Le monde de la Bande Dessinée est en ébullition. Tous les mois, de nouveaux assauts sont menés pour bouter les albums nauséabonds et les auteurs séditieux hors du royaume de la bonne lecture graphique case à case, propre, soignée, de bon goût et politiquement correcte. Mais dernièrement, on est tombé sur des pépites…
Avant d’entrer dans le vif du sujet, on pourra se souvenir des récentes exactions d’un certain Hergé qui avait eu, tout de même, le culot de faire de la bande dessinée dès les années 30 et qui n’avait rien trouvé de mieux à faire passer comme message qu’un colonialisme lamentable doublé d’un mépris très nauséabond dans son album « Tintin au Congo ».
D’ailleurs, certains ne s’y sont pas laissés prendre et ont décelé, dans les cases mal ajustée du dessinateur politiquement très incorrect, les prémices d’heures les plus sombres et d’une xénophobie dont on sait où elle nous aura mené. Et si vous entendez « shlack, shlack, shlack » dans le fond, c’est le bruit du fouet qui sert à m’auto-flageller car, messieurs dames, nous sommes tous autant que nous sommes, un peu ou beaucoup responsables , nous, Occidentaux.
Partant, il était normal que tout soit tenté pour que cette honteuse publication soit enfin interdite.
Mais plus récemment, l’élite de la pensée, nécessaire armée de l’ordre moral, de la pensée droite et du nettoyage éthique, aura récidivé avec la constatation, après une analyse pointue et toute en finesse, que les Schtroumpfs sont communistes.
Ces personnages, d’un obscur Peyo dont on se demande comment il a pu trouver les moyens de produire ses dangereuses lubies, sont en effet petits, extrêmement repliés sur eux-mêmes, ne font aucun commerce d’aucune sorte, et ont collectivisé le sexe au point de n’avoir qu’une Schtroumpfette pour cent Schtroumpfs (ce qui donne une dimension olympique au terme « tournante »).
Là encore, on sent poindre le nécessaire besoin d’interdire ces illustrés séditieux qui pourrissent la jeunesse en inculquant des valeurs morales douteuses et une vision de la société qu’on ne peut pas partager sans immédiatement sombrer dans la perversité morale.
Mais le pompon aura été atteint, haut la main, par la dernière production estampillée Europe et que Daniel Hannan, dans un récent article du Telegraph, pointait du doigt, à mi-chemin entre la consternation et l’effroi.
Et effectivement, on se demande exactement comment un tel monument graphique a pu rester si longtemps inconnu. Apparemment réalisé par le truchement d’un think-tank particulièrement pro-européen que ça en dégouline un peu partout, Captain Euro est donc une espèce de super-héros dont l’attitude, l’attirail et les acolytes n’ont rien à envier aux créations discutables de Japonais effervescents ou d’Américains sans scrupules.
Et c’est aussi furieusement niais.
Mais ce n’est pas ce qui est gênant. Ce qui pique nettement plus les yeux, ce sont les méchants. Leur chef (les méchants ont toujours un chef – Mr Choc, Olrik, Rastapopoulos, Dark Vador, Ben Laden, Bush, Sarkozy, Mélenchon, etc…) est ici représenté par un être de taille moyenne, le nez crochu, et … et cette description :
Ruthless speculator, curator and collector of ancient curiosities, DAVID VIDERIUS is a former financier. He is a multi-millionaire, used to making money no matter if it might involve the suffering of others. Banned and ostracised from the financial world for unprofessional conduct he managed to escape arrest despite his involvement in financial scandal. Having disappeared for many years, he reappeared as DR D VIDER. He manages a holding company, DIVIDEX, controlling hundreds of different businesses across Europe and beyond…
Spéculateur sans scrupules, conservateur et un collectionneur de curiosités anciennes, DAVID VIDERIUS est un ancien financier. Il est un multi-millionnaire, habitué à faire de l’argent même si cela entraîne la souffrance des autres. Banni du monde financier et frappé d’ostracisme pour conduite non professionnelle, il a réussi à échapper à l’arrestation, malgré son implication dans un scandale financier. Après avoir disparu pendant de nombreuses années, il est réapparu sous le nom de Dr. D. Vider. Il gère une holding, DIVIDEX, contrôlant ainsi des centaines d’entreprises différentes à travers l’Europe et au-delà …
Ça vous fait penser, là encore, à une période noire avec des heures sombres et des trains aux portes plombées qui roulaient dans de sinistres directions ? Meuuuh non. Ce n’est qu’une impression : le patron du think-tank pro-européen qui a pondu ça est Nicolas De Santis, et il aime la gouvernance mondiale. Ce qui est trèèès rassurant.
Pour l’intro complète de Captain Euro, un héros dont le cours s’effondre un peu, c’est sur le site (terriblement Web 0.2, manifestement écrit bien avant l’avènement du JPG) et comme vous le constaterez vous-même en allant fouilloter dans l’introduction, les auteurs ne se sont pas trop creusés la tête pour le scénario.
Etant un inconditionnel de la bande-dessinée, surtout la plus politiquement correcte, je n’ai pas pu résister. Voici donc ma version.