Ainsi dans un billet d’Olympe – que l’on ne peut soupçonner de se soumettre aux antiennes de la domination masculine – trouve-t-on la phrase suivante : « à Copenhague les femmes peuvent photographier leur vagin » !
En lisant cela, je me suis dit : tiens, comment peut-on photographier un vagin étant donné que cette organe est interne… J’ai donc cliqué sur le lien signalé et j’ai appris que « depuis le 8 mars, à la faveur d’une idée de la fondation de K.Vinders Fond présentée à l’Institut Goethe de Copenhague, les femmes peuvent se faire prendre le vagin en photo. Et c’est dans une cabine de photomaton que le projet compte sensibiliser les Danoises à leurs corps. L’occasion de poser quelques questions à la promotrice de « Kussomaten » ». Hormis dans le titre, cet interview de CaféBabel utilise à plusieurs reprises le terme de vagin.
A y regarder de plus près – et notamment la cabine du photomaton (ci -dessus) et les photos obtenues – on se rend bien compte qu’il s’agit pour ces danoises non pas de photographier leur vagin mais tout simplement leur sexe… Je comprends mieux. Mais pourquoi cette confusion ? Le terme danois la commet-il lui-même ? Que veut dire exactement « kussomaten » ?
Il est en tout cas stupéfiant qu’au sujet d’un projet qui a vocation à favoriser chez les femmes la connaissance de leur sexe, on utilise un terme qui entretient la confusion et marque, au mieux, une méconnaissance. Le sexe féminin ne se résume pas au vagin qui est un organe génital interne. S’il s’agit de faire une synecdoque, c’est-à-dire une figure de style consistant ici à prendre la partie pour le tout, c’est pour le moins nuisible au regard des intentions du projet ! Parler de vagin au lieu de sexe, c’est finalement réduire le sexe féminin à une fonction passive de réceptacle et donc insidieusement se conformer à une vision ancienne et patriarcale du sexe féminin. Vision qui oublie un organe essentiel, le clitoris, comme le rappelait la documentation associée au film La domination masculine :
Au 19ème siècle, une importante littérature, écrite majoritairement par des hommes, est consacrée à la physiologie et étudie les différences physiques entre hommes et femmes.
[...] Dans ces travaux anciens sur l’anatomie [...] le clitoris qui est la principale zone de plaisir chez les femmes, est représenté sur certaines planches comme étant beaucoup plus petit que ce qu’il n’est réellement, comme s’il n’était qu’une partie « accessoire » de l’appareil génital féminin.
Alors que les femmes sont les seules à posséder un organe dédié seulement au plaisir, sans autre fonction. Un sacré avantage sur les hommes. Comme on peut l’observer sur la troisième planche [p 16], le clitoris (tout ce qui est en rose) est très grand et seule une toute petite partie (le gland) est visible. Quatre parties du clitoris, deux de chaque côté, entourent le vagin.
Les petites filles sont donc éduquées avec l’idée qu’elles ont quelque chose en moins (la verge) alors qu’elles ont quelque chose de plus !
[...] Les femmes aussi ont des érections. Comme le pénis de l’homme, le clitoris renferme des corps caverneux qui se gorgent de sang sous l’effet de l’excitation.
Bref les clichés ont la vie dure et il y a encore du boulot.
La campagne « Osez le clito ! » de l’association « Osez le féminisme », qui commencera le 20 juin, est donc la bienvenue.
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