L'arnaque est flairée à des kilomètres par
les gens qui s'intéressent un peu à l'éducation nationale.
Pour les autres, ça paraît un peu bizarre, sans doute, mais ça donne quand même l'impression qu'on embauche pour l'école et
que les profs qui râlent tout le temps sont juste des chieurs.
Rappelons un peu de quoi il s'agit : en fait, les 16 000 postes de profs supprimés, ce sont les 1/2 fonctionnaires qui ne
sont pas remplacés. L'année prochaine, pour faire vite, il y aura donc 32 000 départs en retraite et seulement 16 000 remplacements.
Dans le même temps, le ministère va donc poser 17 000 petites annonces à Pôle Emploi pour trouver des profs.
Le premier constat qu'on peut faire, c'est que le ministère démontre par A+B que jusqu'à l'année dernière, il manquait (au
moins) 1000 profs pour tourner correctement.
Le deuxième constat, c'est que les profs ont raison : on n'est pas assez nombreux sur le terrain pour faire le
boulot.
Le troisième constat, c'est que malgré ce recrutement, la qualité de l'enseignement ne va pas s'améliorer. Car on va perdre
32 000 profs expérimentés et qu'on va les remplacer par 16 000 profs jeunes et non formés (ceux qui auront obtenu le concours) et 17 000 profs amateurs recrutés à Pôle Emploi.
Profs amateurs sur les deux tableaux, donc. Amateurs ou pas, d'ailleurs, parce qu'il y a de grandes chances que ces
enseignants, très vite, se mettent à détester le métier.
En fait, les profs recrutés par Pôle Emploi (et l'ANPE, avant) c'est loin d'être nouveau. C'est même monnaie courant : la
pénurie de profs est tel qu'il arrive bien souvent que l'on n'ait pas assez de remplaçants, pour les congés maternités (ou les congés longues maladies : les dépressions sont nombreuses dans le
métier).
Dans mon collège, cette année, c'est ce qui s'est passé. Une prof de français est tombée subitement enceinte de 9 mois. Non,
je plaisante pas : le rectorat a découvert la chose comme ça, subitement. Il a donc mis du temps à réagir. Ce qui est normal : 9 mois, c'est un délai très court. Donc, il a fallu trouver
d'urgence une remplaçante. L'urgence, au rectorat, ça se calcule en semaines...3 ou 4. Il a bien fallu 2 ou 3 semaines, sans doute pour se rendre compte qu'il n'y avait plus de TZR disponible,
alors on s'est tourné vers Pôle Emploi.
On nous a trouvé quelqu'un. Quelqu'un qui possède un master de langue. Elle avait fait un remplacement de deux semaines il y
a 5 ou 6 ans. Elle n'avait plus vu d'élèves depuis. Et puis elle ne connaissait pas le programme, elle n'avait aucune notion de progression pédagogique. Elle n'avait aucune expérience en matière
d'autorité. Avec la classe de 6ème, ça passe encore. Avec les deux classes de 4èmes, c'est l'enfer. Elle sort de sa classe, le soir, en pleurant.
Les parents des 4èmes commencent à râler sévère sur le programme qui n'est pas fait et les élèves qui sont en
danger...
Et puis quoi ?
On a essayé d'aider la collègue en perdition. On a tenté de lui donner quelques conseils, on lui a donné des cours...Mais
c'est trop dur. Et dans sa classe, on se retrouve toujours tout seul.
C'est à cela que nous expose le Luc Chatel et ses recrutements pourris à Pôle Emploi, alors que chaque année, il y a des gens
qui tentent les concours et qui échouent faute de places.
On marche sur la tête.
Mais l'opération de
com' n'est pas là pour être logique...Sans compter que ces 17 000 futurs vacataires, menacés d'être virés tous les ans en juillet, repris, peut-être chaque année en septembre, on les
paiera éternellement au SMIC, 10 mois par an. Ce qui fait de belles économies...Et beaucoup de précarité...
CC
http://www.bahbycc.com/