Le Monde, le quotidien français de référence, est à consommer avec modération. Je viens d'en faire une nouvelle fois l'expérience en lisant l'édito paru dans l'édition datée du 4 juin, c'est-à-dire datée d'aujourd'hui. Cet édito ici est intitulé : La politique du pire des républicains américains.
On (parce que l'édito n'est courageusement pas signé) nous dit que le Congrès américain n'arrive pas à se mettre d'accord sur le relèvement du plafond de la dette et sur la réduction du déficit budgétaire. On prétend que c'est ce blocage qui pousse les agences de notation Standard and Poor's le 18 avril 2011 et Moody's le 2 juin 2011 à revoir la note de solvabilité des Etats-Unis.
Traduction de on :
"Cela veut dire que la confiance des marchés dans le dollar commence à être un peu ébranlée."
Apparemment on n'a pas lu le dernier livre de Myret Zaki sur La fin du dollar ici, sinon on saurait que ce n'est pas d'aujourd'hui que la confiance dans le dollar est ébranlée. La courbe du dollar versus franc suisse sur un an, qui illustre cet article et qui provient d'ici, est éloquente à cet égard.
On ajoute aussitôt ce passage invraisemblable :
"Il n'y a pas de risque de défaut de paiement sur la dette souveraine américaine. Mais le Congrès joue avec le feu. Et les républicains, qui ont la majorité à la chambre, excellent dans le rôle des apprentis pyromanes !"
Disons d'emblée à on que la méthode Coué a des vertus limitées en la matière et que le défaut de paiement guette tous les états qui vivent largement au-dessus de leurs moyens.
Pourquoi la confiance dans la monnaie américaine est-elle ébranlée depuis un bon moment ? Parce l'Etat américain est surendetté - les plans de relance inutiles de l'administration Obama ont largement empiré les choses - et parce qu'on ne voit pas comment il sera capable d'enrayer la spirale de cet endettement abyssal s'il ne réduit pas de manière drastique son train de vie.
On ne voit pas d'inconvénient au relèvement de la dette par le Congrès, bien au contraire. Mais on considère comme "pure démagogie" que les républicains mettent comme condition à leur accord à un tel relèvement que soient faites "davantage de coupes dans les dépenses publiques".
Pourquoi ? Parce que nous dit on :
"Aucun économiste sérieux n'imagine une réduction à long terme de l'abyssale impasse budgétaire américaine sans une hausse des impôts d'une manière ou d'une autre."
Il faut donc, selon on, continuer comme par le passé, le contribuable américain paiera, d'une manière ou d'une autre, si ce n'est pas par les impôts, ce sera de manière plus sournoise par l'inflation.
Le plus beau reste à venir. On accuse les républicains de jouer la politique du pire :
"Plus la situation économique sera mauvaise, plus ils ont de chance de gagner la Maison Blanche".
Pour cela les républicains n'ont pas besoin de faire obstruction aux démocrates. Ces derniers savent bien tous seuls rendre la situation économique toujours plus mauvaise.
Certes on a raison de rendre responsables les républicains de la dégradation des finances publiques, mais ils ne sont plus les seuls, ils ne sont pas non plus les principaux, comme il le prétend. Car, au lieu de réduire les dépenses publiques, les démocrates les ont augmentées de manière phénoménale, rendant la situation inextricable.
Francis Richard