Depuis fin Septembre 2010 le Vatican fait l’objet d’une enquête sur un transfert de fonds douteux qui le replonge ainsi dans un nouveau scandale financier.
Les modes de financement du plus petit Etat du monde sont d’apparence complexe. En effet ils s’organisent autour de trois sources. La première vient des intérêts rapportés par les investissements réalisés par le Saint-Siège. La deuxième correspond aux contributions volontaires et annuelles des diocèses, plus connue sous le nom de Denier de Saint-Pierre. En ce sens, les contributions les plus significatives viennent d’Italie, de France mais aussi des Etats-Unis et d’Allemagne. Proportionnellement au nombre de pratiquants, le Japon et la Corée arrivent en tête. L’Italie a cependant un statut particulier dans ce classement puisque ses flux financiers vers le Vatican viennent pour partie d’accords bilatéraux prévoyant pour 2009, 0,8% des impôts italiens au bénéfice du Saint-Siège.
La dernière source de financement du Vatican est l’Institut des Oeuvres Religieuses (IOR) ou Banco Vaticano. Cette dernière, fondée en 1942 par le pape Pie XII est chargée de l’administration des biens de l’Eglise catholique. Il faut alors distinguer dans la mission de gestion de l’IOR, le patrimoine du Vatican, soit 600 millions d’euros, de celui de l’ensemble de l’Eglise catholique qui représente, lui, plus de 5 milliards d’euros.
La définition des activités légales de l’IOR reste néanmoins floue : le Vatican maintient lui-même que cet institut n’est pas une banque au sens propre du terme, ce qu’infirme la Banque d’Italie. L’enquête en cours en est ainsi complexifiée. Les faits sont les suivants : le 6 Septembre l’IOR demanda à une banque italienne, le Credito Artigiano, de lui transférer 23 millions d’euros à partir d’un compte gelé par décision de justice quelques mois plus tôt pour défaut de transparence.
Peu après le Credito Artigiano, tenu, comme toutes les banques italiennes, de signaler toutes ses opérations avec le Vatican à la Banque d’Italie, informa cette dernière de la requête de l’IOR. Puis le 20 Septembre le parquet de Rome saisit les 23 millions d’euros résultant de la
transaction entre les deux organismes et ouvrit une enquête sur le président de la Banque du Vatican et son directeur général pour non justification de transfert de fonds.
Les mouvements des comptes de l’IOR sont donc soumis à un contrôle permanent depuis l’année dernière suite à la demande de la Banque centrale italienne qui considérait que le traitement spécial réservé au Vatican dans le domaine bancaire devait prendre fin. Cette attention particulière accordée au Saint-Siège s’inscrit dans la lutte accrue contre le blanchiment d’argent lancée par l’Union Européenne en 2007.
Dans ce nouveau scandale financier il s’agit bien de l’opacité des comptes du plus petit Etat du monde qui est mise en cause ainsi que l’éventuel blanchiment d’argent venant de la mafia auquel il pourrait participer. Cela fut déjà suspecté au début des années 1980 avec l’affaire de la banque Ambrosiano. A cette époque l’IOR était le principal actionnaire de cette banque dont il a été révélé qu’elle recyclait l’argent sale de la mafia mettant de fait en cause le dirigeant de la Banque du Vatican, Paul Marcinkus surnommé le « banquier de Dieu ».
Cependant le Saint-Siège a récemment manifesté sa volonté de s’insérer dans le système financier international en s’efforçant de respecter les règles de transparence imposées par l’Union Européenne. Il a, pour cela, nommé Gotti Tedeschi, professeur de finance et d’éthique à l’université catholique de Milan pour résoudre le problème de l’organisation de ses finances. Il est, par ailleurs, en pleines négociations avec la Banque centrale italienne, l’Union Européenne mais aussi avec l’Organisation pour la coopération et le développement économique, le Groupe d’action financière internationale afin d’établir une série d’accords définissant le nouveau statut de l’IOR.
Le scandale du Credito Artigiano va donc à l’encontre des efforts réalisés par le Vatican depuis cette année pour rentrer dans la « liste blanche » des pays exemplaires en matière de transparence financière. C’est pourquoi l’IOR affirme que le transfert de fonds dont il aurait été le demandeur résulte d’un malentendu : les opérations qualifiées de douteuses par le parquet de Rome ne seraient en fait que des opérations de trésorerie de l’IOR d’un de ses comptes vers un autre dont il est aussi propriétaire. L’enquête ouverte récemment laisse penser que l’IOR et le Vatican ne défendent pas nécessairement les mêmes intérêts. Les voies du Seigneur sont impénétrables…
M.F.