Rappelons-nous, c'était bien sûr avant la descente aux enfers de DSK, des remarques ironiques laissaient entrevoir que la remontée déjà spectaculaire de François Hollande à la fois dans les enquêtes d’opinion générale et plus ciblées au sein même de la gauche, supposait une action secrète et ambigüe de l’UMP et de l’Elysée pour promouvoir le meilleur « battu possible » lors de la prochaine présidentielle.
C’est prêter beaucoup d’importance et surtout d’influence à ce parti présidentiel qui serait ainsi capable de « désigner » son adversaire.
Depuis l’instauration de la primaire ouverte au PS qui va largement dépasser les organigrammes confidentiels et les petites « popotes » locales, nous ne sommes plus dans une désignation traditionnelle à la Mollet ou Mitterrand. La télévision, les interventions publiques ici ou là auront une importance bien plus grande que les anciens grands congrès et banquets républicains ou réunions de sections. A ce titre d’ailleurs il convient de souligner l'initiative novatrice du PS, à l'étudier de près et sans doute à la roder, mais il est juste de reconnaître qu'elle représente un vrai progrès démocratique dans la vie des formations politiques. La droite et tout particulièrement l’UMP devrait s’emparer également de cette innovation. Les États-Unis ont depuis longtemps adopté cette pratique sans que la démocratie semble en souffrir.
Revenant à François Hollande, il démontre lors de ses apparitions médiatiques, de ses prises de position sur les sujets les plus variés, sa maîtrise, son calme, son humour toujours sous-jacent au fond de ses yeux rieurs. Il cultive une modestie plaisante qui contraste agréablement avec les effets de manche habituels des autres concurrents potentiels. Certains peuvent penser que la disqualification de DSK a bien fait son affaire; il est regrettable que la confrontation ne puisse effectivement avoir lieu tant il est vraisemblable que cette simplicité affichée, le caractère faussement « bonhomme » du Président du conseil général de Corrèze aurait finalement triomphé de la hauteur quelque peu méprisante du locataire New-Yorkais.
Le problème de François Hollande était sans aucun doute la mère de ses enfants, Ségolène Royal. L’hypothèque étant levée, ses responsabilités lourdes à la tête du PS derrière lui, il peut maintenant se montrer sous un tout autre éclairage qui en fait le candidat le plus difficile pour Sarkozy. Si la gauche peut gagner les prochaines présidentielles c’est sans doute avec François Hollande et avec personne d’autre.
Son seul handicap résidera comme toujours à gauche dans les difficiles réconciliations post-primaires au PS et avec les autres formations de gauche plus radicales sans compter les verts toujours imprévisibles.
Hier soir dans l’émission C/Politique, François Hollande a encore fait preuve de grandes capacités à se sortir du langage convenu des hiérarques, à repousser les invites réitérées à une critique stérile, à positiver son discours plutôt que d’en faire une vulgaire « arme de poing » tournée contre ses concurrents potentiels. Il le fait sur un ton "crédible", qui passe bien à la différence des fausses embrassades de Poitiers entre les deux Dames, qui sonnent le faux.
Le reste ne lui appartient pas : ce que feront et diront ses adversaires, les reliquats de la « crise DSK » sur l’opinion ... Il aborde la pré-campagne avec une présentation, un discours et un état d’esprit jusqu’à présent sans fautes. Celui qui gagne est celui qui commet le moins de fautes, ne l'oublions jamais.
Son excès d'humilité gracieuse ne devra pas excéder le raisonnable, la ficelle deviendrait un peu grosse : mais dimanche soir il a fait très fort : "Être favori «n'est pas une calamité», a-t-il expliqué arguant qu'il aurait été candidat dans tous les cas de figure, avec ou sans l'ancien directeur général du Fonds monétaire dans la compétition, mais «ça ne m'arrange pas». «On respecte les challengers et on en veut toujours à ceux qui sont premiers», a-t-il ajouté en parlant d'une position «précaire» et «même dangereuse». «Quand vous êtes premier, vous n'avez rien à espérer mais tout à perdre.»
Un modèle du genre !
[AgoraVox a publié cette note]