L’Union européenne et le FMI ont décidé le 3 juin de débloquer la deuxième tranche du plan de sauvetage de la Grèce. Soulagement pour les marchés, cette annonce n’est pas une bonne nouvelle pour le peuple grec, car elle est assortie de contreparties très dures : nouvelle hausse de la TVA, nouvelles suppressions d’emplois dans la fonction publique, nouvelles baisses de salaires, privatisations.
Antisociale cette potion est aussi antiéconomique. La première tranche du plan a plongé la Grèce dans la récession, ce qui a réduit les rentrées fiscales et donc ralenti par là-même la réduction du déficit budgétaire. Il est à craindre que les mêmes causes produisent les mêmes effets.
Les plans de sauvetage des pays de la zone euro qui font face à une crise de leur dette publique présentent à mon avis trois défauts majeurs :
-ils font porter les efforts uniquement sur la population. Il n’est rien demandé aux entreprises (ainsi elles ont conservé leur taux d’impôt sur les bénéfices de 12% en Irlande) ni aux banques qui ont prêté à ces Etats. Ces plans de sauvetage sont donc aussi des plans d’aide aux banques allemandes, françaises et britanniques.
-ils ne sont accompagnés d’aucune politique structurelle visant à aider ces pays à faire face à leurs vraies difficultés (le véritable problème de la Grèce est l’insuffisance de ses bases fiscales du fait de l’importance de la fraude fiscale et de la faiblesse de l’administration fiscale) ou à lancer des programmes de développement économique.
-ils témoignent d’une absence de solidarité au sein de la zone euro qui impose la rigueur à ses membres les plus fragilisés par la crise.
Le mouvement des indignés de la Puerta del Sol à Madrid, celui de la génération à bout de souffle de Lisbonne ou les manifestations de la place Syndagma à Athènes témoignent de l’angoisse de la jeunesse européenne face à cette politique qui la prive d’avenir.
Je veux pour l’Europe une autre politique, une politique différente de celle de Merkel, Sarkozy et Barroso.
Je veux une politique qui fasse renouer l’Europe avec la croissance et la solidarité.
Pour cela je fais trois propositions :
-les émissions de dette publique en euros de tous les Etats membres doivent être regroupées au sein d’une Agence européenne, comme l’a proposé Jean-Claude Juncker. Les émissions déjà effectuées par le mécanisme européen de stabilité financière constituent un premier pas, une étape supplémentaire et décisive doit être franchie.
-le budget européen doit être mis au service du développement durable, que ce soit dans l’éducation, la formation, la recherche ou les transports. C’est comme cela que l’Europe se dotera d’une stratégie de croissance de long terme.
-l’Union européenne doit avoir une ressource fiscale propre. Le Parlement européen s’est prononcé le 11 mars dernier pour l’introduction d’une taxe sur les transactions financières au niveau européen, ce qui permettra de financer les investissements dont l’Europe a besoin et fera contribuer au redressement de l’économie européenne les institutions financières, qui sont à l’origine de la crise. Les Etats membres doivent maintenant suivre le Parlement européen. Le SPD et le parti socialiste ont montré la voie en proposant ensemble que les Parlements allemands et français votent l’adoption de cette taxe.
par François Hollande