J'ai vraiment aimé ce livre. D'abord parce que c'est un livre que l'on m'a prêté. On me l'a mis dans les mains en me disant "tu devrais lire ça". Je ne sais plus si c'est Daniel Pennac dans Comme un roman ou Annie François(1) dans Bouquiner qui explique que dans tous les livres que l'on prête, on prête un peu de soi, et aussi que le bénéficiaire du prêt n'est pas toujours enclin à le rendre, car dans tous livre qu'on lit, on met un peu de soi aussi... Mais je vais bien finir par être obligé de le rendre à son propriétaire légitime.
Ensuite -revenons à nos perruques- parce que l'histoire nous transporte dans le Paris de la fin du règne de Louis XV, où le héros côtoie toutes les couches de la société : noblesse, clergé, catins, juges, docteurs, bourreau, mouches et coupes-jarrets, les péripéties de l'enquête l'entrainant du bouge le plus sordide jusqu'au palais du roi, en passant par le sinistre Châtelet et l'imprenable Bastille (c'est en tout cas ce que l'on croyait à l'époque). Entre les progrès de l'enquête, on parle cuisine, on discute de pratiques médicales, de philosophie, de procédure judiciaire. On s'imprègne de XVIIIème siècle comme un pain mollet plongé dans le cacao se gorge de cette boisson exotique et revigorante.
C'est un roman policier, mais ce n'est pas que cela. C'est aussi un roman d'apprentissage dont le début m'a fait penser aux premières pages des Trois mousquetaires, les duels en moins : on "monte" à Paris avec le jeune Nicolas Le Floch, enfant trouvé appelé à devenir le représentant extraordinaire du lieutenant général de police dans le cadre d'une affaire qui ne l'est pas moins. Il y a donc enquête et accessoirement meurtre ; du moins c'est ce que l'on est enclin à penser lorsqu'un commissaire disparait et que l'on retrouve un corps en plusieurs morceaux, accompagné des vêtements dudit commissaire. Mais Le Floch n'est pas homme à se laisser abuser par des évidences. Têtu comme son nom l'indique, il ne se laissera pas influencer ni intimider par tous ceux que ses investigations vont déranger.
Le grand Alexandre l'a dit : on peut violer l'Histoire à condition de lui faire de beaux enfants. Jean-François Parot est forcément au courant, lui qui a emmêlé personnages réels et fictionnels, événements historiques et inventés, tous représentatifs d'une époque qui ne sait pas encore qu'elle accouchera d'une révolution.
L'histoire finit bien évidemment par la résolution, classique dans sa mise en scène, de l'énigme par le héros, devant le parterre des personnages convoqués tout exprès, innocentant les bons et confondant les méchants (je ne pense pas dévoiler grand chose en disant qu'à la fin d'un roman policier, on résoud l'énigme avec lequel on l'a débuté !). La chute est peut-être un peu trop parfaite pour être crédible, mais je pinaille.
Je vous laisse la surprise de la découverte de cet excellent roman, et m'en vais dénicher la suite, car ce n'est que le premier tome d'une série de neuf. Oui, comme le pont du même nom, mais je crois que ça n'a pas de rapport.(2)
(1) : Une rapide recherche m'apprend qu'elle est morte, emportée par sa deuxième passion...
(2) : Cette conclusion n'est pas nulle, elle est originale et fera rire dans 200 ans.