D’abord on passe une sorte de sas en forme de porte à tourniquet et on se retrouve dans un univers rouge où on ressent dans les oreilles une différence de pression
de l’air. A l’intérieur c’est la désorientation spatiale, on a l’impression d’être dans un gigantesque organisme. On voit les parois mais comme elles sont incurvées vers l’extérieur on a
l’impression qu’elles s’éloignent. En haut il y a trois gigantesques orifices (des tubes digestifs ?) et les bruits de l’extérieur sont comme déformés. En ressortant on retrouve l’atmosphère
normale et on part admirer la chose dans cette gigantesque nef du Grand Palais (200 mètres de long et 45 mètres de haut). A la confusion spatiale qui nous a saisi à l’intérieur s’oppose la
confusion temporelle de l’extérieur. Est-ce un dirigeable ? Sommes-nous à l’expo universelle du début XXe siècle ou attendons-nous pour embarquer vers un exode futuriste ? Ou
bien est ce qu’une monstrueuse aubergine est sortie du sol ? En prenant du recul on découvre la structure : Des grosses boules liées les unes aux autres.
Telle est l’expérience déroutante que nous propose cette édition 2011 de « Monumenta ».
C’est l’œuvre de l’artiste Britannique d’origine Indienne Anish Kapoor qui est considéré comme l’un des plus important sculpteur d’aujourd’hui. Sa particularité est d’engager physiquement et psychiquement le spectateur dans ses réalisations. Au Grand Palais je peux confirmer que l’effet est pleinement réussi.
La couleur rouge sombre de l’œuvre renvoie à l’idée de corps et au sang qui l’habite. Anish Kapoor a toujours été intéressé par cette couleur et la notion d’obscurité, pour lui « le rouge possède un grand potentiel de noir ».
Il a appelé sa création le « Léviathan » qui est un monstre marin de la mythologie Phénicienne et, dans la Bible, un symbole des puissances du mal. Plus généralement un Léviathan désigne quelque chose d’énorme et de monstrueux. N’ayant qu’un appareil numérique de base mes photos prises à l’intérieur étaient trop sombres, mais ces clichés pris sous la nef vous donnent une idée des proportions de la chose.
C’est d’ailleurs un défi qu’Anish Kapoor a lancé pour sa fabrication. La gigantesque enveloppe de membrane textile pèse plus de 10 tonnes, mesure 35 mètres de haut et occupe un volume de 72.000 mètres cubes. Il a fallu cinquante hommes pour déplier l’ensemble et souder les quatre parties entre elles.
Jamais un objet de cette taille n’avait été construit auparavant avec cette technique. Ensuite le Léviathan a été gonflé comme une bouée.
Monumenta 2011 jusqu’au 23 juin 2011 au Grand Palais