(texte revu et corrigé)
L'a-t-on assez pointé ? Dans les premières pages de "VIVRE SANS TETE" se trouve un "Avant Propos"contemporain du Livre lui-même dans sa Première Édition qui rapporte le sentiment de deux philosophes devant se rencontrer autour d'un ouvrage écrit par l'un et traduit pas l'autre sur l'Enseignement de deux Maitres du Bouddhisme Zen, HUANG PO et HUI HAI , quand l'un des deux Amis s'empare du Livre de Douglas, propos rapporté dans cette Première Édition, pour dire à l'autre : "Je n'ai pas la moindre idée de Qui peut être ce Harding, je ne sais rien de lui et il peut être aussi bien un chauffeur de taxi londonien, mais CE QUE JE PEUX AFFIRMER C'EST QU'IL A TOUT COMPRIS." On est en 1961. Et c'est cela que je souhaite approfondir; car il ne saurait mieux dire. Je me propose de le faire autour de DEUX IDEES :
- Le ZEN comme TRAVAIL DE MEDITATION,
- Le ZEN comme inducteur d'un SATORI, Résultat chez Douglas du DOIGT POINTE SUR LA VACUITE.
Que l'ILLUMINATION exige un long Travail sur SOI avant de survenir, et un aussi long travail une fois survenu, j'y ai déjà insisté dans un précédent article ("DOUGLAS HARDING ENTRE EVEIL ET ILLUSION"). Douglas en est tellement conscient qu'il a tracé un VOYAGE EN HUIT ETAPES, l'ILLUMINATION surgissant à la QUATRIEME, mais n'y demeurant stable qu'une fois franchies les HUIT. On peut donc simplement dire que c'est à la Quatrième qu'enfin tout peut commencer. C'est de PROLOGUE qu'il s'agit, non d'ACHEVEMENT. Et le ZEN n'est pas la VOIE DE LA FACILITE. Il ne l'est dans aucune Tradition. L'ILLUMINATION en un Week-end n'existe tout simplement pas. Ce n'est que l'Espace des charlatans.
Le fait que Douglas fut passionné de Zen jusqu'à en faire le lieu de l'Enracinement de son Enseignement, n'est pas à démontrer; il suffit de le lire le plus complètement possible et de lire les Références qu'il nous propose; ainsi de celui auquel il revient le plus souvent : " ESSAIS SUR LE BOUDDHISME ZEN", de DT SUZUKI.
Douglas dans le sillage du ZEN nous propose un CHEMIN au MILIEU précisément duquel se situe une EXPERIENCE (sur la nature de laquelle je reviendrai), qui est TOUT SAUF UN JEU DE CIRQUE, mais qui constitue la METHODE quasi révolutionnaire mettant à notre portée ce que rapportent les Traditions, en RENDANT L'ILLUMINATION ACCESSIBLE.
Mais en soulignant immédiatement qu'il est dangereux de trop insister sur la Quatrième étape, puisqu'elle est en principe sans échec, sans la restituer aussitôt dans une VOIE A HUIT ETAPES; s'arrêter là ou "faire comme si" il pouvait y avoir un Arrêt là, ruinerait le Tout. Pas d'échec, certes, mais "un petit tour et puis s'en va".... ailleurs, vers plus facile, vers d'autres "Gurus", d'autres "Séminaires"...
DOUGLAS est aussi CLAIR que possible. Après la QUATRIEME, LA CINQ, et les SIX autres jusqu'à la HUITIEME. Précisément, c'est au début de l'ÉTAPE CINQ, "PRATIQUE DE L'ABSENCE DE TETE" qu'il écrit :
"Ici commence la "partie difficile" qu'EST LA REPETITION DE CETTE VISION SANS TETE-AU-SEIN-DU-RIEN jusqu'à ce qu'elle devienne toute naturelle, qu'elle N'AIT ABSOLUMENT RIEN DE SPECIAL, jusqu'à ce que quoique nous fassions, IL SOIR CLAIR QUE PERSONNE NE FAIT QUOI QUE CE SOIT, autrement dit JUSQU'A CE QUE NOTRE VIE SOIT STRUCTUREE AUTOUR DE LA FLECHE A DOUBLE SENS DE NOTRE ATTENTION, POINTANT SUCCESSIVEMENT VERS LE VIDE et à l'EXTERIEUR vers CE QUI LE REMPLIT." ("Vivre sans tête", Cinquième Étape).
Un texte à lire et à relire.
GOUTTE, TRACE DE LUMIERE, MOMENT PRIVILEGIE et INOUBLIABLE, suspendu et bientôt invisible, mais fondateur d'une voie d'exigence, telle est bien la rencontre promise de l'Étape 4 : Dans les Quatre premières nous la perdons et la retrouvons; dans les quatre suivantes nous essayons de la sauver et de la conquérir; et c'est bien l'évidence de la Voie Zen de Douglas.
Revenons sur quelques traits essentiels.
Le ZEN auquel renvoie Douglas insiste d'abord sur la transmission de Maitre à disciple; d'où cette vie d'errance de Douglas, offrant à ses disciples présents et futurs ce qu'il avait lui-même reçu à partir de ce dessein d'E. MACH ou du visage il n'est rien de visible, le sujet s'évanouissant dans une Autre vision; Douglas soulignant qu'il nous faut pour la retrouver et VOIR voler par delà sa description des Hymalayas jusqu'aux moindres actes de la vie, les "toilettes d'une gare" propose-t-il même comme plus adéquats à cette VISION.
D.T SUZUKI nous dit :
"Il s'agit de voir qu'après tout nous avons en nous TOUT ce dont nous avons besoin. C'est le pouvoir de l'intuition possédé par l'esprit (.../...) pouvoir qui saisira instantanément et par LA VOIE LA PLUS DIRECTE ce qu'il y a de plus fondamental; PRAJNA est le nom que donnent les Bouddhistes à ce pouvoir et le BUT du Bouddhisme Zen dans son rapport avec la Doctrine de l'ILLUMINATION est d'EVEILLER PRAJNA par l'exercice de la Méditation (DHYANA)." (Essais sur le Bouddhisme Zen 1ère Série).
PRAJNA est donc au BOUT DU DOIGT QUI DESIGNE LE RIEN ? Assurément; à condition de poursuivre DHYANA. Car Dhyana renvoie à des états de concentration puissants; de contemplation-absorbtion; ou peut-être mieux de Supra-conscience du JE SUIS dans la direction donnée. C'est en ce sens que DOUGLAS est le MAITRE ORIGNINAL, découvreur des "nouveaux marqueurs", d'EXPERIENCES INCONNUES mais qui sans doute autrement que d'autres conviennent à l'homme d'occident. En ce sens, chaque livre, chaque "vidéo", chaque dessin de Douglas nous rend contemporain de son Enseignement; de cet Enseignement ciselé jusqu'à l'EPURE de cet ultime Discours où, parvenu non loin de sa limite visible, il demande d'une voix forte : "OU EST LA MORT, OU ?", tout entier tendu vers cet ESPACE de CONSCIENCE ILLIMITEE qu'il n'aura cessé de tenter de nous faire VOIR.
Quand on a saisi cela--- je parle de ce lieu ou de ce non-lieu que désigne le doigt là ou il est pointé, le SATORI peut bien survenir.
D.T SUZUKI parle dune sorte de "CATASTROPHE MENTALE "qui se produit d'un seul coup"; "il tombe sur vous à l'improviste quand vous sentez que vous avez épuisé toutes les ressources de votre être", nous revêtant d'une étoffe nouvelle et inoubliable.
A ce point, Douglas précise :
"S'il est vrai que cette TECHNIQUE de l'AVION à décollage vertical, cette vision instantanée de MA NATURE ETERNELLE est aisée, il est également vrai qu'elle n'a d'effet sur ma vie que dans la mesure ou je m'applique sérieusement à l'entretenir. Je dois ACTUALISER la découverte que je suis parfait tel que je suis --TEL QUE JE SUIS-- en la redécouvrant patiemment, sans cesse et inlassablement jusqu'à ce que toute trace d'artifice ou d'effort, toute sensation d'accomplissement ait disparu." (Vivre sans tête). Nous lisons là entre les lignes, les autres étapes de la Voie que nous suivons, et dont je n'ai parlé que pour mettre en Lumière la FULGURANCE qui surgit quand la Vacuité prend la place de ce qui se trouvait là au-dessus des épaules, et dans laquelle il nous faut tenter de demeurer. Paisiblement.
C'est pour graver la notion de DYANA, d'effort méditatif de persévérance que j'insiste sur la FUGITIVITE de l'instant de SATORI. Si le ZEN ouvre sur le SATORI, le Satori ne demeurera pas sans le ZEN. Mais il n'est peut-être --et c'est en ce sens que Douglas est un Maitre-- RIEN de semblable à sa Voie pour provoquer en nous ce DECLIC, cette OUVERTURE MENTALE qu'est un Satori, cette EXPLOSION née d'un VACILLEMENT de notre CONSCIENCE------------ELARGISSEMENT immédiat et concentrique, tel une pierre lancée sur une nappe d'eau étale. C'est à ce CHOC semblable à un coup sur la nuque avec le tranchant d'une main que veut nous faire parvenir Douglas par l'Expérience de ce Doigt qui pointe la place VIDE et SANS LIMITE, et qui fut celle qui lui fit réaliser son propre Satori, à partir de ce dessein de MACH. A cela, oui, on parvient en un CLIN d'OEIL; mais j'en ai dit le prix. La Maitre Zen provoque le Satori, mais l'Élève qui l'a entrevu sait aussitôt que ce n'est qu'une étape, et, reconnaissant, passe son chemin, sachant que c'est bien un Joyau inégalable que lui a donné son Maitre.
Si nombreux sont ceux qui ont fait des textes de Douglas leur "Livre d'Heures en ce monde", c'est qu'ils ont compris que DOUGLAS HARDING mettait la quintessence de l'Orient à la portée de l'homme d'Occident, désabusé et instable; en ce sens c'est autour de très rares êtres comme Douglas que se structurera la Spiritualité de cette Partie du Monde.
Finnegans