La révolution : un drame pour la télé arabe ! (1/2 : l’Egypte)

Publié le 06 juin 2011 par Gonzo

Adel Imam, pilier de l'ancien régime, sera-t-il de retour pour ramadan ?

Alors que le mois de ramadan approche (il occupera la plus grande partie du mois d’août cette année), il devient de plus en plus manifeste que la révolution du 25 janvier aura de sérieuses conséquences sur la vitalité du feuilleton égyptien. Sachant qu’il faut, au strict minimum, trois mois de production pour réaliser une série, même médiocre, il y a fort à parier que la prochaine saison ne sera pas à la hauteur des précédentes. Un drame, sans aucun doute, pour un public qui peut plus facilement se passer de boire et de manger que d’avaler sa dose annuelle de drama ! Dès la mi-février en effet (articledans Al-Hayat, en arabe comme tous les autres liens), on a pu lire dans la presse les premières interrogations sur le devenir d’une production très perturbée par les événements : comment lancer le tournage, et plus encore le poursuivre, de feuilletons « pensés » pour une époque désormais révolue ? Que faire par exemple des scènes où trônait, pour un peu que l’action se passe dans un bâtiment officiel, la photo de l’ancien président ? Impossible de ne pas tenir compte d’un événement aussi énorme que la chute du régime mais comment coller à une actualité mouvante sans prendre le risque d’être démenti par la suite des événements ?

Fatalement, l’activité des studios s’en est ressentie. Par prudence, Osama El-Sheikh, le président de la Télévision nationale qui ne savait pourtant pas encore que sa gestion ferait l’objet d’une procédure en justice, annonçait alors que les contrats étaient gelés jusqu’à nouvel ordre… Et la situation n’était pas meilleure dans le secteur privé où nombre de producteurs, fort proches de l’ancien régime, n’étaient déjà plus en odeur de sainteté. Pour ne rien dire de nombre d’acteurs mis à l’index sur différentes « listes noires » pour s’être obstinés, jusqu’au dernier moment, à défendre la famille Moubarak et le principe de la transmission dynastique du pouvoir de Hosni père à Gamal fils. (A l’inverse, les acteurs qui, tel Khalil Sawi, se sont fait remarquer pour leur engagement aux côtés des shebabs (article dans Al-Hayat) constituent presque désormais une garantie financière pour ceux qui les ont engagés!) En raison des événements qui ne se sont pas limités à la seule Égypte, loin de là, trouver des lieux de tournage est même devenu un problème ; ainsi, c’est la Turquie, et non la Jordanie et la Syrie comme prévu, qui a accueilli l’équipe de Firqat Nagi Atallah, une vingtaine de personnes dont Adel Imam, le sémillant septuagénaire qui, en dépit de son inébranlable soutien à l’ancien président, tente un retour sur les petits écrans de ramadan (article dans Al-Quds al-’arabi).

Dans ce contexte, le marché a rapidement dicté sa loi et les prix se sont mis à baisser (article sur le site d’Al-Arabiyya). Les producteurs ont accepté de brader ce qu’ils avaient en stock, d’autant plus que les chaînes spécialisées dans la diffusion des feuilletons ont fait savoir qu’elles n’auraient pas les mêmes budgets, faute de rentrées publicitaires suffisantes. Au vu du climat révolutionnaire ambiant, propice à la dénonciation des privilèges de l’ancien régime, nombre de vedettes ont fait savoir haut et fort – article dans Al-Hayat qu’elles avaient renégocié à la baisse leurs contrats mirobolants (parfois plusieurs millions de dollars).

Pour toutes ces raisons, la saison télévisée du prochain ramadan va être l’occasion d’une vraie petite « révolution » : faute d’autre solution, nombre de chaînes vont probablement se résoudre à multiplier les talk-shows politiques en lieu et place des traditionnels feuilletons. Au risque de faire regretter à une partie du public le bon temps de l’ancien régime ! Et pour que le bouleversement soit plus total encore, ramadan pourrait ne plus être le seul moment béni du drama arabe. Faute d’être dans les temps, et peut-être aussi pour optimiser le retour sur investissement d’une très grosse production, le « plus grand feuilleton de toute l’histoire de la télévision égyptienne » vient d’être déprogrammé (article dans Al-Akhbar). Rompant avec la règle sacro-sainte des grilles télévisées, c’est « hors ramadan » que sortira Al-mawled, dans lequel Haïfa Wehbé, pourtant capable de « mettre le feu » à une bonne partie du public (masculin) arabe, incarne le rôle d’une gitane faisant son chemin dans un société égyptienne affreusement corrompue. (C’était avant le 25 janvier!)

Après tant de révolutions, comment survivre à une telle nouvelle ?… Pour tromper l’attente du feuilleton tant espéré, je ne peux que recommander aux fans de regarder la belle Haïfa faire son cirque, au sens littéral du terme, dans l’inoubliable Anta tany (إنت تاني) :

Et pour laisser à ces chroniques toute leur dimension pédagogique, les paroles (si, si, il y en a !) :


انته تاني مش غيري خد مكاني مش بعتني و فسواني طب ليه دلوقت رجعتلي
ده اللي باقي واهو ده كمان اللي ناقص مش كان موضوع و خالص كان حد قاللك حنللي
بقى عندك خليك انا وقلبي حلفنا عليك لايمكن تاني نرجع ليك يعني خلاص ماتلزمناش
كان حلم و ببنيه قضيت لي عليه وجيت توافيه ومستنيني اقوللك ايه يلا ياسيدي ماتدوشناش
لأ عندك خليك انا وقلبي حلفنا عليك لايمكن تاني نرجع ليك يعني خلاص ماتلزمناش
كان حلم و ببنيه قضيت لي عليه وجيت توافيه ومستنيني اقوللك ايه يلا ياسيدي ماتدوشناش
ايه اللي جابك و بتشكي لمين عذابك انا مش فاضية لجنابك ده كتير في هواك عذبتني خذ نصيبك جرحك على ايد حبيبك انا مظطرة اني اسيبك زي زمان ما
سبتني
بقى عندك خليك انا وقلبي حلفنا عليك لايمكن تاني نرجع ليك يعني خلاص ماتلزمناش
كان حلم و ببنيه قضيت لي عليه وجيت توافيه ومستنيني اقوللك ايه يلا