Jeudi 7 février, Place des Pianos à Saint-Denis, le grand Luc Besson n’a pas joué du pipo, mais nous a dévoilé, à nous les riverains quelques secrets de son futur projet de Cité internationale du cinéma.
Au programme du suspens, de la séduction, des questions, de l’humour et des engagements, le tout interdit aux photographes et aux caméras.
Et voilà comment d’un flyer dans ma boite aux lettres de riveraine, en passant par un article dans ma Pavda locale, à savoir le journal des bonnes nouvelles municipales, je me pointe à 18h pile Tour Pleyel, avec 2 idées en têtes : en savoir plus sur le projet et interpeller Luc Besson sur la sécurité des enfants des écoles situées à 100 mètres de sa futur Cité du Cinéma.
Au passage, l’occasion de vous livrer des infos exclusives que vous ne lirez nulle part ailleurs.
Suspens d’abord : quand va-t-il apparaître ? Pendant 35 minutes, Patrick Braouzec ex-maire de Saint-Denis et président de la communauté d’agglomération Plaine-Commune, a tenté et pas trop mal réussi à meubler le retard de Luc Besson.
Vocation ratée d’animateur ? Bien que les Cocos ne soient pas ma tasse de thé, je reconnais volontiers que Patrick m’a paru sympathique et bon chauffeur de salle.
Bien plus jovial et concerné que ses camarades, relativement silencieux : par peur d'une requalification d'interventions dans leurs comptes de campagne ? ou bien afin de ne pas rompre le duo Luc-Patrick ?
Par ordre d’apparition au générique : Didier Paillard (maire de Saint-Denis), Jacqueline Rouillon (maire de Saint-Ouen) et Michel Bourgain (maire de L’île-Saint-Denis), tous riverains du projet Besson et membres Plaine-Commune.
Euh non, pardon Saint-Ouen, bien que communiste, mais la plus riche du coin, n’a pas fait porte-monnaie commun avec ses voisines, pas folle la guêpe ;-). Saint-Ouen attend peut-être le Grand Paris ?
La cité du Cinéma, c’est le projet fou, de réhabiliter une ancienne centrale EDF, pour convertir 6,5 hectares au culte du cinéma et rendre la France compétitive et opérationnelle face à Cinecitta ou encore la Tunisie ou l’Angleterre pour le 5e élément.
Débuts des travaux prévus cet été, ouverture « mai 2010, juste avant Cannes, comme ça ils viendront tous un jour plus tôt à Saint-Denis pour l’inauguration », s’enthousiasme Luc Besson.
Le dernier Combat du père de Nikita et Léon (mes 3 préférés, pas eu le temps de le dire à Luc jeudi soir, alors je l'écris ici) nous fait aussi rêver, nous les Séquano-Dyonisiens (habitants du 93 en français non-parlé sur TF1 et M6).
On a du mal à croire que les méga stars vont prendre Saint-Denis pour Hollywood, et ce même si Saint-Denis a bien réussi à marcher en portant sa tête coupée tout en haut de Montmartre.
Le projet de Luc Besson (130 millions d'euros) prévoit l'aménagement de neuf plateaux de tournage de films, d'ateliers de décors, de costumes et de techniques liées aux métiers du cinéma, mais aussi 30 000 m2 de bureaux pouvant accueillir des sociétés de production, un restaurant, un parking (avec des arbres a répété avec plaisir Luc) pour attirer les plus grands tournages de films, le tout idéalement situé au cœur du quartier Pleyel à Saint-Denis, en bord de Seine, de l’autoroute A86 et à 800 mètres du métro ligne 13.
Luc Besson va-t-il produire des miracles pour l’emploi local ? Cette interrogation est revenue à plusieurs reprises.
le PdG d’Europacorp a expliqué que « ces studios créeront des emplois dans les secteurs du gardiennage, de l'entretien, de la restauration, mais aussi dans tous les métiers associés aux décors : tapisserie, menuiserie, peinture, serrurerie... ».
Sans langue de bois, « Je ne suis pas un homme politique, je ne vends pas de chiffres », Luc Besson a précisé qu’il ne pouvait pas s’engager sur un nombre précis d’emplois que ça ne dépendait pas de lui. Toutefois, il « mettra tout en œuvre pour éviter que des gens fassent plus d’une heure de trajet pour venir bosser, pendant que d’autres chôment dans leur cité juste à côté. »
« Pas de politique », c’est donc le bon moment pour que la maman entre en scène.
Adossée à la vitre sur le côté de la salle, après avoir levé la main, le jeune homme au micro me pousse au 1er rang, et je me retrouve debout face à Luc.
« 2 écoles sont situées à 100 mètres de votre projet, côté Vieux-Saint-Ouen. La circulation est déjà très dangereuse vu que les automobilistes prennent la rue pour une rocade de desserte de l’autoroute A86 sortie Pleyel d’où ils déboulent littéralement. Je suis une maman, j’ai peur pour nos enfants, je vous demande d’intervenir. »
Applaudissements de la salle. Je me sens encore plus toute rikiki d’avoir « commis » autant de Rififi.
« Je veux vous aider, mais heu, je ne vois pas comment. »
« Disney a bien aménagé une bretelle d’autoroute à Marne-La-Vallée, ne pouvez-vous pas demander que, cette rue qui desservira aussi votre projet, soit humanisée et sécurisée ? »
Rires de la salle.
Catastrophe, pour moi, comme toutes les nanas qui ne savent pas lire une carte. Là pas d’excuse, genre c’est dans le pli, je ne vois pas. L’écran géant projette une méga photo Google Earth. Et si en levant le bras de mon jean taille basse, on apercevais quelque chose ? Me voilà donc dos à plus de 200 personnes, sur l’estrade entrain d’errer à la recherche d’un bâtiment ressemblant à l’école de Fifi Brindacier (ma blonde n°2), grand moment de solitude.
Heureusement, Michel Bourgain maire de L’île-Saint-Denis est venu à ma rescousse interrompre ce calvaire… et pointer gentiment le bon endroit sur la photo : « je crois que c'est plutôt là.»
Ah, si Chouchou debout au fond de la salle, avait eu un pisto-laser des Chevaliers du Zodiaque, il m’aurait tirer de là.
« Mademoiselle, je vous promets que je n’oublierai pas. »
« euh non, c’est Madame » - Rires de la salle.
Patrick Braouzec : « ben oui, Luc elle t’a dit qu’elle a des enfants. » - Rires de la salle.
Et Luc de renchérir, j’en profite, moi aussi j’ai une demande : « un petit train pour relier le métro Pleyel à la Cité du Cinéma. Ben oui, quoi on a calculé, ça fait 800 mètres à pieds et c’est un peu loin. »
Rires de la salle.
Il y a aussi eu des tentatives tombées à l’eau genre « j’ai un scénario, blabla… » Luc reste ferme. Oui, je l’appelle par son prénom, on est intime maintenant qu’il connaît la marque de mon jean et le nombre d’enfants…
« Vous comprenez, maintenant n’importe quelle occasion est bonne, même à la boulangerie, au pressing… on m’apporte des scénarios.
Rires de la salle.
Alors je vous le dis, non ça ne marche pas comme ça. Pas de passe-droit, vous envoyez à Europacorp. On reçoit 900 scénars par an, grand scénariste ou pas, c’est pour tout le monde pareil. »
J’espère que nos Cocos de maires ont entendu le message, parce que ces derniers temps, surtout si on est parachuté d’Epinay à Saint-Ouen pour les municipales, pour le HLM le traitement des dossiers dans le 9cube, c’est pas comme chez Besson ;-)
De l’humour encore, quand un sosie des gars du Jamel Comedy Club prend le micro :
« Luc, j’suis arrivé en retard, ils font quoi Aimé Jacquet et Bernard Laporte à côté de vous ? ».
En parlant de P.Braouzec et D.Paillard qui leur ressemblent pas mal. Rires de la salle.
Luc, sans doute rompu à toutes les tentatives de séduction reste impassible.
Patrick Braouzec répond au jeune homme et marque un but : « Et vous, je vous ai reconnu, vous êtes Basile Boli. ».
Rires de la salle.
Evidemment, c’est du comique visuel, vous n’étiez pas là. Mais, croyez-moi, franchement c’était drôle… à voir et entendre ;-))
Le meilleur, est arrivé vers la fin, après plus d’1h30 de questions-réponses entre la salle bondée et Luc Besson.
Une dame: « j’ai peur que votre projet n’attire encore plus de bobos dans nos quartiers. Ces gens là prendront notre place et nous serons obligés d’aller habiter plus loin. »
La salle grommelle avec hostilité.
Patrick Braouzec répond, et réussi même une envolée quasi Sarkosyste sur la valeur travail « Tout le monde a le droit d’exprimer ses points de vues.
Pour autant, Madame, je ne supporte pas qu’on cherche systématiquement à mettre les gens dans des cases et des catégories et je me battrai toujours contre ça.
Il y a des salariés qui vivent du fruit de leur travail et qui le vivent comme ils l’entendent, peut-être différemment des autres mais c’est leur choix de vie et nous n’avons pas juger cela, ni à y interférer.
En tout cas, personne ne chasse personne, je suis fier que de nouvelles populations arrivent et je tiens à ce que celles qui sont déjà en place restent. Vous m’auriez vu lorsque j’avais 23 ans, j’étais beat-nick, baba cool même je crois et j’avais les cheveux jusqu’aux épaules. Qu’auriez-vous dit de moi à cette époque ? »
Luc Besson : « C’est quoi les bobos ? »
La dame : « Les bourgeois bohème »
Luc Besson: « Ils restent à Saint Germain, ne vous inquiétez pas »
Rires de la salle.
Et voilà, on finit toujours par y revenir : les Bobos seraient-ils les éternels envahisseurs de l’outre-périf, avec leur petit-doigt mal foutu qui énervent tous les autres… surtout les femmes de David Vincent ?
Ou bien, Besson aurait-il raison, les vrais Bobos, selon la définition du sociologue David Brooks, habiteront toujours rive gauche, bien loin du périf’ ?
Seront-ils prêts à devenir un jour des Bôlieusards, à installer leurs boite de prod et à tourner des films à Saint-Denis ? Rendez-vous en 2010 pour le savoir, et sans doute avant sur ce blog, vu que Saint-Luc et son ami Patrick ont promis d’autres réunions à Saint-Denis, et même des visites réservées exclusivement aux riverains.
@suivre donc.
Webographie
France 3.fr : édition IdF-région vendredi 8 février à 12h et à 19h, cherchez bien vous retrouverez quelqu'un...
Web Plaine Commune : le projet Besson
Web ville de Saint-Denis : Pleyel, la Cité du cinéma
Europacorp, la société de Luc Besson
20minutes.fr, 8 février 07 : Luc Besson commence à cadrer sa Cité du cinéma
Challenges.fr, 7 février 07 : Besson dévoile son projet de Cité du cinéma
Metro.fr, 7 février 07 : Luc Besson présente jeudi à Saint-Denis son projet de Cité du cinéma
Le Moniteur.com, 17 nov 06 : Feu vert pour la Cité du cinéma de Luc Besson à Saint-Denis
Boursorama.fr, 27 juin 07 : Luc Besson (EuropaCorp) : « Nous ne voulons pas américaniser le cinéma français mais l’internationaliser »
Biographie Luc Besson
Né le 18 mars 1959 à Paris, Luc Besson passe son enfance auprès de ses parents, instructeurs de plongée au Club Med entre la Grèce et l'ex-Yougoslavie. Un accident l'empêche de poursuivre la plongée à haut niveau.
Skyscpaercity.com : L’État donne son aval à la Cité de Luc Besson
Le projet de Cité du Cinéma de Luc Besson vient de franchir un nouveau cap en obtenant son inscription à la liste des projets d’aménagement prioritaires de l’État.