L'école ou leurs profits ? Nous on a choisi !
Très belle journée d'action ce mardi à Creil. Même le soleil incertain le matin est venu au rendez-vous. Vers dix heures, nous avons accueilli une trentaine de parents dans le hall de notre école. Après que des collègues aient présenté la situation, nous avons travaillé ensemble à rédiger les doléances exprimées pour que l'école ait les moyens de combattre l'échec scolaire et agisse pour la réussite de tous. Tout le monde l'a constaté depuis des années la situation se dégrade, tous les dispositifs d'aide aux enfants en difficultés ont vu leur moyen diminuer, progressivement les effectifs par classe ont augmenté, la situation s'est considérablement détériorée et à ce rythme c'est l'école publique qui risque de disparaître. Mais plus qu'un constat, l'assemblée générale d'une cinquantaine de personnes a voulu exprimer sa volonté d'obtenir les meilleurs conditions pour l'éducation des enfants, réfutant l'idée qu'en raison de la crise il faudrait faire toujours des sacrifices. Car le discours de la réduction des dépenses publiques pour préparer un meilleur avenir ne passe plus du tout, au contraire, il révolte, il indigne très fortement les familles et les personnels et la colère monte de partout et de plus en plus.
Les autorités auraient tort de prendre à la légère ce qui s'est passé aujourd'hui. Au discours fataliste des puissants sur la réalité de la mondialisation et des indispensables sacrifices que les gens devraient accepter pour devenir concurrentiels, s'oppose tout simplement le besoin de dignité et de respect, une très forte volonté que dans un pays riche comme le nôtre on puisse offrir à notre jeunesse les meilleures conditions d'apprentissage et de développement. Ceux qui gouvernent auraient tort de penser que leur puissance est sans limite et qu'ils peuvent poursuivre ainsi impunément la destruction des services publics.
Mais plus encore, il est en train de se construire ici à Creil mais aussi en France et en Europe, une organisation originale et populaire des luttes comme on le voit avec le mouvement des indignés en Espagne ou en Grèce. Même si les partis de gauche, les syndicats disent combattre la politique actuelle, ils sont trop inféodés au système pour avoir encore une crédibilité majoritaire dans le peuple quant à leur capacité de transformation, notamment parmi les plus exploités, parmi les couches populaires et y compris parmi les couches dites moyennes qui ne veulent plus être prises en otage et manipulées par des opérations politiciennes, des campagnes électorales où en définitive on leur demande de suivre des leaders sans jamais rejeter fondamentalement ce système d'exploitation et de domination.
Ainsi il est caractéristique que si la mobilisation d'aujourd'hui s'est construite avec des militants des organisations traditionnelles, on voit de plus en plus dans ces mouvements, dans ces luttes, des personnes qui n'avaient jamais droit au chapître auparavant qui prennent la parole et avancent leurs
idées. Oui aujourd'hui, tout le monde a pu le voir, des mamans des quartiers populaires sont venues travailler dans les commissions pour élaborer les revendications, pour crier leur ras le bol de voir un système qui bafoue les droits des enfants en dégradant continuellement l'école publique, on les a vues aussi brandir les pancartes et les banderoles, et participer à l'action du matin jusqu'au soir.
Pour avoir discuté avec nombre d'entre elles, j'ai pu constater qu'elles n'entendent pas s'arrêter là. Elles veulent du concret, des réponses rapides à leurs exigences. Les autorités auraient tort de sous-estimer les conséquences qu'elles risqueraient de provoquer en ne répondant pas à ces légitimes revendications.
Incontestablement cela est nouveau. La ténacité des artisans des réseaux et veillées des écoles qui se réunissent depuis plusieurs mois dans l'esprit de rassembler les parents, les personnels et les élus a beaucoup contribué à la construction du mouvement. Mais avec la journée de ce 31 mai, on a senti que la bataille prenait un tour nouveau. Nous étions nombreux dans la rue, nous le serons davantage si pour la prochaine rentrée scolaire la situation ne s'améliore pas sensiblement. La population de Creil est unie pour son école publique, plus que jamais !