Stop ? Oh, que non, je n’ai pas une minute, la journée commence, et je suis déjà en retard. Stop ! Une petite voix me dit : « C’est le moment justement de faire une pause. » Une pause ! Alors que j’ai : les haricots à planter, la cabane à vernir, la bibliothèque à nettoyer, la remise à bois...
Je me sens en mille morceaux, complètement éparpillée, incapable de rien commencer parce que voulant déjà en avoir fini, la tête se répétant en boucle « Vite, vite, vite... ». Une pause. Prendre le temps de me retrouver, de me recentrer, de regarder calmement la journée à venir, et de goûter le plaisir de faire au lieu de cette inquiétude et de cette agitation.
Que faire ? M’asseoir un moment dans le jardin ? Mais au lieu d’apprécier ce qui est sous mon nez, je ne vois plus que les tâches en retard. Prendre un livre ? Mes mains impatientes s’agitent, et il me semble que chaque page répète : « Tu perds ton temps... » Il me faut occuper à la fois le corps et la tête. Et je sais une activité qui va m’obliger à la fois à être attentive, à me concentrer et à bien respirer, et qui m’emplit de contentement : calligraphier ou, dit plus simplement, écrire, recopier.
Troisième page et bruissement des roseaux au bord de la rivière avec Su Shih : une heure a passé ; les lettres s’enroulent, se glissent, s’amusent dans la page. Le moment s’étire, la journée est infinie devant moi... Je termine par quelques mots notés dans son journal par une nonne japonaise au XVIIe siècle, Chiyo-Ni, qui résument bien cet instant : « Prendre le pinceau pour la pure joie d’écrire ; écrire encore et encore, laissant derrière soi de longues lignes de lettres qui dansent... » Je repose mon stylo, je souris à mes amis poètes, je respire – une belle journée qui commence.
Ce texte m'a fait du bien ! Bon dimanche !