"Trompe Le Monde" est souvent considéré comme le vilain petit canard dans la courte mais parfaite discographie des Pixies, celui que certains adorent détester. Parce qu'il ressemble trop à un disque solo de Frank Black. Trop de testostérones - on n'est pas très loin par moments du heavy metal - et pas assez du côté enveloppant de la basse et des choeurs de Kim Deal, du son hispanisant caractéristique jusqu'alors du groupe et apporté par l'atypique guitariste Joey Santiago. Et puis, à la place, il y a la présence une fois n'est pas coutume de claviers, ceux de Eric Drew Feldman, échappé de Pere Ubu avec lesquels ils partageaient alors la même tournée. Tout cela n'est évidemment pas pour plaire aux fans de la première heure. Pourtant, avec le recul, c'est sans doute celui que j'écoute le plus aujourd'hui, rien que pour des titres comme "Alec Eiffel" ou "Motorway To Rosewell" qui figurent en très bonnes places parmi les meilleurs titres des Bostoniens et donc au panthéon du rock.
Et comme pour les trois autres albums, il y a toujours cette folle énergie, cette dynamique constante dans l'enchaînement des titres et aussi à l'intérieur même des morceaux, qui, semblent jouer allégrement aux montagnes russes. Après la reformation récente des Pixies pour diverses tournées qui, à défaut d'avoir été mémorables ont eu le mérite de raviver la flamme, on parle maintenant de plus en plus d'un nouveau disque. Pas sûr qu'on y gagne car cela fait belle lurette que Frank Black semble avoir perdu la recette miracle, continuant bon an, mal an, une carrière solo assez anecdotique - exception faite des premiers albums qui tiennent encore la route et notamment l'excellent "Teenager Of The Year", qui n'est d'ailleurs pas sans rappeler "Trompe Le Monde". Bref, si, à l'époque, ils étonnaient et ravissaient "leur" monde, il ne s'agirait pas que désormais, ils le trompent. Vraiment.
Clip de "Alec Eiffel" :