Un roman à l'épure bouleversante! La quête de l'ineffable de Sainte Colombe, meurtri par la mort de sa femme, se double d'une transmission de son art particulièrement difficile: Marin Marais n'est pas digne de devenir le dépositaire de sa musique. Trop en cour, trop ambitieux, il n'a pas encore fait l'expérience de la souffrance radicale, absolue, celle qui paralyse à tout jamais ou celle qui sublime.Dans Tous les matins du monde, la perfection artistique ne peut être atteinte qu'au prix d'un renoncement à la voix, au monde et à ses mensonges. Sainte Colombe janséniste défie le roi qui apprécie une telle fermeté, une telle incandescence. Marin Marais, quant à lui, ne voit dans la viole qu'un instrument qui servira sa revanche. C'est un homme complaisant et superficiel. Sainte Colombe, nouvel Alceste, lui refuse son art.
Tous les matins du monde, court et musical, repose tout entier sur sa pudeur exigeante et pathétique. Hommage est rendu à la peinture avec la peinture des vanités, le clair-obscur, la pureté géométrique. Georges de La Tour mais aussi Lubin Baugin et
Philippe de Champaigne ont inspiré Pascal Quignard. En outre, le film superbe d'Alain Corneau incarne à la perfection le roman.