Un bel éloge aux auteurs de bandes dessinées !
Après leurs deux œuvres communes précédentes (« La nuit de l’Inca » et « Dieu qui pue, Dieu qui pète »), Vehlmann et Duchazeau récidivent au sein de la collection Long Courrier avec cette ode subtile à la narration.
Le scénario toute en finesse de Vehlmann commence par une introduction interactive avec le lecteur et qui incite ce dernier à se préparer à entendre une histoire fabuleuse. Ensuite, avant de nous emmener en voyage autour du monde à la découverte d’histoires extraordinaires, Vehlmann aura le culot de nous dévoiler l’essentiel de l’histoire avant même son commencement.
L’histoire est celle de cinq conteurs perses qui vont parcourir le monde à la recherche d’histoires pour fabriquer le plus beau conte imaginable, et ainsi remporter le grand concours de contes organisé par le calife de Bagdad. Son développement intelligent va inciter le lecteur à réfléchir sur l’art de raconter des histoires et sur le pouvoir des mots.
Les cinq personnages sont très bien choisis et d’une extraordinaire complémentarité, avec Anouar l’antisocial rebelle, Ahmed le fils du calife aux remarques qui font mouche, Nazim la brute au cœur en or, Tarek le charmeur et Wahida la féministe. Leurs relations et leurs péripéties vont nous emmener dans un récit puissant, mélangeant humour, poésie, philosophie et aventure.
Même si toutes les histoires ne se valent pas forcément et qu’il manque un petit quelque chose à la fin du récit (la cerise sur le gâteau) pour le rendre culte, le mélange de légèreté et de profondeur offert tout au long du récit est à applaudir.
Le dessin typé et légèrement hachuré de Franz Duchazeau fait un peu penser à celui de Sfar dans « Le chat du rabbin » et contribue parfaitement à l’ambiance de ce conte des mille et une nuits.
Bref, un bel éloge aux conteurs d’histoires que sont les auteurs de bandes dessinées et qui explique peut-être même pourquoi il faut parfois attendre trois ans après une histoire.