Depuis quelques années et l’avènement des nouvelles technologies de l’information et de la communication, nous assistons à l’émergence d’un phénomène, d’un nouveau métier : « les évangélistes technologiques ». Cette dénomination est loin d’être inconnue puisqu’elle désigne depuis de nombreuses années déjà, les professionnels de l'évangélisation dans les différentes églises chrétiennes. Leur rôle est alors de relayer et de prêcher l’évangile auprès des non-croyants. A priori très éloignés des nouvelles technologies, que font les évangélistes dans l’innovation ?
"La nécessité d'innover constamment est un fait largement reconnu. Pourtant, la plupart des nouveaux produits s'enlisent ou ne réussissent pas à générer des profits acceptables. En effet, l'acceptation par le marché est généralement plus longue que prévu. Parfois même, le pionnier ne fait qu'ouvrir la voie aux concurrents qui le devanceront à leur tour. Ce problème est encore plus aigu pour les produits technologiques, qui se caractérisent souvent par : des produits sophistiqués, des concurrents nombreux et audacieux, des clients désorientés et une évolution rapide. "
Par conséquent, pour réussir, la commercialisation des nouveautés technologiques nécessite l’implication d’un maximum de parties prenantes c’est-à-dire d’individus et de groupements qui vont contribuer, volontairement ou non, à la capacité de créer de la valeur et de l’activité et qui en sont ses bénéficiaires potentiels et/ou en assument les risques. Réunir ces parties prenantes est précisément le rôle des évangélistes technologiques.
Un évangéliste technologique peut être considéré comme un ambassadeur d’une organisation. Son rôle est de promouvoir, de faire connaître et d’impliquer les partenaires, prospects, utilisateurs, producteurs et tous autres types d’acteurs de son industrie dans le développement de ses technologies ou vision. La grande majorité des organisations NTIC ( Nouvelles Technologies de l’Information et Communication) ont ainsi des évangélisateurs en chef, chargés de promouvoir leurs innovations.
Il n’existe pas réellement de fonction, ou de métier désignant cette activité qui regroupe des compétences de commercial, de communication, de relation publique, de R&D mais aussi de veille. Ce rôle est ainsi souvent assumé par un président ou un leader charismatique d’une organisation. La notion de leadership est d’ailleurs très présente dans la définition de « cette fonction ». Il faut en effet pouvoir vendre un rêve, une vision et d’agréger un maximum de parties prenantes dans leurs réalisations. Selon Guy Kawasaki, ancien évangéliste Apple, il s’agit d’un «… process par lequel vous devez convaincre que votre produit ou idée est la meilleure chose qu’il puisse arriver au monde. »
Ainsi, selon une étude menée en 2006 par Frederic Lucas-Conwel pour le SD Forum Conférence qui a porté sur 30 évangélistes en activité être un évangéliste nécessite de nombreuses qualités comportementales comme l’honnêteté, l’ouverture d’esprit, la franchise, l’enthousiasme, la communication, l’énergie, ou encore l’indépendance ( Il faut être impartial, même avec ses produits ).
Maintenant que nous savons ce qu’est un évangéliste technologique et quel est son rôle nous allons essayer d’en établir les fondements à partir des dernières publications existantes. Guy Kawasaki, premier « évangéliste technologique » de l’histoire, et créateur du terme, a récemment publié un article dans lequel il distille en dix points ce qu’il appelle « The Art of Evangelism ». Il est a noté que cet article fait référence dans le milieu et a été repris par de nombreux blogueurs et analystes en la matière.
- Create a cause. As the previous blog called “Guy's Golden Touch” explained, the starting point of evangelism is having a great thing to evangelize. A cause seizes the moral high ground. It is a product or service that improves the lives of people, ends bad things, or perpetuates good things. It is not simply an exchange of things/services for money.
- Love the cause. “Evangelist” isn't simply a job title. It's a way of life. It means that the evangelist totally loves the product and sees it as a way to bring the “good news.” A love of the cause is the second most important determinant of the success of an evangelist–second only to the quality of the cause itself. No matter how great the person, if he doesn't love the cause, he cannot be a good evangelist for it.
- Look for agnostics, ignore atheists. A good evangelist can usually tell if people understand and like a product in five minutes. If they don't, cut your losses and avoid them. It is very hard to convert someone to a new religion (ie, product) when he believes in another god (ie, another product). It's much easier to convert a person who has no proof about the goodness or badness of the evangelist's product.
- Localize the pain. No matter how revolutionary your product, don't describe it using lofty, flowery terms like “revolutionary,” “paradigm shifting,” and “curve jumping.” Macintosh wasn't positioned as the third paradigm in personal computing; instead, it increased the productivity and creativity of one person with one computer. People don't buy “revolutions.” They buy “aspirins” to fix the pain or “vitamins” to supplement their lives.
- Let people test drive the cause. Essentially, say to people, “We think you are smart. Therefore, we aren't going to bludgeon you into becoming our customer. Try our product, take it home, download it, and then decide if it's right for you.” A test drive is much more powerful than an ad.
- Learn to give a demo. An “evangelist who cannot give a great demo” is an oxymoron. A person simply cannot be an evangelist if she cannot demo the product. If a person cannot give a demo that quickens the pulse of everyone in the audience, he should stay in sales or in marketing.
- Provide a safe first step. The path to adopting a cause should have a slippery slope. There shouldn't be large barriers like revamping the entire IT infrastructure. For example, the safe first step to recruit an evangelist for the environment is not requiring that she chain herself to a tree; it's to ask her to start recycling and taking shorter showers.
- Ignore pedigrees. Good evangelists aren't proud. They don't focus on the people with big titles and big reputations. Frankly, they'll meet with, and help, anyone who “gets it” and is willing to help them. This is much more likely to be the database administrator or secretary than the CIO.
- Never tell a lie. Very simply, lying is morally and ethically wrong. It also takes more energy because if one lies, then it is necessary to keep track of the lies. If one always tells the truth, then there's nothing to keep track of. Evangelists know their stuff, so they never have to tell a lie to cover their ignorance.
- Remember your friends. Be nice to the people on the way up because one is likely to see them again on the way down. Once an evangelist has achieved success, he shouldn't think that he'll never need those folks again. One of the most likely people to buy a Macintosh was an Apple II owner. One of the most likely people to buy an iPod was a Macintosh owner. One of the most likely people to buy whatever Apple puts out next is an iPod owner. And so it goes.
La fonction d’évangéliste est assez complexe à définir, d’autant plus que parfois l’évangéliste émerge de lui-même. Ce phénomène est notamment dû au développement des blogs, c’est-à-dire au développement de sites web personnels. Les blogs donnent la parole à des acteurs qui, par leurs écrits et leurs réflexions publiques, deviennent de vrais évangélistes technologiques. Robert Scoble en est le meilleur exemple.
Dans son numéro du 15 Février, « The economist » un célèbre hebdomadaire dédié au monde des affaires, décrivait l’influence de ce blogueur et l’influence qu’il avait auprès de la cible de son employeur, Microsoft.
« He has become a celebrity among geeks worldwide, who read his blog religiously. Impressively, he has also succeeded where small armies of more conventional public-relations types have been failing abjectly for years: he has made Microsoft, with its history of monopolistic bullying, appear marginally but noticeably less evil to the outside world, and especially to the independent software developers that are his core audience » Source Wikipédia
À l’heure où les technologies innovantes, et notamment celles issues de NTIC, évoluent rapidement, l’utilité des évangélistes technologiques n’est plus à démontrer. A la fois influenceurs, leaders, visionnaires, ces évangélistes apportent aux organisations qui les emploient une vraie valeur ajoutée et permettent à leurs employeurs de maximiser les chances de réussite des innovations. Encore marginale, cette fonction est amenée à prendre de l’ampleur au sein des organisations « innovantes ». On peut regretter toutefois l’absence d’évangélistes dans les organisations non anglo-saxonne. Après avoir inventé le marketing, inventeraient-ils aujourd’hui une nouvelle « fonction », discipline ? Le débat est ouvert !