les employeurs à proposer des rémunérations plus élevées… Et pousserait rapidement l’écart à se combler en faveur d’un salaire lié à la seule compétence.
Soit les patrons, plus machistes que radins, sont prêts à péjorer les performances de leur entreprise par pur sexisme, soit la sous-enchère salariale entre hommes et femmes est illusoire.
Dans la cosmologie syndicale où le patron fait figure de croquemitaine, pareille perception ne dérange pas plus que ça. Mais heureusement, tout le monde n’est pas obligé d’appréhender le monde professionnel avec des oeillères idéologiques.
Les partisans de l’égalité se battent peu contre les avantages particuliers dont les femmes disposent: exemption du service militaire, conditions de retraite plus avantageuses. A l’inverse des théories sur la sous-enchère salariale, sujette à controverse, il s’agit d’une discrimination totalement assumée, inscrite noir sur blanc dans les textes de loi. Leur égalitarisme est à géométrie variable. Et ne parlons même pas de la garde des enfants en cas de divorce…
De même, le silence est de mise lorsqu’il s’agit de dénoncer les mariages arrangés ou le statut inférieur de la femme au sein des communautés musulmanes en Suisse et ailleurs.
Les différences hommes-femmes ne semblent bonnes à dénoncer que lorsqu’elles permettent de s’en prendre au Grand Capital, ce qui ne surprendra personne.
Mais quitte à entrer dans les revendications salariales, pourquoi se restreindre à l’opposition homme-femme? On pourrait évoquer la beauté:
« Une étude (…) prouve que si les plus beaux gagnent un peu plus que la moyenne nationale, les plus laids perçoivent des salaires de 11 à 15 % inférieurs. »
Ou encore, la taille:
« Les étudiants les plus grands en taille (supérieurs à 1m85) commencent leur carrière avec un salaire de 12,40% plus élevé que celui d’étudiants moins grands. »
Nobles combats syndicaux en perspective! Ces deux exemples portent sur des différences salariales supérieures aux discriminations prétendument associées au sexe des employés. Les mots d’ordres ne mobiliseront peut-être pas des masses (« petits et laids de tous les pays, unissez-vous! ») mais la lutte contre ces abjectes discriminations promet de beaux morceaux de bravoure…
Ce combat est sans fin parce qu’il est dénué de sens. Les gens ne sont pas interchangeables: la notion même de compétence et d’expérience « identique » est extrêmement suspecte. Et s’il y a un biais, il n’est pas toujours dans le sens que l’on croit, comme l’attestent des tests effectués en France avec des CV anonymes qui pénaliseraient… les demandeurs d’emploi issus de l’immigration ou venant de zones sensibles.
« Toutes les fois que je donne une place vacante, je fais cent mécontents et un ingrat » disait Louis XIV. Aujourd’hui, on parlerait de cent personnes discriminées. Choisir une personne pour un poste, c’est nécessairement écarter des candidats: certains seront des hommes, d’autres des femmes, des grands, des petits, des beaux, des laids, des droitiers, des bruns, des obèses, ou porteront des taches de rousseur.
Il est aussi facile que tentant de tomber dans le travers simpliste d’un refus motivé par l’apparence ou la condition physique. Quand bien même ce serait le cas – qui a déjà vu un top-model homme, petit, noir, obèse et âgé de soixante-trois ans? – personne ne penserait remettre ces critères en question. Le physique fait simplement partie de beaucoup de définitions de postes. Ceux dont l’amour-propre ne supporte pas l’idée seraient bien avisés d’affiner leurs compétences dans des secteurs où pareils critères n’ont pas d’importance.
Choisir, c’est discriminer. Nous ne sommes pas interchangeables. Et c’est tant mieux.
Les employés de demain tels que les rêvent les égalitaristes:
Asexués, compétences identiques, salaire unique, CV anonymisés.
Article repris du site de l’auteur avec son aimable autorisation