Pink Floyd. The Wall. 1979. J'ai 15 ans. Je suis fan. Et je suis juste au point de basculement, car Pink Floyd, ce n'est pas la musique de l'époque. L'époque se partage entre le disco mainstream pour les gens, et la new wave pour les gens de goût. Et moi, si je vomis le disco, je suis partagé entre ma passion adolescente pour les morceaux cosmiques de Pink Floyd, et les climats sombres des Stranglers... L'alpha et l'oméga.
The Wall, je l'ai écouté en boucle. A fond. Toujours à fond. Grandiose, grandiloquent. Mon anglais était en devenir. J'ai fini par connaître les lyrics quasimment par coeur.
Pink Floyd a plus ou moins splitté. J'ai moins suivi. The Final Cut aura été la dernière limite. Puis l'oubli. de quelques années. Une résurgence avec LE concert devant le Château de Versailles, en 89 ou 90, je ne sais plus bien. Des effets, de la quadriphonie, mais un Pink Floyd amputé de Roger Waters. Trou noir pendant quelques années. je passe au CD. Mes vinyles du Floyd prennent doucement la poussière. En 2001, j'achète la compilation. Echoes. Je n'adhère pas à la période Division Bells. Mon Pink Floyd c'est celui de 70 à 79.
Etudiant en classe prépa, je me rappelle de soirées passées à écouter The Wall en éclusant quelque alcool, entre deux colles de math.Les années passent.
Je récupère l'intégrale du groupe. Réécoute Echoes, pas la compil, la face 2 de Meddle. Mon tout premier album du Floyd. Echoes, 20 minutes planantes à souhait. Kif absolu. Réécoute Us and Them The Great Gig In The Sky, Dark Side of the Moon. Toujours à fond. Entre deux morceaux de Metallica, d'Arcade Fire, de Fleet Foxes, de Neil Young, des Queens Of The Stone Age, de Johnny Cash, de Bruce Springsteen, ad lib...
Mais venons en à Roger Waters à Bercy. Enfin.
Un monde fou, des jeunes, des vieux, des vieux jeunes, des jeunes vieux. Des babas, des bobos, des chauves et des chevelus. Portant t-shirt Pink Floyd, comme il se doit. Sur scène, un mur ébauché. gigantesque. Un écran rond, typique de la scénographie floydienne.
20h30. Début du show. Gros son quadriphonique, d'une grande clarté. In The Flesh. Les paroles reviennent en mémoire, spontanément. C'est l'album, note pour note. Malgré l'absence de Wright, Mason et Gilmour. Morceau de bravoure sur morceau de bravoure. Another Brick In The Wall (Part 2)... "We don't need no education! Teacher, leave the kids alone!" Cri du coeur repris par 15 000 personnes. Le mur s'anime, se couvre de projections d'images de guerre, de slogans, de graffitis. Le mur est l'élément principal du show, on assiste à sa construction progressive. Brique par brique, jusqu'à ce qu'il occulte complètement la scène, qu'il efface le groupe. Fin du premier acte. Intermède.
Hey You marque la reprise du show. 15 000 spectateurs devant un mur. Comfortably Numb. Avec une guitare gilmourienne. Perchée au sommet.
Dérive fascisante de Pink, le décor évolue vers une architecture façon Albert Speer. Les marteaux défilent sur le Mur. Les images-choc. Run Like Hell! Les vers qui s'infiltrent partout. Le juge obscène imaginé par Gerald Scarfe. The Trial. Le verdict: "Tear down the wall!". Et le Mur s'écroule. Fin. Retour acoustique. Ovation, salut.
The Wall ou le spectacle total. Ce qui fascine aujourd'hui est cette nouvelle tendance des groupes et artistes à venir interpréter une oeuvre complète. Comme un musicien classique décide d'interpréter tel concerto ou symphonie. Les Queens Of The Stone Age jouant intégralement leur premier album. Echo and the Bunnyman rejouant sur scène Ocean Rain. Les Who, il y a quelques années interprétant l'intégralité de Tommy. Et Pink Floyd familier du fait, rejouant Dark Side Of The Moon.
On se prend à rêver des Beatles jouant intégralement Sergeant Pepper en live... Un peu difficile hélas, pour cause de défection de 50% du line-up original.
Restent alors les tribute bands... Mais sauront-ils apporter une touche personnelle? Le public sera-t-il prêt à accepter une interprétation sortant de ce qu'il a entendu sur l'album et ne souhaitant pas en sortir?
On a entendu des covers de morceaux devenus des standards. L'heure n'est-elle pas à la cover intégrale d'albums mythiques au risque du sacrilège? Les Flaming Lips ont tenté le coup avec bonheur avec Dark Side Of The Moon. Luther Wright and the Wrongs ont réalisé une version country-bluegrass de The Wall, plutôt réussie ("Rebuild the Wall") et assez 2nd degré...
Des suggestions? Bat out of Hell de Meat Loaf interprété par Mike Patton et Faith No More, ou The Kills... Rumours de Fleetwood Mac par Band Of Horses... Qui dit mieux?
Enjoy!