Suite du périple guyanais d’Alain Bossu. Après les portraits, place au grand spectacle, celui de la fusée Ariane qui décolle de Kourou.
Le matin, nous étions donc sur une pirogue, destination la rivière Orapu afin de découvrir le lodge en construction de Maurice Méthon. Joli mois de mai qui permet de découvrir la forêt et les fleuves dans la matinée, de revenir sur Cayenne en milieu d’après-midi et de filer sur Kourou (un peu plus d’une heure de route) pour remonter le fil d’Ariane. Le temps s’est calmé. Le lancement de la fusée, prévu la veille, avait été retardé. Tant mieux pour moi. Mais il y a beaucoup de trafic, sortie des écoles.
Beau comme un rêve
La «fenêtre», c’est-à-dire la tranche horaire prévue pour le lancement, est entre 17h38 et 19h30. Je sais que je n’aurais pas le temps de me rendre sur les sites d’observation. Mais il fait beau, je saluerai Ariane quand même… quelque part. Je passe la commune de Macouria, Kourou n’est plus vraiment très loin. Déjà 17h30. Je scrute le ciel. Rien que du grand bleu. Le golf est sur ma gauche, la savane à droite, gorgée d’eau en cette saison des pluies. Je peste. Je remarque une voiture arrêtée sur la droite, une dame et son enfant, avec des jumelles pointées vers le ciel. Je m’arrête, miracle. Ariane devant moi, avec un long fil blanc extra-large qui la «relie» encore à la Terre. Elle suit une trajectoire courbe dans un silence céleste. C’est beau comme un rêve. Et, tout à coup, un éclair, lumière intense. Et puis, vu du sol, des ombres noires… et puis plus rien. Ariane vient de larguer son premier étage. Spectacle irréel, une savane, le ciel « fusillé » par ce passage éclair. Et soudain, alors que l’on ne voit plus que ces traces blanches qui s’épaississent, le bruit. Un bruit incroyable, que l’on n’attendait plus. Bien plus profond que les grondements du tonnerre. Et tout s’arrête. Tiens, des chants d’oiseaux !
La Suisse et Ariane
Depuis le début du programme Ariane, la Suisse est présente au Centre Spatial Guyanais (CSG), port spatial de l’Europe. La coiffe de la fusée, qui protège la charge utile, c’est-à-dire le ou les satellites est l’affaire de Contraves-Space, du groupe Oerlikon-Buerle, une société leader dans ce domaine qui travaillait déjà pour la NASA. Mais d’autres Suisses sont présents à Kourou. C’est le cas, par exemple de Vibra-Meter (Fribourg), chargé d’un domaine aussi essentiel que de haute précision : la surveillance et le contrôle qualité des turbines des gros moteurs Vulcain.
La Société Suisse des Explosifs (SSE, à Brigue) fournit les cordeaux détonants (dispositifs de mise à feu) qui permettent l’ouverture de la coiffe et, donc, le largage des satellites.
APCO Technologies (Vevey) est un rouage on ne peut plus essentiel pour la bonne marche d’Ariane. L’entreprise travaille aussi bien dans le domaine des bureaux d’études techniques du spatial à Kourou que sur le transport des différents éléments de la fusée grâce à ses conteneurs et autres supports au sol. Plus «spatial» peut-être, APCO Technologies gère aussi les opérations de préparation des charges utiles, effectuant par exemple les tests satellites avant la mise en place.
Alain Bossu
Légendes photos
Le drapeau suisse flotte sur le Centre Spatial de Kourou
Soyouz partira désormais depuis Kourou, premier lancement prévu en octobre.
La coiffe la fusée est signée Contraves-Space (photo ESA/CNES/Arianespace)
Décollage de jour (photo ESA/CNES/Arianespace)
Grand spectacle de nuit (photo ESA/CNES/Arianespace)