Septembre s’annonce comme un mois plein de dangers au Moyen-Orient, où la réalité va reprendre ses droits. Le rêve du « printemps arabe », qui s’effrite déjà, va se briser, et le réveil risque d’être brutal.
Les deux grandes problématiques de cette région la plus tumultueuse du monde, vont se reposer de façon sévère: la question palestinienne, et la répartition dangereusement injuste des richesses pétrolières.
Deux facteurs transforment le contexte dans lequel ces deux questions seront traitées : Oussama ben Laden est mort et des foules arabes sont descendues dans la rue pour libérer leur rage. Autrement dit, le prétexte du terrorisme va se montrer inopérant, et le désespoir des foules va être incontrôlable.
L’étincelle palestinienne
L’étincelle qui risque de déclencher une nouvelle onde de violences sera l’introduction à l’Onu d’une résolution demandant à l’Assemblée Générale de reconnaître un état palestinien dans les lignes du cessez-le-feu de 1967.
Cela veut dire de façon plus prosaïque que l’occupation par Israël de la Cisjordanie et de Jerusalem-est et son siège de Gaza vont être dénoncés de façon encore plus déterminée par la communauté internationale.
Ce vote sera critiqué par les Etats-Unis et n’aura pas d’effet sur la politique de l’état hébreu, engagé dans une colonisation qu’elle assure légitime, mais il va donner un nouveau souffle aux revendications des Palestiniens de voir naître rapidement leur état, indépendant et viable.
Et il sera difficile de leur assurer que le meilleur moyen de satisfaire leurs aspiration est la voie pacifique de la négociation, qui s’est révélée pour eux une impasse.
Des voisins moins conciliants
Dans une nouvelle confrontation avec l’état hébreu, ils vont pouvoir compter sur le soutien de Palestiniens et d’Arabes vivant dans les pays voisins, comme l’ont montré les manifestations sur les frontières avec la Syrie et le Liban à l’occasion à la mi-mai de l’anniversaire de la naissance d’Israël.
Un nouveau soulèvement –une nouvelle Intifada–, à Gaza, contrôlée par le Hamas, et en Cisjordanie, gérée par l’Autorité palestinienne, est d’autant plus envisageable que l’Egypte a levé son propre blocus de Gaza. Fin mai, les nouvelles autorités égyptiennes ont décidé la réouverture permanente du point de passage de Rafah, qui avait été fermé sous le régime d’Hosni Moubarak.
Des élections favorables aux islamistes
Cette tension prévisible sur le dossier palestinien va servir de toile de fond à des élections législatives très attendues en Egypte au mois de septembre. Ce scrutin sera le premier de l’après-Moubarak et les Frères Musulmans, la formation islamique militante, est la mieux placée pour se tailler un rôle pivot dans le paysage politique égyptien.
En Tunisie, où des élections prévues en juillet devraient être repoussées à septembre, les Islamistes sont aussi bien placés pour être les plus puissants sur une scène politique tunisienne, atomisée en plus de soixante partis.
Des milliards insuffisants
Les largesses financières arabes déjà consenties à l’Egypte et à la Tunisie, et les promesses d’aide internationale, ne seront pas suffisantes pour prévenir une explosion sociale et politique dans ces deux pays, si la crise palestinienne s’envenime et joue un rôle de détonateur.
Rien n’indique que les mesures envisagées pour ces deux pays n’apportent les réponses attendues par les foules qui se sont soulevées au début de l’année. Celles-ci ont besoin de voir rapidement les dividendes concrets de leurs révoltes, notamment des emplois et des services publics efficaces.
Pour le moment, aucun des protagonistes du « printemps arabe » n’a proposé un programme clair permettant de traces les lignes d’une changement radical. Des régimes autoritaires et inefficaces ont bien été évincés mais aucun plan n’a été présenté pour les remplacer par des systèmes qui satisfassent les exigences des peuples
Un nouveau socialisme arabe
Personne n’ose encore parler d’une économie dirigée et du socialisme arabe, que Nasser avait proposé comme formule de substitution au capitalisme occidental. Au contraire, les entités qui sont disposées à donner ou prêter de l’argent à l’Egypte et à la Tunisie le font dans le cadre de l’économie libérale prônée par le FMI et les banques internationales de développement.
Pourtant la clef réside ailleurs: dans un flux structuré d’une partie des richesses pétrolières vers les économies arabes qui n’ont pas de ressources naturelles. Et le développement dans ces pays d’une économie capable de produire de la valeurs ajoutée et pas seulement de fournir un réservoir de main d’oeuvre bon marché.
Thomas Friedman, sur Ben Laden et Israël
Roula Khalaf, sur l’Egypte et les Frères Musulmans