Magazine Cinéma
dimanche 12 juin 2011
En parcourant mes anciennes critiques, je m’aperçois que j’ai été par moments probablement très généreux, notamment lorsque j’ai écrit des critiques à la chaîne l’année dernière pour finir mon e-book sur ma sélection de films préférés. En fait, la vraie question, c’est : « Peut-on mettre au même niveau l’Age de glace, Le dîner de cons et Andreï Rublev ? ». A l’époque, je n’avais pas envie de donner l’image d’un intello de base qui se complaît dans les films d’Angelopoulos, Tarkovski et Bela Tarr. En mettant ces cinéastes au même niveau que les autres, j’avais envie de susciter l’intérêt pour des cinéastes réputés « difficiles ». Y aurait-il deux cinémas ? Un cinéma de divertissement qui peut être d’excellente qualité et un cinéma plus tourné sur la réflexion, le plaisir intellectuel. Faudrait-il mettre en place deux systèmes de notation pour ces deux genres totalement non fongibles ? Le cinéma de masse ne peut-il être qu’un divertissement ?
La technique de base est la même mais c’est comme si l’on choisissait de comparer Proust et Agatha Christie. Ils sont tous les deux faits de mots, j’aime l’un par la beauté de l’association de toutes ces lettres et l’autre par la manière de raconter une histoire… En fait, ce n’est pas tout à fait vrai, je ne lis que des œuvres réputées littéraires ou alors des livres d’histoire ou des essais philosophiques. Je crois bien que cela tient à la longueur de l’investissement : pour un film, il ne s’agit que de maximum deux heures, pour un livre cela peut être beaucoup plus. Alors quand il est mal écrit, long et même si l’intrigue est un peu captivante, je préfère me tourner vers le cinéma.
Je crois bien que tout ceci veut dire que je pense effectivement qu’il y a deux cinémas, les deux me captivent mais pour des raisons bien différentes.
Pourquoi écrire tout ceci aujourd’hui ? Et surtout à propos de « Lovely bones » ? C’est parce que ce film est l’illustration de ce que je n’aime pas du tout dans le cinéma de divertissement. C’est esthétique à outrance, les images sont belles, la musique un peu trop pesante mais surtout c’est le vide de l’histoire qui m’a déçu. Il n’y a rien dans ce film, on n’y comprend pas grand-chose, c’est trop pompier pour être un beau film onirique. Peter Jackson est doué pour utiliser les effets spéciaux et filmer les scènes de guerre ou d’action mais lorsqu’il s’agit de faire dans la finesse, il n’y a plus personne.
C’est un peu comme « The fountain », ce film est une supercherie jouant sur le mystérieux pour se donner des faux airs d’œuvre d’art. Faire des belles images, beaucoup de gens y réussissent, les mettre en accord avec une histoire, c’est une toute autre gageure et Peter Jackson s’y est complètement planté.