Il fut une époque où les "voyages d'affaires" étaient, de loin, l'affaire des femmes. Elles prenaient alors leur destin en main. Prenez les chimpanzés ou la femelle australopithèque. Elle n'hésitait pas à quitter sa famille de naissance pour se fondre un autre groupe alors que le mâle, casanier, bougeait peu.
Au-delà de cette intrioduction souriante, une étude (sérieuse) montre, à partir de fossiles et rares outils rudimentaires, quelques traces des australopithèques. Ces lointains cousins des humains modernes vivaient il y a entre 2,4 à 1,7 millions d'années d'où la difficulté à théoriser leur mode de vie. Néanmoins, une équipe internationale (dir. Sandi Copeland, Institut Max Planck, Allemagne), propose des hypothèses audacieuses publiée dans la revue britannique Natur.
Entre autres vestiges, les 2 espèces d'hominidés bipèdes (Australopithecus africanus et Paranthropus robustus) des cavernes de l'actuel Transvaal, en Afrique du Sud, ont laissé derrière eux des dents. Avec le laser et la spectrométrie de masse, ces dents de mammifère permettent l'analyse (l'individu a-t-il grandi à cet endroit où il a vécu et où il est mort ?). Avec le strontium (strontium 87 et strontium 86), qui se reflète dans la nourriture absorbée par les mammifères, on le mesure dans l'émail des dents, avant l'âge adulte, sans être ensuite modifié par des processus biologiques. Il constitue donc un indicateur précieux pour suivre la piste des australopithèques sud-africains.
Sur les dents de ces hominidés, Sandi Copeland en conclut que les individus les plus grands et donc probablement les mâles, s'étaient nourris essentiellement près des cavernes où ils vivaient. A l'inverse, ceux des femelles s'étaient nourris hors de cette zone géologique avant l'âge de huit ans ! Les mâles australopithèques auraient donc un comportement sédentaire, au groupe natal dans une zone géologique couvrant à peine 30 km2 quand les femmes, voyageuses, venaiant de zones plus éloignées, d'autres groupes familiaux, venues à l'âge de se reproduire. Cette différence de comportements se retrouve chez les chimpanzés, les bonobos et dans de nombreuses sociétés humaines.
De plus, le mâle australopithèque ne possédait pas des canines beaucoup plus développées que les femelles, signe que la compétition entre les mâles du groupe était sans doute bien moins forte (et pour cause, les femelles étaient parties tandis que d'autres arrivaient) que chez les chimpanzés ou les gorilles.