Gauche2Gauche : Le NPA était présenté en 2009 comme un débouché politique aux luttes sociales. Que reste-t-il de cette ambition ?
Myriam MARTIN : La manière dont le mouvement des indignés s’organise amène à réfléchir sur le rôle d'un parti. Marqué par les révolutions arabes, il est né sur les réseaux sociaux, donc à la marge des organisations politiques. Les politiques menées par la droite ou la «gauche» ont été telles qu’il y a un dégoût total des classes dirigeantes qui conduit à un amalgame entre les classes dirigeantes au pouvoir et les partis politiques, même si ceux ci combattent le système. Il faut surmonter cet obstacle. La volonté de s’organiser reste nécessaire pour porter des propositions. L’outil parti est toujours le plus pertinent pour porter un projet. Un réseau, c’est pratique pour se mobiliser, pour s’informer. Mais un parti politique, c’est une garantie démocratique. Cela dit, un parti peut changer, il peut aussi s’affaiblir comme c’est le cas du NPA. Il y a eu plusieurs séries de départs depuis 2009 et il ne faut pas les nier. La plupart des organisations politiques font face à la difficulté de l’engagement militant. Puis on a sous-estimé le poids de la crise économique et du défaitisme qu’elle pouvait engendrer. Dans une crise économique on ne voit pas d’issue possible si ce n’est la lutte, et à l’automne 2010 la lutte a échoué. Enfin, le NPA doit faire encore beaucoup d’efforts pour savoir intégrer de nouvelles équipes militantes et accepter la diversité. Là dessus on a pêché.
G2G : Vous faites référence à la question du voile ?
MM : Soyons clairs : cette question là n’a pas été une opération de communication contrairement à ce qu’on a pu lire. Ce débat nous a complètement échappé. C’était la décision d’un comité de présenter une candidate voilée. Je n’y suis pas favorable et le congrès du NPA a tranché là dessus : nous ne sommes pas favorable à présenter une candidate voilée ou portant un signe religieux. Le voile rentre en contradiction aux yeux de beaucoup de militantes avec notre féminisme.
G2G : Aujourd’hui tout le monde à gauche prône le rassemblement, et chacun ou presque va présenter son candidat…
MM : C’est un paradoxe. Il y en a peut-être qui sont plus sincères que d’autres. L’unité pour nous ce n’est pas adhérer au Front de gauche. Nous ne leur lançons pas « venez avec nous nous avons un candidat et tout est réglé d’avance ». Ce n’est pas une discussion sur l’unité. Et encore une fois, que ferions-nous face à un gouvernement d’alternance mené par le PS ? Serions-nous dans un pôle commun d’opposition véritablement à gauche ? Là dessus, deux orientations s’opposent en ce moment au NPA et seront soumises au vote des militants en juin. Je soutiens l’idée que nous restions ouverts. Le profil unitaire du NPA ne doit pas être du pipeau. Aujourd’hui tous les signes qu’on nous a envoyés sont négatifs. Mais les lignes peuvent bouger et notre discours entendu, et pour cela il faut le maintenir publiquement. Et il faut y croire, et moi j’y crois.
G2G : Sans M. Besancenot, le NPA ne risque-t-il pas de subir un revers à la présidentielle ?
MM : C’est un risque. La personnalité d’Olivier portait beaucoup de choses. Maintenant, on va tout faire pour qu’une candidature puisse émerger… Un nom sera proposé d’ici quelques semaines. Des AG se tiendront en vue de définir le programme et le candidat lors d’une conférence nationale les 25 et 26 juin. Nous voulons montrer en 2012 que nous ne sommes pas là pour témoigner. Présenter mon parti aux élections ce n’est pas témoigner. C’est vraiment poser la question du pouvoir qu’on veut, pas seulement de celui qu’on nous impose aujourd’hui. Un pouvoir qui soit au contraire une vraie démocratie.