Magazine Humeur
Il en rajoute en dénonçant le "bal des faux-culs" ...
Il serait souhaitable de bien prendre conscience du danger qui menace. C’est un danger insidieux d’autant plus redoutable que dans un premier temps il peut flatter les instincts les plus bas, encourager une disposition particulière au voyeurisme. Insidieux car il peut également faciliter en apparence des souhaits, avivés par les campagnes qui s’annoncent, de faire mordre la poussière à un adversaire potentiel. Pour le moment c’est le politique qui est la cible privilégiée, mais demain elle pourrait changer d'aspect : un concurrent dans les affaires industrielles ou commerciales, un professeur exécré, un médecin réticent en face d'une demande inacceptable ou exagérée, en clair un empêcheur de (se) tourner en rond.
Il s’agit de la spirale très « ascendante » de la dénonciation sans preuves, lancée à la cantonade et sur les plateaux de télévision, immédiatement amplifiée par le Net et les « réseaux sociaux »
Ainsi la dénonciation validée par Luc Ferry relayant un article paru dans Le Figaro Magazine fait le tour du Net et ceux qui ont un compte Facebook ou twitter en mesurent l’importance sous forme d’affirmations sèches, sans explications ni nuance.
Soit Luc Ferry est complètement fou et largement engagé dans un processus pathologique réclamant en urgence des soins et une vigilance particulière due à tout délirant, soit il est particulièrement lucide ne lâchant aucun nom précis aucune donnée permettant une action en justice contre lui. Il manie une affirmation sulfureuse parue avec moult détails dans le Fig-Mag mais en l'amplifiant et en lui donnant de la consistance. Ces « informations », si l'on peut appliquer ce terme à de tels propos, portent préjudice à tout un système sans pour autant s’exposer à une défense motivée. Au passage, le Premier Ministre de l’époque, Jean-Pierre Raffarin, est embarqué dans l’affaire comme informateur de couloir.
Prévoyant la tempête, Luc Ferry modifie rapidement l’angle d’appréciation de sa prestation en le dirigeant vers une nécessaire réflexion entre « l’omerta et la délation calomnieuse » et sur le devoir de suite des journalistes.
Le parquet de Paris ouvre une enquête, le microcosme s’émeut, l’inévitable Rachida Dati y va de sa remarque inepte, même Alain Juppé mort à l'hameçon d'un Luc Ferry qui précise alors : «On peut être accusé de non dénonciation de crime lorsqu'on a été témoin de quelque chose. Je n'ai jamais été témoin, je le dis très clairement, et je n'ai aucune preuve dans cette affaire», évoquant des faits «bien antérieurs aux années 2000». «On m'a rapporté mille choses sur mille ministres mais je ne dirai jamais rien, à part si cela mettait en danger la République» La dialectique est époustouflante.
S’il demeure très heureux d’avoir jeté le « pavé dans la marre » c’est en quelque sorte parce qu’il accuse la presse de ne pas faire son travail et de ne pas chercher à savoir comment Le Figaro, dans le cas d’espèce, a pu étayer un article auquel par ailleurs l'ancien Ministre apporte crédit. Nous atteignons des sommets ! « Tout le monde sait » semble-t-il vouloir crier, personne n’enquête ; il enfonce ainsi un deuxième clou mortifère, presque plus que le premier.
Sous le titre "À Marrakech, un ex-ministre «s'amuse»" Le Figaro Magazine après s'être étendu sur les détails termine ainsi : "Notre source marocaine craint pour sa carrière, l'affaire a été étouffée. Faute d'éléments de procédure ou de témoignage, la loi nous interdit légitimement de nommer le personnage." ... Mais elle n'interdit pas de porter un discrédit global et impersonnel, dangereux par sa volatilité et son imputabilité en forme de devinette.
Il est évident que la rumeur malfaisante ou visant la déstabilisation de l’adversaire n’est pas née hier, ni à New York, ni à Draveil, ni même à Toulouse avec la terrible affaire Dominique Baudis. Mais l’accélération et la multiplication de ces pratiques vieilles comme le monde est inquiétante en fonction surtout des moyens qui relayent de telles affirmations et qui sont sans commune mesure avec ceux existant il y a encore quelques années.
Il devient urgent que la justice puisse se montrer très sévère envers ceux qui répandent des nouvelles non vérifiées ou qui les valident par des propos ambigües : la propagation de la rumeur infondée doit être très sévèrement punie.
Pour autant, il ne faudrait pas que cette sévérité nécessaire élève des murs de silence injustifiés : "l'omerta" de Luc Ferry. On le voit, la limite entre la nécessaire connaissance et l’abjecte manipulation est ténue. Les développements récents des manipulations en tout genre est inquiétante et, dans le domaine politique, ne pourra que faire le lit à d’horribles jeux.