En novembre 1993, un voleur a pénétré, par une brčche d'une clôture, dans une aire (en principe) protégée du chantier naval de Sevmorput, prčs de Mourmansk. Il a scié le cadenas d'un compartiment de stockage de combustible pour sous-marins nucléaires et il s'est emparé de trois éléments de combustible contenant chacun 4,5 kilogrammes d'uranium enrichi. L'uranium a finalement été retrouvé, mais le fonctionnaire qui a mené l'enquęte a écrit dans son rapport : ŤAujourd'hui, męme les pommes de terre sont probablement mieux gardées que les matičres radioactives.ť Il n'y avait aucun systčme d'alarme, pas d'éclairage et trčs peu de gardes ; et malgré le vol, la surveillance de la base n'a pas été beaucoup renforcée.
La situation n'est pas désespérée, car les anciennes villes secrčtes oů les bombes étaient mises au point et fabriquées semblent bien protégées, et les matičres de qualité militaire seraient mieux surveillés que celles de moindre qualité. Bien que les tentatives d'effraction du Laboratoire militaire Arzamas-16 aient doublé l'an dernier, son systčme de sécurité serait resté efficace. Moscou s'efforce activement de rétablir la sécurité dans toute son industrie nucléaire, mais, malgré l'aide des États-Unis, la tâche est gigantesque un millier d'entrepôts d'uranium et de plutonium enrichis sont disséminés ŕ travers l'ex-Union soviétique.
Dans ce contexte, l'augmentation du nombre de cas de contrebande nucléaire, réels ou simulés, au cours des derničres années, n'est pas étonnant. Les autorités allemandes en ont signalé 41 en 1991, 158 en 1992, 241 en 1993 et 267 en 1994. Bien que la plupart des matičres saisies ne conviennent pas ŕ la fabrication de bombes, l'accroissement du nombre de cas augmente la probabilité d'un trafic de matičres de qualité militaire.
En mars 1993, les autorités turques ont signalé que six kilogrammes d'uranium enrichi étaient entrés en Turquie par le poste frontičre d'Aralik, dans la province de Kars. Le produit aurait été acheminé de Tachkent ŕ Grozny, serait passé entre les mains de groupes criminels tchétchčnes, puis au Nakhitchevan, via la Géorgie, pour parvenir ŕ Istanbul. Bien que ni l'incident ni le degré d'enrichissement de l'uranium n'aient été confirmés, cette affaire a fait augmenter les craintes que des groupes mafieux tchétchčnes n'aient accédé ŕ l'uranium enrichi du Kazakhstan. La signature d'un accord en 1994, aux termes duquel le Kazakhstan transfčre son uranium enrichi aux États-Unis, renforce cette hypothčse.
En octobre 1993, la police d'Istanbul a saisi 2,5 kilogrammes d'uranium 238 et a arręté quatre hommes d'affaires turcs, ainsi que quatre agents présumés des services secrets iraniens. Selon un magazine allemand, l'uranium enrichi serait entré en Turquie via l'Allemagne. L'un des prévenus turcs, un professeur impliqué auparavant dans le trafic d'antiquités, a révélé que ses complices avaient transporté l'uranium en avion de tourisme ŕ partir d'un aéroport privé prčs de Hambourg, propriété de marchands d'armes iraniens.