Graoulliennes, Graoulliens, amical bonjour de la pointe Bretagne ! Non contente d’être mère de quatre enfants, Anne de Branche, inscrite en master de philosophie à l’U.B.O., est aussi la génitrice des ateliers philosophiques de la rue Ramz Koz, basés à Quimper et ouverts à tous, y compris aux enfants. Elle a gentiment accepté de me présenter ce bébé à la Gentil’ho. Interview.
Blequin : Peux-tu nous présenter en quelques mots les ateliers philosophiques de la rue Ramz Koz ?
Anne de Branche : Je propose à toutes les structures qui s’intéressent à l’enfance d’organiser des ateliers thématiques sur des thèmes philosophiques qui puissent aider l’enfant à apprendre à réfléchir, à construire sa réflexion, à découvrir par là même sa liberté et à s’épanouir. Donc, je propose à des collèges – j’espère un jour arriver dans les écoles – d’animer des petits ateliers avec des petits groupes de dix sur un thème précis comme le temps, la liberté, la justice, qui suis-je, pourquoi travailler…
B. : Comment as-tu eu l’idée de cette initiative ?
A. de B. : J’ai toujours animé des groupes d’enfants, j’ai toujours eu un très bon contact avec les enfants, les jeunes, j’ai beaucoup parlé avec eux : je sais qu’il y a une grande soif de compréhension des choses et que, quand on les motive un peu, ils ont vraiment envie de savoir pourquoi ils font les choses et de construire leur personnalité. Du coup, quand j’ai entrepris des études de philosophie, c’était vraiment dans le but d’enseigner différentes façons de voir le monde pour que chacun puisse trouver son bonheur. Donc, au lieu de faire ça dans le cadre académique, je vais faire ça de façon plus indépendante et plus « originale », je vais essayer de toucher par des biais qui sont inhabituels.
B. : Quel accueil as-tu de la part du public, pour l’instant ?
A. de B. : J’ai un très bon accueil ! J’ai fait quelques ateliers pour enfants chez moi qui ont eu un bon écho ; les gens ne s’y sont pas bousculés par m’amener leurs enfants, j’ai un accueil très favorable quand je présente mon projet, ça intéresse énormément, mais ça ne veut pas dire que les gens soient prêts à prendre leur voiture et amener leurs enfants le samedi après-midi pour un atelier philo. J’interpelle beaucoup les gens par mon projet, maintenant, je commence juste à déposer les documents dans les collèges, je vais voir ce que ça va donner, si l’intérêt est suffisant pour que les gens investissent dedans…
Le logo des ateliers philosophiques de la rue Ramz Koz, dessiné par votre serviteur.
B. : Tu es toi-même en master de philo : est-ce que les professeurs de la faculté connaissent ces ateliers ?
A. de B. : Oui, j’ai eu de très bonne réactions : il y en a un qui a dit qu’il aurait adoré faire ça, et un autre qui m’a dit qu’il amènerait bien ses enfants.
B. : Et tes collègues étudiants ? À part moi, bien sûr…
A. de B. : Ils ont eu une réaction beaucoup plus mitigée : d’abord, ils ont été stupéfaits parce que, pour eux, philosophie et enfance, ce n’est pas compatible du tout ! Mais finalement, il y en a certains qui suivent mon projet plus régulièrement, je sens qu’ils s’investissent un peu avec moi : ils donnent des conseils, leur avis… Ils s’y intéressent, ils commencent à voir ça favorablement.
B. : Je sais que tu as une vie familiale bien remplie : comment arrives-tu à gérer ces ateliers ?
A. de B. : Ah, ça, c’est une question de choix ! D’abord, j’ai fait une formation qui s’appelle « entreprendre au féminin » et qui donne tous les outils nécessaires à l’entreprenariat, et notamment celui de la gestion du temps. Il faut savoir mettre les gros cailloux à la bonne place ! Il y a des priorités, il y a des choses qui sont moins importantes, et quand on met les choses dans le bon ordre, finalement, on arrive à faire beaucoup plus de choses ! C’est clair que je fais passer la gestion de ma maison avant, mes enfants autant que possible ; les ateliers philo, c’est vrai, ont pris une place importante, j’y ai consacré beaucoup de temps, mais c’est parce que c’est un projet qui me tient à cœur, c’est mon projet de l’instant.
B. : Mêles-tu tes enfants à cette initiative ?
A. de B. : Ils sont au courant, bien sûr, ils ont suivi l’évolution, mes projets, ils ont participé à un atelier… C’est un petit peu eux qui m’ont poussé à ça parce qu’ils étaient déjà intéressés : je voyais bien que, dès que je lançais un sujet étudié à la fac, ils rebondissaient tout de suite dessus avec beaucoup de pertinence, donc ils ont quand même été un peu le moteur de ma décision et aujourd’hui, ils suivent pas à pas ce que je fais, je leur montre les documents relatifs aux ateliers, je leur demande leur avis et ils sont contents, vraiment enthousiastes.
B. : Et d’autres, parmi tes proches ?
A. de B. : Les très proches sont sceptiques : je crois que c’est normal, ça se passe souvent comme ça ; les proches plus éloignés sont très enthousiastes, ils me soutiennent, ils me demandent des nouvelles, ils sont contents de me voir me lancer : en fait, ça fait des années qu’ils me voient travailler et là, c’est la concrétisation de mon investissement, ça fait quand même cinq ans que j’ai repris des études en gérant tout à la fois et c’est vrai que là, j’arrive…non pas au terme, parce que ce n’est qu’un début, mais j’entreprends enfin quelque chose.
B. : Quelles sont tes espérances pour l’avenir de ces ateliers ?
A. de B. : J’en ai deux. D’abord, j’aimerais beaucoup toucher des milieux assez atypiques comme l’hôpital : les enfants malades, les parents de l’enfant malade, j’aimerais bien aussi aller, éventuellement, sur la CAF, on m’a dit que ce n’était pas impossible, pour toucher les enfants des familles en difficulté. Et puis j’aimerais bien même, un jour, arriver en entreprise, mais sur d’autres thématiques, forcément, et avec une autre formation. Mon deuxième objectif, ce serait de fidéliser, de créer, par exemple, un réseau facebook assez dynamique et vivant pour que tout le monde participe, que tous les anciens, tous les présents des ateliers puissent communiquer ensemble, pour vraiment créer quelque chose de communautaire, un esprit d’appartenance.
B. : Quels conseils donnerais-tu à quelqu’un qui veut se lancer dans quelque chose de similaire ?
A. de B. : Je conseillerais d’abord de faire doucement, de prendre son temps, de ne pas vouloir aller vite, et de se former : se former autant sur le fond – de la philosophie – que sur la forme – monter une structure, ce n’est pas évident, il y a beaucoup d’écueils : ça parait facile, comme ça, et on s’aperçoit qu’on se casse vite le nez. Pour ça, il y a des super formations, des structures qui accompagnent tous les projets, toute les initiatives ; il faut vraiment s’entourer, se faire conseiller… se former !
B. : À titre personnel, d’où te vient ton intérêt pour la philosophie ?
A. de B. : J’ai toujours beaucoup observé les gens, réfléchi sur le monde, et la philosophie me parait le meilleur voire le seul moyen…d’appartenir au monde, j’ai envie de dire ! De le connaître et d’y être bien !
B. : Quel est le sujet de ton propre mémoire de recherche ?
A. de B. : Je pense que je vais travailler sur la notion de troupeau chez Nietzsche ; Nietzsche parce que je suis attirée par sa vision de la vie, je trouve qu’il est à la fois pessimiste et optimiste…
B. : Rien à ajouter, pour conclure ?
A. de B. : Je pense qu’un projet comme ça, ça me correspond vraiment bien ; j’espère que ça marchera, j’a vraiment ça dans la peau. Maintenant, ce n’est pas un garant de succès, mais je pense que quand on vit les choses pleinement, on a toutes les chances pour que ça réussisse.
Propos recueillis le 10 juin dernier. Allez, kenavo !
LES ATELIERS PHILOSOPHIQUES DE LA RUE RAMZ KOZ 21 rue Ramz Koz 29000 Quimper
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