Par cet arrêt :
"Attendu, selon les arrêts attaqués (Aix-en-Provence, 15 novembre 2001 et 2 mai 2002) que la société le Val d'Escure II, maître de l'ouvrage, a fait édifier deux immeubles, une assurance dommages-ouvrage étant souscrite auprès de la compagnie UAP, aux droits de laquelle vient la société AXA France IARD pour l'immeuble dénommé "L'Albizzia" et auprès de la SMABTP pour l'immeuble appelé "Les Oliviers" ; que le Centre expérimental de recherches et d'études du bâtiment et des travaux publics (CEBTP), représenté par le Centre méditerranéen de recherches et d'études expérimentales pour l'industrie et la construction (CEMEREX), a réalisé une étude des sols ; que la maîtrise d'oeuvre a été confiée à Mme X... et à M. Y..., architectes tous deux assurés par la MAF, et la réalisation effectuée par la société OCE, assurée par la compagnie La Zurich, devenue Generali Dommages ; qu'ayant constaté des désordres, le syndicat des copropriétaires des immeubles, auquel se sont joints des copropriétaires agissant à titre individuel, a sollicité la réparation de son préjudice ;
Sur le premier moyen du pourvoi n° Q 02-16.581, ci-après annexé :
Attendu que la société AXA n'ayant pas, dans ses conclusions d'appel, soutenu que l'entrepreneur concerné n'avait pas été destinataire de la mise en demeure prévue par l'article L. 242-1 du Code des assurances, le moyen est nouveau, mélangé de fait et de droit, et, partant irrecevable ;
Sur les deuxième et troisième moyens du pourvoi n° Q 02-16.581, réunis :
Attendu que la société AXA fait grief à l'arrêt de la condamner à payer des sommes relatives aux désordres d'infiltration et affectant le joint de dilatation alors, selon le moyen :
1 / que si l'assurance dommages-ouvrage est une assurance de choses qui bénéficie au maître de l'ouvrage et aux propriétaires successifs, la vente de l'immeuble n'a pas pour effet d'ouvrir à l'acquéreur, qui tient ses droits du maître de l'ouvrage, un nouveau délai de deux ans pour demander l'application de la garantie ; qu'en retenant en l'espèce que ce délai ne pouvait courir contre le syndicat des copropriétaires, venant aux droits du maître de l'ouvrage à la suite de la vente de l'immeuble, avant qu'il ait été constitué et qu'il ait eu lui-même connaissance des désordres, la cour d'appel a violé les articles L. 114-1 et L. 242-1 du Code des assurances ;
2 / que, selon les propres conclusions d'appel du Syndicat des copropriétaires, le procès-verbal de réception du 21 octobre 1991, signé par le maître de l'ouvrage la SARL Val d'Escure II et mentionnant des réserves concernant les infiltrations d'eau, indiquait qu'il prenait effet le 29 mai 1990 ; qu'une ordonnance de référé du 23 mars 1990 avait ordonné une expertise sur ces désordres ; qu'il en résulte que la SARL Val d'Escure II avait eu connaissance de ces désordres au plus tard le 29 mai 1990, de sorte que l'assignation délivrée à la compagnie AXA par le Syndicat des copropriétaires, venant aux droits du maître de l'ouvrage, le 15 février 1993, soit plus de deux ans après cette date, était tardive ;
qu'en déclarant cette action non prescrite, la cour d'appel a violé les articles L. 114-1 et L. 242-1 du Code des assurances ;
3 / qu'aux termes de l'article L. 114-1 du Code des assurances, le délai de prescription de deux ans ne court, "en cas de sinistre, que du jour où les intéressés en ont eu connaissance, s'ils prouvent qu'ils l'ont ignoré jusque là" ; qu'en retenant que la compagnie AXA ne rapportait pas la preuve de ce que le Syndicat des copropriétaires avait eu connaissance des désordres plus de deux ans avant l'assignation, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé le texte susvisé, ensemble l'article 1315 du Code civil ;
4 / que selon les propres constatations de la cour d'appel, le procès-verbal de réception signé par le maître de l'ouvrage le 21 octobre 1991, postérieurement à la constitution du Syndicat des copropriétaires le 30 août 1991, faisait état de réserves concernant l'écartement du joint de dilatation ; que, dès lors, l'assignation délivrée à la compagnie AXA par le Syndicat des copropriétaires, venant aux droits du maître de l'ouvrage, le 14 janvier 1994, soit plus de deux ans après cette date, était tardive ;
qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 114-1 et L. 242-1 du Code des assurances ;
Mais attendu que la cour d'appel a retenu à bon droit, abstraction faite de motifs surabondants relatifs à la charge de la preuve de la connaissance antérieure des désordres par le Syndicat des copropriétaires, que ce syndicat, bénéficiaire de la garantie transmise par le maître de l'ouvrage, ne pouvait agir avant d'avoir été constitué et d'avoir eu connaissance des désordres et a souverainement relevé que ses interventions à la procédure, réalisées les 15 février 1993 et 14 janvier 1994, avaient eu lieu dans le délai de deux ans de la connaissance des désordres, manifestée par les autorisations d'agir données au syndic lors des assemblées générales des 21 août 1992 et 18 août 1993 ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen du pourvoi n° Q 02-16.581, ci-après annexé :
Attendu que la société AXA n'ayant pas, dans ses conclusions d'appel, soutenu que les assignations délivrées par le Syndicat des copropriétaires n'avaient pas interrompu les délais de prescription afférents à l'action des copropriétaires agissant à titre individuel, le moyen est nouveau, mélangé de fait et de droit, et, partant, irrecevable ;
Sur le premier moyen du pourvoi n° R 02-17.893, ci-après annexé :
Attendu, d'une part, que la cour d'appel ayant relevé que la société Val d'Escure II engageait sa responsabilité en qualité de constructeur-vendeur pour les désordres qui, compromettant la solidité de l'ouvrage, avaient une nature décennale, le moyen manque en fait ;
Attendu, d'autre part, que le CEMEREX n'ayant pas soutenu, dans ses conclusions d'appel, le moyen tiré de ce que la mise en demeure portant sur la reprise des désordres n'aurait pas été adressée à l'entrepreneur tenu à la garantie de parfait achèvement et que le contrat de louage d'ouvrage conclu avec celui-ci aurait été résilié, le moyen est nouveau, mélangé de fait et de droit ;
D'où il suit que, pour partie irrecevable, le moyen n'est pas fondé pour le surplus ;
Sur le second moyen du pourvoi n° R 02-17.893, ci-après annexé :
Attendu, d'une part, que le rapport d'expertise du 17 juillet 1995, produit aux pièces, faisant mention de la présence aux opérations de l'expert de "CEMEREX, demandeur selon l'ordonnance de référé du 28 octobre 1994", assisté de deux avocats ayant déposé plusieurs dires et d'un conseil technique, la cour d'appel a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Attendu, d'autre part, qu'en retenant que CEMEREX était seul responsable des désordres en raison de l'insuffisance de son étude des sols, la cour d'appel s'est librement appropriée le sens, la valeur et la portée des conclusions de l'expert ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le premier moyen du pourvoi n° X 02-16.910 :
Attendu que la société Val d'Escure II fait grief à l'arrêt de la déclarer responsable des désordres d'inondation affectant l'immeuble "L'Albizzia" sans retenir la garantie de l'architecte et de l'entrepreneur à son profit, alors, selon le moyen :
1 / que l'immixtion du maître de l'ouvrage suppose la réalisation d'actes positifs ; qu'en l'espèce, la SARL Val d'Escure II contestait formellement l'affirmation de l'expert judiciaire selon laquelle elle aurait décidé seule, contre l'avis de l'architecte et de la société Socotec, de la suppression du cuvelage et autres éléments de protection, faisant valoir à cet égard dans ses écritures récapitulatives d'appel qu'elle n'avait accepté cette suppression, dans son courrier du 9 avril 1986, que "si ces changements sont compatibles avec la bonne qualité de l'immeuble sur un plan technique" et qu'elle n'avait rencontré aucune opposition formelle de la Socotec ni de l'architecte, Mme Z..., laquelle avait signé la réception sans réserve de l'immeuble ; qu'en retenant comme elle l'a fait "que la décision de procéder à ces suppressions a été prise par le maître de l'ouvrage, malgré l'avis contraire de l'architecte et de la société Socotec dans le seul but de réaliser une économie", sans analyser ces divers éléments ni caractériser un quelconque acte positif de la SARL Val d'Escure II matérialisant son immixtion fautive, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du Code civil ;
2 / que l'architecte est tenu envers le maître de l'ouvrage d'une obligation d'information et d'assistance ; qu'en l'espèce, la société Val d'Escure soulignait encore dans ses écritures d'appel "que Mme Z..., architecte de l'immeuble, a accepté la situation en cours de travaux, a réceptionné ceux-ci sans réserve à ce sujet, ni sur l'état des fondations de l'immeuble, ni sur son état d'étanchéité et qu'elle est donc bien responsable de tous les dommages résultant aujourd'hui de l'absence d'étanchéité du sous-sol de cet immeuble" ; qu'en ne recherchant pas si Mme Z... n'avait pas manqué ce faisant à son devoir d'information et de conseil envers le maître de l'ouvrage, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du Code civil ;
3 / que l'expert judiciaire a retenu comme cause des désordres non seulement le défaut de cuvelage mais encore la mauvaise exécution des murs, affectés d'un défaut d'étanchéité ; qu'en ne s'expliquant sur la responsabilité de cette cause de désordres, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que la décision de procéder à la suppression des gouttières, des cuvelages, et de l'étanchéité des murs drainés avait été prise, malgré l'avis contraire de l'architecte Mme Z... expressément formulé par lettre du 16 avril 1986, par le maître de l'ouvrage de manière persistante et délibérée, avec réitération de sa volonté en cours de chantier lors de la nouvelle présentation d'un devis intégrant ces travaux, la cour d'appel, qui n'a pas retenu l'immixtion de la société Val d'Escure II mais son acceptation délibérée des risques, qui a analysé les éléments de preuve qui lui étaient soumis, qui a retenu parmi les causes des désordres la mauvaise étanchéité des murs drainés, et qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Sur le deuxième moyen du pourvoi n° X 02-16.910 :
Attendu que la société Val d'Escure II fait grief à l'arrêt de la déclarer responsable des désordres d'inondation affectant l'immeuble "Les Oliviers", sans retenir la garantie de l'architecte, alors, selon le moyen, qu'en des termes clairs et précis, l'expert judiciaire avait relevé en page 24 de son rapport en date du 14 février 1995 que l'architecte de l'immeuble Les Oliviers, M. Y..., avait précisé dans un "compte rendu de chantier n° 16 du 13 décembre 1988.. que le niveau de la nappe phréatique est inférieur au niveau du terrassement en masse et que de ce fait, il n'y a pas lieu de prévoir de cuvelage sur la partie enterrée du sous-sol" et encore, page 163 de son rapport en date du 8 février 1996, que "le cuvelage pourtant préconisé par le Cemerex et Socotex n'a pas été réalisé notamment suite au compter rendu de chantier n° 16 rédigé par l'architecte" ; qu'en affirmant néanmoins que les causes des désordres affectant l'immeuble Les Oliviers "procèdent de la même volonté du maître de l'ouvrage de réaliser une économie substantielle", la cour d'appel a dénaturé les énonciations claires et précises des termes de ces rapports d'expertise, ensemble le compte rendu de chantier n° 16 cité par ces rapports, violant ainsi les dispositions de l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que les désordres provenaient de l'absence de cuvelage, par suite d'une décision prise par le maître de l'ouvrage en vue de la réalisation d'une économie substantielle, et que les infiltrations constatées dans l'immeuble "Les Oliviers" avaient la même cause que celles relevées dans l'immeuble "L'Albizzia", la cour d'appel a pu retenir, sans dénaturation du rapport d'expertise, que la société Val d'Escure II, qui avait été avertie par l'architecte de l'immeuble voisin de la nécessité de prévoir une protection renforcée des sous-sols, avait délibérément accepté les risques de survenance des désordres et engagé sa responsabilité, l'information émanant d'un professionnel de la construction ayant eu connaissance du problème technique et compétence pour le résoudre ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen du pourvoi n° X 02-16.910, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé que l'écartement anormal du joint de dilatation affectait l'immeuble dans sa solidité et entrait donc dans le champ d'application de la garantie décennale des constructeurs, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, en a exactement déduit que la société Val d'Escure II engageait sa responsabilité en qualité de constructeur-vendeur de l'ouvrage, qui découle de plein droit de l'article 1792 du Code civil ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen du pourvoi n° X 02-16.910, ci-après annexé :
Attendu, d'une part, que la cour d'appel a retenu à bon droit que l'inobservation volontaire des règles de l'art, consécutive à la prise de risques par le maître de l'ouvrage, entraînait la déchéance de son droit à garantie, par application de l'article 14 des conditions générales de la police souscrite auprès de la SMABTP ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Attendu, d'autre part, que par suite du rejet du premier moyen du pourvoi X 02-16.910, le moyen est devenu sans portée ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Laisse à chaque demandeur la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société AXA France IARD à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence Le Val d'Escure la somme de 1 900 euros et à la Mutuelle des assurances de France, M. Y... et Mme A... B..., ensemble, la somme de 500 euros ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne le Centre expérimental de recherches et d'études du bâtiment et des travaux publics à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence Le Val d'Escure la somme de 1 900 euros, à la compagnie Zurich France, aux droits de laquelle se trouve la société Generali dommages, la somme de 500 euros et à la SMABTP la somme de 500 euros ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Val d'Escure II à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence Le Val d'Escure la somme de 1 900 euros, à la Mutuelle des assurances de France, M. Y... et Mme A... B..., ensemble, la somme de 1 900 euros, à la SMABTP la somme de 1 900 euros et à la compagnie Zurich France, aux droits de laquelle se trouve la société Generali dommages, la somme de 1 900 euros ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette toute autre demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze décembre deux mille quatre. »