Non, le premier mercredi asiatique de juin ne sera pas consacré à un karaoké des génériques de notre enfance. Mais j'avoue que lorsque j'ai entendu parler de ce projet de drama pour la première fois, c'est cette musique - qui parlera forcément à toute une génération de téléspectateurs - qui a retenti dans ma tête. De la version animée édulcorée connue en France sous le nom de Nicky Larson, je n'ai que des souvenirs très confus, entre massue volante et drague permanente. Mais que nul ne s'inquiète : la version sud-coréenne de City Hunter est sans rapport direct avec l'histoire de l'oeuvre japonaise dont elle emprunte le nom, même si on y retrouve une certaine tonalité "manga" assez caractéristique.
Diffusé depuis le 25 mai 2011 sur SBS, ce drama s'inscrit dans la lignée des thrillers adoptant la thématique traditionnelle de la vengeance, oscillant entre drame et légèreté pour atteindre un juste équilibre. Les séries d'action n'étant pas le genre qui réussit le mieux à la télévision sud-coréenne ces derniers temps, je n'avais pas vraiment d'attente vis-à-vis de ce projet. Et si certaines facilités narratives ont corroboré mes craintes, je dois dire que j'ai malgré tout apprécié ces deux premiers épisodes qui, en terme d'ambiance et de personnages, parviennent à s'imposer.
City Hunter débute le 9 octobre 1983 (par un évènement s'étant réellement produit). Lors d'une visite du président sud-coréen en Birmanie, un attentat à la bombe coûte la vie à plusieurs officiels et détruit entièrement le bâtiment où il se rendait. Cinq responsables haut gradés imaginent alors immédiatement une réponse sanglante face à cette provocation nord-coréenne : l'envoi d'un commando d'élite qui exécuterait un certain nombre de dignitaires du régime de Pyongyang. La mission est confiée à deux officiers sud-coréens qui étaient présents au moment de l'attaque, Lee Jin Pyo et un ami dont la femme vient tout juste d'accoucher. Mais alors que le plan est mis à exécution en territoire nord-coréen, au sud, des pressions, notamment diplomatiques, conduisent les commanditaires à se rétracter. Pour ne pas risquer d'être découverts, ordre est donné au sous-marin envoyé sur les côtes ennemies pour récupérer le commando de les abattre à vue.
Un seul en réchappe : Lee Jin Pyo. A son ami qui se sacrifie pour lui, il jure de s'occuper de son fils encore bébé, Lee Yoon Sung, et, surtout, de les venger tous. C'est dans un camp paramilitaire reculé de Birmanie que le garçon, enlevé à sa mère tout jeune, va grandir. Lee Jin Pyo a en effet pris la tête d'un réseau de trafic de drogue. L'entrée dan l'âge adulte va s'opérer brutalement le jour où il apprend le véritable dessein de celui qui a longtemps prétendu être son père. Acceptant d'être l'instrument de la vengeance que ce dernir ourdit, le jeune homme se fabrique une autre vie au Texas. C'est en diplômé du MIT qu'il rentre en Corée du Sud, recruté comme spécialiste des réseaux de communication à la Maison Bleue. Il y retrouve une jeune femme déjà croisée, dotée d'un sacré tempérament, avec laquelle il va finir bon gré, mal gré, par former une équipe détonnante. Cependant Lee Jin Pyo est là pour lui rappeler qu'une seule chose importe : la vengeance.
S'il débute par un premier épisode excessivement musclé permettant de poser la tragédie qui va rester la toile de fond de l'histoire, City Hunter n'est pourtant pas un simple drama d'action. Il surprend agréablement par cette humanité qui émane de lui dès le deuxième épisode. La série choisit de s'assurer la fidélité du téléspectateur par ses personnages principaux qui, s'ils restent à travailler, se révèlent surtout très attachants. La dynamique fonctionne d'emblée entre un Yoon Sung, à la fois joueur et un tantinet acteur, cultivant une apparence faussement détachée, et une Na Na, au caractère trempé qui lui donne immédiatement la réplique sur un pied d'égalité. Le drama prend d'ailleurs un malin plaisir à mixer les signaux, se complaisant dans un étonnant et assez savoureux mélange des tonalités, trouvant le juste équilibre entre des confrontations adultes et une pointe d'espièglerie assumée. Il émane de ce duo, aussi complémentaire qu'improbable, une vitalité communicative, sur laquelle pèse pourtant plus d'une épée de Damoclès.
Grâce à cette dimension humaine affirmée, City Hunter évite au moins temporairement l'écueil sur lequel ont échoué tant de dramas labellés "action / thriller", quand ils font l'erreur de tout miser sur une intrigue qui, à la moindre faille, conduit l'ensemble au naufrage. Car aussi plaisante à suivre qu'elle soit, la série ne manque pas de faiblesses pénalisantes pour la crédibilité de l'histoire. Dotée d'une tendance certaine à céder à la facilité, n'hésitant pas à récourir à des ficelles narratives un peu grosses, elle témoigne aussi d'un goût prononcé pour l'art des coïncidences, le tout sans être au-dessus de quelques clichés caricaturaux tout aussi dispensables (la chute finale de l'épisode 2 étant assez représentative de ces limites un peu frustrantes). Et si l'attachement à la dynamique d'ensemble permet au téléspectateur de ne pas se formaliser, il est quand même regrettable que les scénaristes n'aient pas fait preuve de plus d'ambition sur des aspects qui seraient si facilement perfectibles.
Reste que, à partir de ces fondations narratives, où les atouts ne sont pas forcément ceux qui étaient attendus a priori, City Hunter s'impose dans le registre du divertissement d'action touche-à-tout. Le drama adopte, avec une certaine réussite, une ambiance volontairement volatile directement héritée du manga. Les enchaînements, du larmoyant dramatique à des passages plus légers où percent des accents presque burlesques, auraient pu paraître désordonnés, voire brouillons, dans n'importe quelle autre fiction. Or la série parvient à capitaliser sur une forme de spontanéité d'écriture assez indéfinissable, aussi surprenante que rafraîchissante. Pour le moment, la recette fonctionne et le téléspectateur se laisse donc embarquer sans déplaisir dans l'aventure.
Permettant d'asseoir visuellement le drama, la forme s'avère être d'excellente facture. City Hunter bénéficie d'une réalisation dynamique qui sied aux scènes d'action, sans pour autant tomber dans un excès de nervosité. De plus sa photographie soignée laisse la part belle à une teinte colorée assez chatoyante, qui est un vrai plaisir pour les yeux du téléspectateur. La bande-son est également agréable à l'écoute, notamment parce que les épisodes sont parsemés de divers brefs instrumentaux qui rythment à propos la tonalité des différentes scènes qu'ils accompagnent. Et si le coup de foudre n'a pas été instantané avec les chansons de l'OST, elles retiennent cependant favorablement l'attention du téléspectateur. Notons aussi un clin d'oeil appréciable à la source d'origine, avec un générique ambiance manga (cf. la deuxième vidéo en fin de billet).
Enfin, City Hunter bénéficie d'un casting attachant et sympathique, chacun trouvant rapidement ses marques. Si le duo formé par les deux personnages principaux est aussi attrayant, il le doit aussi aux acteurs qui partagent une sacrée alchimie à l'écran. Lee Min Ho (Boys over flower, Personal Taste) dispose ici d'un rôle vraiment fait pour lui, mi-play-boy, mi-homme d'action ; tandis que Park Min Young (Running Gu, Sungkyunkwan Scandal) apporte l'étincelle qu'il convient à la jeune femme qu'elle incarne, qui a surmonté bien des obstacles dans la vie et n'a pas l'intention se laisser marcher dessus. Les deux acteurs se donnent parfaitement la réplique pour nous offrir des confrontations ne manquant pas de piquant et auxquels on assiste avec une certaine jubilation. A leurs côtés, on pourra également compter sur le toujours solide Lee Joon Hyuk (City Hall, I am Legend), en substitut du procureur dont les enquêtes risquent de l'amener à croiser nos deux héros plus d'une fois, mais également sur Hwang Sun Hee ou encore Goo Ha Ra (du groupe KARA).
Bilan : City Hunter signe des débuts assez plaisants car divertissants au bon sens du terme, prompts à séduire le téléspectateur. Si le drama emprunte aux codes du thriller de vengeance, il est loin de se résumer à ce seul genre : sa tonalité mélange les influences et trouve le juste équilibre en introduisant une touche de légèreté et de fraîcheur. C'est d'ailleurs dans cette ambiance générale que se ressent la marque du manga d'origine, à défaut d'inspirer l'histoire qui nous est racontée. La série n'évite ni certains clichés un peu lourds, ni l'art des coïncidences exagérées, mais elle bénéficie de personnages attachants dont on a envie de suivre les aventures. Ce cocktail rythmé s'apprécie donc sans arrière-pensée, mais il faudra cependant faire attention à ces excès et à ce manque de subtilité dans l'écriture pour la suite.
NOTE : 6,5/10
La bande-annonce de la série :
L'opening :
Une chanson de l'OST :