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Fêtes des mères selon la loi du canal.

Publié le 01 juin 2011 par Alexcessif

Fêtes des mères selon la loi du canal.

Une piste cyclable a remplacé le chemin de halage
Je lui devais une  visite! " À dans deux heures!" Lançais-je un peu présomptueux à l‘adresse de Ronronette C’est mal partis: Sortis du parking en montée, les pieds verrouillés par les pédales automatiques, le plateau bloqué par la chaine, je n’eus que le temps, en faisant pivoter le guidon, de l’option fossé. A ma gauche du goudron, à ma droite l’herbe tendre. Tendre mais trompeuse comme la tentation car au bout du fossé c’est une concentration d’orties qui accueille mes fesses. J’adôôôôre les jardins mal fréquentés! Là, le lecteur a compris que le sujet est sur une bicyclette et que sa maladresse est à la hauteur de son enthousiasme. Il lui reste à apprendre, au lecteur, que le sujet abandonnant le cocon confortable de la voiture, pour un périple le long du canal à l’ombre des platanes, a prévu de s’enquiller une petite soixantaine de bornes en deux heures par 33 degrés dehors et 37.2 dedans ce matin. Les plus férus de psychologie verront le symbole Voiture/confort/Ronronnette/monotonie/monogamie/tentation/sport/vèlo/aventure/danger. Et lorsqu’ils auront finit de surfer sur cette houle sémantique ils se diront que c’est bien partis pour une philosophie à deux balles sur le « long fleuve tranquille » et une explication par la scolastique de la loi du canal. Bien partis  pour mes zaventures mais mal partis pour la vitesse. C’est stupide la vitesse hein? À vélo, moto ou bagnole c’est toujours aussi inutile! Anxiogène en plus! Ici, il faut partager l’espace avec les pédaleurs, pécheurs, promeneurs, millionnaire du temps le temps d’un dimanche sans les  effrayer en les dépassant avec une trop grande différence de  vitesse. Mais faut bien tenir sa promesse: à peine quittée, Ronronnette, déjà me manque. Pourtant la raison l'emporte autant que le vent a raison, je décide de m’adapter et roule à la limite du point d’équilibre: plus lentement je tomberais. Et puis je gamberge aussi. Pas bon ça! Canal/long fleuve tranquille/la vie est… Ok, ok! Et les pécheurs, là, sereins, avec leur immense vie intérieure qui leur permet de passer des plombes immobiles en fixant un bouchon? D’abord j’en fais autant si le bouchon est sur une bouteille de rouge: Sportif mais pas intégriste. Ensuite, ils ne seraient pas en train de choper des petits poissons innocents avec leurs hameçons pas sympas du tout? La loi du canal! Et tant pis pour ceux qui se laisseront tenter par les leurres. Bon, ça c’est fait: l'illusion, la vie tout ça…. J’enclenche le 40x13 et profite du soleil, car les abords du canal sur les premiers kilomètres ne sont pas vraiment ombragés. Il y a pas mal de raidillons secs et brefs annonçant les ponts et un changement de coté du chemin de halage goudronné au passage d’une écluse ou d'une route. Il faut soit anticiper pour conserver son élan ou changer promptement de braquet. Je me demandai, à chaque impulsion pour conserver ces quelques mètres qui étaient au final des secondes, si l’énergie dépensée était justifiée. Sans aucun doute s’il s’agit de tenir cette promesse de «à dans deux heures » sans mépris et sans danger pour les territoriaux en balade. Et surtout après avoir parlé trop vite, il n’est pas si facile, finalement de déceler, bien planqué derrière la vertu de la patience, le vice de la paresse. Entre Castets en Dorthe et Fontet il n’y a toujours pas d’espace suffisamment dégagé et, à la sortie de la base nautique vers Hure, je croisai un roller du club de Sanguinet (40) à au moins 200 km de son camp de base pour perdre joyeusement encore quelques minutes.

Fêtes des mères selon la loi du canal.
A l’intersection du récit de nos  mœurs transversales de vélo et de roller nous taillons une bavette sur l‘état de la piste. Nous parlons aussi de Jean-Jacques du club de Labenne (40) son podium du record de l'heure (à roller) sur le circuit de Mérignac (33)en 2008, nous parlons des vingt quatre heures du Mans (roller encore) édition de 2009, puis je l’informe de la présence de gravillons de racines et des nombreuses poussettes qui «encombrent » la piste. Il m’informe que dans l’autre sens vers Meilhan/Garonne et Marmande, « c’est pourri aussi». Je me félicite d’avoir choisit le vélo comme mode de déplacement et lui souhaite bon courage. Après l’écluse de Fourques/ Garonne, il y a de nouveau un peu de trafic.
Fêtes des mères selon la loi du canal.
La boite à image me ressort la vidéo de cet été d’une autre vie où j’avais testé le tourisme fluvial. Souvenirs, attention danger! Je dois m’être un peu laissé aller sur les pédales car une maman alerte son rejeton de mon arrivée. Le mioche sage et tranquillou, serré sur sa droite et le vélo bien calé par les stabilisateurs, elle lui lance un très inutile: « - Sergio, à droite! », et le môme se retrouve avec un dilemme trop grand pour lui. Qu’est-ce que tu faisais toi raisonnablement rangé quand maman poussait son cri pour te protéger? Tu pensais que tu n’étais pas à ta place parce que "c’est maman qui le dit et qu’en plus c’est sa fête aujourd’hui!" Sergio, le temps de différencier sa droite de sa gauche se dit, perplexe:«- le mieux c’est d’aller demander à maman: celle qui sait » et fait un demi tour dans la largeur de piste. Et toi, tu te retrouves avec le bambino tout tendre en travers de la piste. Bon, je ne roule pas bien vite, n’empêche j'ai les pognes un peu loin des manettes de freins. Alors je choisis le poisson plutôt que la viande! La roue avant mord le bas coté d’herbe luisante et plonge la première vers les gardons et les brèmes dans le canal. Accroché au vélo par mes fidèles pédales, je  la suis, donc je plonge et je plonge, donc je suis …..mouillé. Je l’ai toujours dit: Sergio, l’enfant sait déjà tout ce qu’il faut savoir, il lui faut maintenant aller à l’école histoire de tout désapprendre. Tandis que Sergio se marre, je remercie la maman pour cette leçon d’humanité et de natation et je poursuis mon chemin initiatique dans l’espace partagé, instruit de la loi du canal avec du linge à sécher et un rendez-vous à honorer.

A Villeton, une procession, de canetons. (Une cane et ses petits en file indienne.) Charmant! Oup’s, pas vraiment: tandis que je me régalais du spectacle gracieux de ce cortège admirant la perfection géométrique du sillon en V tracé  sur l’onde verte, je vis disparaitre le petit dernier  de  la file happé par un ragondin. Sans périscope pas de trace: ce prédateur sous marin est en train de faire ses courses sans rayer le miroir spéculaire de l‘eau. La cane se retourna émettant un « Coin, coin! » qui voulait dire sans doute: « mais….où est passé Roger? » puis, continue sa calligraphie nautique. Une autre disparu, un autre « Coin, coin! », un autre « mais….où est passé Gérard? » Je songeai que les canes ne savent pas compter et que maman ragondin à aussi des obligations alimentaires envers ses petits à elle. Je m’éloignai dressé sur les pédales en danseuse maudissant la loi du canal. Je n’aimai décidément pas quand la loi essaie de ressembler à la morale. Après le Mas d’Agenais (pour les aficionados du canal, Villeton est situé APRES le Mas, mais pour la chronologie du récit, ça m’arrange pas) l’espace se dégage. Parce qu’il est temps de trouver une musique, que l’heure tourne, qu’il me reste un peu de jus dans le poireau et quinze kilomètres à parcourir, je mets du gros braquet. Le pédalage rythmé par: « On the road again, again.....» vent contraire et sur le 50x11, je me cale sans trop de peine sur un petit 35 de croisière. Pas longtemps: un groupe d’oies migratrices à pédales, grégaires lentes et bavardes caquètent devant prenant ma part de piste.  « ….nous étions jeune et larges d’épaules  bandits joyeux, insolent et drôles,  on attendait que la mort nous frôle…. » Mes respectueux principes de tout à l’heure deviennent soudain caducs et s’inclinent devant la dictature du temps. Pas envie de censurer la chanson, la vitesse, le rythme, le vent et, comme il y a une fenêtre de tir entre les cyclistes femelles d’une largeur suffisantes pour mon petit guidon, allez, je tente, je vise, et transperce la croupe troupe qui n’a pas eu le temps de se refermer. Souvent l’effet de surprise, la longueur réduite du couloir, et le différentiel de vitesse permettent une pénétration furtive dans l’étroitesse du passage. Ça caquette de plus belles et les pintades à roulettes, dans leur bon droit, on est d’accord, m’affublent de pas mal de noms d’oiseaux. C’est bon d’être un voyou! On the road again, again, en avant toute, baisse la tête t'aura l'air d'un coureur. Les mains en bas du guidon, tout à droite pour les pignons, le vent siffle et résiste, les jambes tournent à mollets tendus et cuisses de feu, les poumons poumonent tant qu'ils peuvent, le coeur cherche la sortie de sa cage thoracique et cogne contre les barreaux de mes cotes, la bouche sèche au vent de la course, le maillot claque sur les épaules. C'est jouable: je vais niquer le temps et celui qui me le vole!

« La mer revient toujours au rivage,  dans les blés murs y a des fleurs sauvages,  n’y pense plus tu es de passage.  On the road again, again. » Les écluses se succèdent, la Gaule, la Gaulette, Berry, pont de Lompian et c’est l’arrivée. Deux heures trois minutes, c’est bon! Je lui devais une  visite! Un cimetière. Le portail grince sur ses gonds. L’allée. La tombe. « Bonjour maman, Raconte-moi l'histoire de l'amie de Pierrot.
Raconte-moi l’histoire du grain de sable captif entre les hanches du sablier sans me dire les souffrances de l’expulsion car j’ai mal au temps.
Raconte-moi l'histoire des souvenirs ancrés dans les strates repentis de l'épaisseur des buvards tachés par l'encre violette. 
Raconte-moi l'enfant jouant au ralenti à la marelle retombant du ciel vers la terre.
Raconte-moi le renoncement des grandes personnes.
Raconte-moi le ressac de la mer.
Raconte-moi cette vague qui jamais n'atteindra la dune.
Raconte-moi où va la nuit quand elle entend la voix de l'oubli. 
Mais ne me parle pas, mère, de forteresses vides où règnent la souffrance, l’abandon, la solitude.
Passsque moi, ben.... j'ai oublié les marées hautes et les oranges sont à mère!
Bonne fête maman! Adam Dezeure À Damazan le 29/05/2011 « Mnésie d’un fuyard, schizophrène et plus si affinités » 



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