Le véritable point de fuite dans mes poèmes est là où il doit être : au centre même. Mais je ne sais pas où c'est, et tout à l'heure j'ai parlé d'échelonnement : attention, je me suis bien gardé de parler de perspective. - La perspective est quelque chose qu'on voit bien, et là, il n'y a rien à voir de tel. Le centre de mon poème serait ce point aveugle, pour moi encore irrepérable, où, dans le creux du vers, l'énergie créatrice concentrée "passe de l'autre côté", comme dans un trou noir
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- Il n'y a pas de poème si tous les éléments du poème, ou presque, ne convergent pas vers ce point aveugle que je dis, trou noir, centre présent / absent, ce creux dans le poème cadré, fortement cadré, et très riche de matière, très concret, qui est là.
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Parce que par ce trou, on trouve le réel. Le poème ne vaut que s'il ouvre cet accès. [...] Peut-être que par le poème, le réel est alors approprié à lui-même et à nous.
Ivar Ch'Vavar, Travail du poème, Éditions des Vanneaux, 2011, p. 20