Initialement baptisé Eur-Avia, le salon de l’aviation privée et d’affaires de Cannes, désormais Cannes Air Show, cherche ŕ passer ŕ la vitesse supérieure et il est probable, souhaitable, qu’il y parvienne. L’Europe du Sud mérite, en effet, une telle manifestation et le fait qu’elle se déroule sur la Côte d’Azur constitue certainement un atout supplémentaire. D’autant que la proximité de l’Italie permet aux organisateurs de drainer vers les stands des visiteurs supplémentaires ŕ haut potentiel.
Le secteur est en pleine mutation et les appareils exposés ŕ Cannes vont le confirmer. Dans le domaine des avions de loisirs, il est devenu impossible de distinguer extérieurement les ULM de concepts plus classiques et plus anciens. L’offre s’est diversifiée, la France n’en est pas tout ŕ fait absente (on craignait le pire il y a deux ans), la domination américaine est de plus en plus contestée par d’ambitieux nouveaux venus. L’aviation d’affaires, pour sa part, obéit trčs logiquement ŕ d’autres rčgles et, en ce moment, sort lentement d’une crise conjoncturelle grave qui a durement touché tous les constructeurs, ŕ commencer par les fabricants de biréacteurs.
Ces derniers ne préparent pas moins activement le retour de jours meilleurs comme en témoigne, par exemple, la présence ŕ Cannes de la maquette en vraie grandeur du Phenom 100 d’Embraer, un jet d’entrée ťe de gamme ŕ 8 places capable de franchir une étape de 2.000 km. Dassault a récemment annoncé un Falcon 2000S mais, curieusement, les responsables de ce programme ont choisi de bouder Cannes.
L’édition 2011 n’en réunit pas moins la plupart des grands industriels du secteur. D’oů de bonnes raisons de s’étonner de l’absence de Dassault (qui fut exposant jadis) et de celle d’Eurocopter dont la gamme de voilures tournantes comporte de séduisantes machines VIP. Parmi les ténors, des exposants fidčles de Cannes affirment que des rencontres de bon niveau s’y produisent, constat qui justifie amplement le déplacement. Cette année, on retiendra notamment la participation de Beechcraft, Cirrus, Cessna, Daher Socata, Dyn’Aviation, Diamond, Embraer, Pilatus, Ruag, Piaggio Aero, Mooney, Piper et Tecnam.
Ce dernier figure en bonne place parmi les pôles d’attraction du salon. L’avionneur italien est en effet en train de mettre en place une véritable gamme, trčs moderne, et n’hésite pas ŕ affronter, par exemple, le petit Cessna SkyCatcher qui fait ici sa premičre apparition européenne.
L’aviation Ťgénéraleť française, secteur Ťaffairesť mis ŕ part, se porte moyennant bien avec 40.000 pilotes environ, un peu plus de 2.000 avions, 1.600 planeurs et un nombre imposant d’ULM. Elle connaît néanmoins une érosion sans doute liée ŕ des circonstances économiques adverses, le nombre de pratiquants ayant diminué de 10.000 en 20 ans.
La contestation qui frappe actuellement l’aérodrome de Toussus-le-Noble, en région parisienne, rappelle ces jours-ci que l’aviation privée a beaucoup moins d’amis et de défenseurs que le lobby immobilier. Ce faisant, la France tourne imperceptiblement le dos, regrettablement, ŕ un domaine dans lequel elle a longtemps excellé. L’aviation populaire de 1936 n’est plus qu’un lointain souvenir et, autre point de repčre qui en dit long, le centenaire de Morane-Saulnier est fęté cette année mais son héritier, Daher Socata, produit un gros monoturbopropulseur des voyage, réfléchit ŕ un jet mais a renoncé ŕ donner un successeur aux Rallye et autres Tobago.
Peut-ętre en sera-t-il question entre les alignements de tentes blanches du Cannes Air Show. Aprčs tout, cela ne coűte rien de ręver.
Pierre Sparaco - AeroMorning