Spécificités
La mise en place de ces outils nouveaux de financement du secteur agricole et des petites entreprises tient au fait que jusqu'ici, la mobilisation de ces ressources en faveur de l'agriculture et des entrepreneurs individuels ne tient pas suffisamment compte des spécificités du secteur. Par exemple, non seulement les banques privées accordent très peu de crédits au secteur agricole, mais, au-delà, les rares crédits alloués à ce secteur sont concentrés sur les grandes exploitations agroindustrielles. Selon le gouvernement camerounais, les petites exploitations familiales (95% des exploitations agricoles du pays) sont exclues du marché du crédit des banques classiques, à cause de facteurs tels que le manque de garanties classiques ; la non- acceptation des garanties offertes ; le grand risque que constitue le secteur. Pourtant, le besoin de financement à court terme de l'ambitieux programme agricole est grand et se chiffre à environ 300 milliards Fcfa, au regard des objectifs de production de 2009 et 2010 arrêtés par le gouvernement.
Le boom du secteur de la microfinance au cours de cette dernière décennie, a néanmoins permis aux paysans de disposer des services financiers de base, mais dont l'efficacité dans le soutien à leurs activités reste limitée. Car, selon les spécialistes de la problématique du microcrédit agricole en zone rurale, il est difficile d'avoir des formes de garanties appropriées pour sécuriser les financements qui seront accordés et il n'existe pas de forme d'assurance spécifiques pour couvrir les risques du secteur. Dr Justin Bomda, qui œuvre depuis plus d'une dizaine d'années dans l'encadrement des réseaux de microfinance dédiés aux ruraux, explique dans la revue « Défi des pauvres » que « Face à cette situation, les Emf (établissements de microfinance, Ndlr) présentent aussi des contraintes qui ne leur permettent pas de répondre efficacement aux besoins de financement du secteur agricole. Il s'agit entre autres de la nature très court terme et des volumes faibles de leurs ressources, qui ne leur permettent pas de satisfaire les besoins en financements moyen et long terme du secteur ; du coût des ressources et la faiblesse du volume de leurs opérations, d'où la difficulté de réaliser des économies d'échelle nécessaires pour pratiquer des taux d'intérêt compatibles avec le niveau de rentabilité du secteur agricole ».
Patience
Quelques grandes banques, ont souvent transité par des réseaux de microfinance et de caisses villageoises bien implantées (Caisses villageoises d'épargne et de crédit autogérées, Mutuelles communautaires de croissance, etc.) pour appuyer le secteur agricole. Mais le type de ressources à la disposition de ces firmes financières ne leur donne pas une grande marge de déploiement dans ce secteur qui demande des moyens colossaux et de la patience dans les délais de remboursement.
Après la fermeture des établissements publics tels que le Fonds national de développement rural (Fonader) et le de Fonds de garantie des petites entreprises (Fogape) les opérateurs économiques camerounais, notamment les jeunes entrepreneurs individuels ou ruraux, n'avaient plus aucun recours pour obtenir des financements adaptés à leurs activités.
Pour assurer l'efficacité des programmes agricoles mis en place ces dernières années, la problématique du financement a été traitée à travers des outils tels que le Projet d'appui au développement de la microfinance (Padmir), mais cela restait insuffisant. Labanque Agricole et la banque de Pme, sous réserve d'être viable et orientée vers les bons résultats, pourraient être d'un précieux appoint à la réussite des objectifs de développement contenus dans le document de stratégie pour la croissance et l'emploi.