L’ambiance de la ville
Le Comte
Nos voyageurs sont étonnés par le caractère bouillonnant de la ville ce que l’un deux résume joliment : « L'aspect de cet Orient condensé, bourdonnant, agité, si neuf pour qui a vu l'Orient si calme partout ailleurs, a quelque chose de quasi fantastique et de surprenant ».
Ces voyageurs français ne se déplacent pas sans plusieurs lettres de recommandations et sont presque toujours invités par les Européens de Bombay. Un officier en congés note à propos du Byculla Club : « Arrivons enfin. Splendide Byculla-Club au milieu de jolis jardins; — ses immenses dimensions; — son intelligente disposition. Des courants d'air traversent le club en tous sens, de sorte que pas un souffle d'air n'est perdu pour les membres à l'intérieur ; de vastes vérandas sont couvertes de petites tables luxueusement servies. Dîner remarquable avec pamphrets (poissons renommés du pays) et le meilleur claret que j'aie bu aux Indes. Pendant que les pankas nous éventent du plafond, un coolie, avec un vaste éventail à pied dans la main, balance son instrument et nous envoie de l'air par côté, tout le temps du dîner ».
Le Comte de Gabriac fréquentera
également ce Byc
Bien entendu nos voyageurs commentent et décrivent la population : « La race de ce pays est celle qui m'a la première et peut-être le plus frappé dans toute l'Inde. Les hommes maigres et chétifs, quoique assez grands, sont ce qu'ils sont dans toute l'Inde : la tête couverte de turbans extrêmement variés et souvent très travaillés, véritables merveilles de soin, de patience et de finesse. Les jambes des Indous aisés sont couvertes du pantalon étroit tire- bouchonné et ils portent la grande, éternelle et laide capote indoue qui place la taille directement sous les bras. Mais comment, en débarquant, ne rien dire des femmes de ce pays ? Leur petit costume dégagé à l'excès leur laisse les jambes libres et nues jusqu'à mi-cuisse ; le bassin est étroitement serré dans un pagne qui, passant ensuite en écharpe le long du corps à moitié nu, va se terminer sur la tête, à la chevelure plaquée et au petit chignon anglais, laquelle supporte très souvent un fardeau très lourd et volumineux ; le cou et les reins nus sont alors tendus sous le poids comme un ressort d'acier. Ces femmes tiennent leurs grands yeux toujours baissés, surtout pour les étrangers qui semblent ne pas exister pour elles. Les épaules et les seins sont comme cousus dans un court corsage dont la teinte foncée se marie avec la couleur bronzée de leur peau. L'impassibilité de leur visage est telle que les pieds, tout en rasant précipitamment la terre, et surtout les bras, en se balançant, semblent seuls accuser le mouvement ; le reste de leur personne se transporte immobile comme un bronze ».
A propos des femmes, le Comte
de Gabriac note : « Mais ce qu'il y a de singulier (à
Jacques Siegfried[1] décrit la manière dont les Indiens sont habillés : « Le premier coup d'oeil est infailliblement absorbé par l'énorme turban qui les garantit du soleil et dont la forme, la couleur et l'ampleur varient selon la caste et l'emploi du sujet. Du turban, le regard descend au front tatoué de dessins rouges, jaunes ou blancs, selon la divinité sous la protection de laquelle chacun s'est mis plus spécialement ; puis aux oreilles indéfiniment allongées et déformées par de riches et lourds bijoux. Enfin une tunique blanche, serrée par une grosse ceinture, descend jusqu'à leurs genoux par-dessus une espèce de jupe-pantalon d'où sortent leurs pieds nus chaussés de babouches pointues. J'aurais ri volontiers de quelques détails, et cependant, à tout prendre, je trouvais en eux une certaine dignité qui me plaisait et qui semble inhérente aux Orientaux. Je dois ajouter que j'avais devant moi des hommes des classes les plus élevées et que ma description ne saurait s'appliquer aux Hindous en général ».
A SUIVRE
[1] In “ Seize mois autour du monde, 1867-1869, et particulièrement aux Indes, en Chine et au Japon ». Par Jacques Siegfried. Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, G-29146