Rappelez-vous. Depuis le début de la présidence française des G8 et G20, Nicolas Sarkozy et ses proches n'ont cessé d'en rappeler les enjeux, tout en concédant, dès le départ, que les désaccords intra-G8 ou intra-G20 étaient excessivement nombreux : stabilité des monnaies, équilibres des échanges commerciaux, régulation des marchés de matières premières, les sujets, depuis novembre, ne manquaient pas. Et pourtant, ce G8 de Deauville les a à peine effleuré. Pire, la régulation de la finance mondiale a été complètement évacuée !
Incroyable...
Le communiqué final qui clôtura le G8 comprenait 93 points. Une liste à la Prévert qu'il convient d'étudier pour comprendre, une succession d'incantations à peine lyriques, souvent verbeuses qui n'engagent rien ni personne. On se félicite, on encourage, on souhaite, on promet, on exige, mais, au final, on ne décide de rien. Tel est le G8, un grand spectacle médiatique. Celui-là n'a coûté « que » 60 millions d'euros...
Avant de partir en weekend, Nicolas Sarkozy surjouait l'effort fourni dans deux conférences de presse, l'une jeudi, l'autre vendredi. Il ne lui restait que cela. Ce G8 de Deauville ne restera pas dans les anales de la diplomatie mondiale. Peut-être faudra-t-il le comptabiliser, a minima, dans les dépenses de campagne du candidat Sarkozy.
Préambule
« Nous, chefs d'État et de gouvernement du Groupe des Huit, (...) avons réaffirmé notre profond engagement en faveur de la liberté et de la démocratie ». Le préambule commence fort. Quand on pense que ce brillant communiqué a été signé par le président russe... on se régale. « Prenant la mesure des évolutions récentes en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, ainsi qu'en Afrique sub-saharienne, nous avons renouvelé notre engagement à soutenir les réformes démocratiques partout dans le monde, et à répondre aux aspirations des citoyens à la liberté, y compris à la liberté religieuse, et à l'émancipation, en particulier des femmes et des jeunes » Etc, etc, etc. Les 8 se félicitent de la démocratie qui est « la meilleure voie pour accéder à la paix », de « l'implication des citoyens », et, grande décision, les 8 ont « adopté une déclaration sur les printemps arabes ».
À Deauville, les Grands 8 se sont promis de « faire preuve, à l'avenir, d'encore plus de transparence dans le suivi de nos engagements respectifs en faveur du développement, de la paix et de la sécurité ». Et, gros effort, « pour la première fois dans l'histoire du G8 », ils ont « adopté une déclaration conjointe avec des chefs d'État et de gouvernement africains ».
A l'égard du Japon, les autres 7 ont « témoigné » leur « profonde compassion aux victimes ». Ils ont aussi découvert l'internet, « un outil unique d'information et d'éducation » qui « contribue ainsi à la promotion de la liberté, de la démocratie et des droits de l'homme ». « Pour la première fois au niveau des chefs d'État et de gouvernement », le G8 s'est entendu « sur plusieurs principes fondamentaux, tels que la liberté, le respect de la vie privée et de la propriété intellectuelle, la gouvernance multi-acteurs, la cyber-sécurité et la protection contre la criminalité ». Les 8 sont même parvenus à trouver que le Forum e-G8, qui s'est déroulé à Paris les 24 et 25 mai, avait apporté une « précieuse contribution à ces débats ». Samedi matin, le tout nouveau président du Conseil national du numérique nommé par Sarkozy, ce nouveau Medef de l'e-économie, expliquait qu'il n'était pas sorti grand chose de ce forum.
Les 8 souhaitaient aussi « une croissance forte, durable et équilibrée ».Les imaginait-on désirer publiquement une bonne grosse dépression ? Ils se sont engagés « à accorder la priorité aux politiques publiques qui renforcent la croissance, telles que la recherche, l'éducation et l'innovation », mais aussi à encourager « la croissance verte ». Evidemment, ils voulaient « tirer toutes les leçons de l'accident nucléaire survenu au Japon », il aiment « la paix et la sécurité internationales », exigent « l'arrêt immédiat de l'usage de la force contre les civils par les forces du régime libyen ». Et appellent Israéliens et palestiniens à « conclure un accord-cadre sur l'ensemble des questions relatives au statut final ».
Paroles, paroles...
Voilà pour le préambule. Place aux 93 « décisions ».
Solidarité avec le Japon
La solidarité avec le Japon constitue premier chapitre du relevé de décisions. Les 8 ont rappelé la catastrophe du 11 mars, leurs « condoléances pour toutes les victimes de cette tragédie » , loué le « courage et la dignité dont a fait preuve la population japonaise », apporté leur « admiration et respect ». Ils se sont déclarés confiants dans « la résilience de l'économie japonaise » et sont d'accord pour offrir « aide et coopération », ni chiffrées ni planifiées.
C'est plutôt le Japon qui semblait redevable, puisque le Premier ministre du Japon a promis « tous les efforts nécessaires pour réduire les incertitudes que la catastrophe pourrait engendrer dans l'économie mondiale, en raison notamment de l'accident nucléaire » et « de fournir de manière régulière toutes les informations pertinentes concernant l'urgence nucléaire ». Il a même « assuré que les produits d'exportation japonais étaient sûrs ». S'il le dit...
Les 8 sont « déterminés à tirer tous les enseignements nécessaires de cette catastrophe, dont en particulier la nécessité de promouvoir, dans le monde entier, les plus hauts niveaux de sûreté nucléaire ». Justement, très discrètement, l'Europe (dont 6 de ses membres sur 27 sont au G8), s'est entendue sur des « stress tests » a minima de ses centrales nucléaires, lundi dernier.
Internet, enfin.
Le second chapitre est pour l'internet. Fichtre ! Il manquait la Chine pour signer la déclaration. Lisez plutôt.
« Partout dans le monde, l'Internet est désormais un élément essentiel pour nos sociétés, nos économies et leur croissance.» (point N°4). L'eau mouille et le feu brûle. Autre chose ?
Les 8 étaient heureux de constater qu'Internet « représente un moyen unique d'information et d'éducation et peut par là-même contribuer utilement à la promotion de la liberté, de la démocratie et des droits de l'homme » (point N°5). En revanche, pour les entreprises, « l'Internet est devenu un outil essentiel et irremplaçable » (point N°6). Sans blague ? Pour les États, « l'Internet est un instrument permettant de renforcer l'efficacité de l'administration.» En France, Internet a surgi dans notre régulation via les lois Loppsi I puis II qui autorisent tous les fichages, tous les espionnages, toutes les coupures. Encore une fois, on regrette que la Chine ne soit pas membre du G8 pour signer un tel texte. Les 8 ont aussi souhaité rappeler qu'il fallait assurer au Web « la non-discrimination et de la concurrence équitable » pour « guider et inspirer son développement » (point N°9).
Petits clins d'oeil aux droits de l'homme ou jolie déclaration d'intention : le développement d'internet doit s'inscrire dans le cadre « du respect de l'état de droit, des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que de la protection des droits de propriété intellectuelle, valeurs qui guident la vie de toute société démocratique, dans l'intérêt de tous les citoyens » (point N°10). Enfonçons les portes ouvertes !
Aux Etats-Unis, le Patriot Act vient d'être reconduit par une Chambre républicaine pour 4 années consécutives. En Russie, 24 heures plus tard, une trentaine de personnes étaient arrêtées en marge de la Gay Pride. Les 8 souhaitent quand même créer « un cadre favorable, transparent, stable et prévisible » pour le développement d'internet - langue de bois, quand tu nous tiens - et « encourager l'utilisation de l'Internet comme instrument de promotion des droits de l'homme ».
Sujet important mais maintes fois rebattu, les 8 défendent les droits d'auteur, les brevets, les « marques déposées » et les « secrets commerciaux ». L'enjeu est « l'application effective des règles en matière de propriété intellectuelle ». La Chine n'était pas là pour signer. On regrette. Les 8 aimeraient améliorer la « protection effective des données à caractère personnel et de la vie privée sur l'Internet ». Le patron de Facebook, le premier «user-generated » Big Brother n'a pas été convié à Deauville. Les voilà qui planchent sur une charte version condition d'utilisation de Facebook : « les utilisateurs qui doivent être mieux informés de leur responsabilité lorsqu'ils introduisent des données personnelles sur l'Internet, les fournisseurs d'accès qui stockent et traitent ces données, et les États et les instances de régulation auxquels il revient d'assurer le respect effectif de cette protection ».
Sur la sécurité des réseaux, les 8 veulent contenir les « menaces terroristes et criminelles ». Et pour ce, ils souhaitent « contribuer à la définition d'approches communes et de règles pour l'utilisation du cyberespace » (point N°17). Comprenez, harmoniser les mécanismes de contrôle international. Et les 8 sont évidemment hostiles à la pédophilie sur Internet (point N°18). Ils aimeraient aussi « améliorer l'accès à l'Internet dans les pays en développement ». Ils préfèrent que les États jouent « un rôle-clé » dans « la gouvernance de l'Internet pour lui permettre de s'adapter au rythme rapide des évolutions et des nouvelles utilisations technologiques et commerciales ». Comme en Russie ? Nous sommes prévenus.
Economie et finance
Chapitre trois, l'économie mondiale, le gros morceau... croyait-on.
« La reprise mondiale gagne de la vigueur et devient plus auto-entretenue » (point N°23). Ah... encore un constat. « Toutefois, des risques baissiers subsistent et les déséquilibres internes et externes » préoccupent les Grands 8. Ils se sont promis de rester concentrés sur la réduction des déficits publics, et une « croissance économique saine ». La quadrature du cercle ...
Sur la régulation des marchés financiers ou des matières premières, les engagements sont modestes (point N°24). Les 8 ont simplement « exprimé » leur « attachement aux processus engagés au sein du G20 afin d'élargir le dialogue et la coopération », concernant notamment le « programme de réforme du secteur financier, l'atténuation de la volatilité des prix des matières premières, le renforcement du système monétaire international, ainsi que les évaluations en profondeur des causes de la persistance d'importants déséquilibres extérieurs et de l'éventail complet des politiques de soutien à une croissance forte, durable et équilibrée, dans le cadre du Processus d'évaluation mutuelle.» Tout est dit. C'est-à-dire rien. Aucun engagement. Sujet suivant.
25. Le G8 réaffirme « son engagement durable en faveur de marchés libres et ouverts », à travers l'OMC et contre le protectionnisme. Les 8 plus riches se sont déclarés préoccupés « que les négociations dans le cadre du programme de Doha pour le développement ne progressent pas de manière satisfaisante ».
Sur l'innovation et la connaissance, les 8 continuent d'enfoncer les portes ouvertes avec un lyrisme à peine dissimulé : « L'innovation est essentielle pour la croissance, la prospérité et les emplois dans l'économie de la connaissance ». Les platitudes se succèdent. Les 8 évoquent les « nombreux défis mondiaux clés de notre époque », « de l'éradication de la pauvreté, du renforcement de la santé publique, de la prise en compte de l'évolution démographique » (point N°26). Ils insistent sur « l'innovation, la croissance verte et l'Internet », qui seront « tous déterminants » pour sauver la planète et la croissance. Ils attendent « avec intérêt » les résultats des travaux de l'OCDE sur « le recensement des bonnes pratiques en matière de mesures concrètes appliquées dans le monde entier » en matière d'innovation (N°27). Ils soulignent « l'importance de la coopération » entre secteur public et secteur privé (point N°28), et invitent l'OCDE « à développer une analyse globale sur la manière de faciliter l'intégration des PME dans les chaines mondiales de création de valeur ». Sans proposer, ils aimeraient qu'il existe des « règles du jeu communes dans le domaine de l'innovation, notamment un système de propriété intellectuelle solide et robuste à titre d'incitation à l'innovation et de catalyseur de croissance » (point N°29). Ils insistent sur le rôle de l'Organisation mondiale de la Propriété intellectuelle (OMPI), le principe des brevets, la transparence sur les marchés de technologies. Ils voudraient davantage de coopération internationale en matière de recherche, « en mobilisant des ressources et des talents pour relever les défis communs » (point N°30).
Sur la croissance verte, toujours autant de platitudes et aussi peu de décisions. Les Grands 8 sont « fermement convaincus » que « la croissance verte » est « indispensable » pour la croissance mondiale, et la création d'emplois (point N°31). Dans la foulée d'un rapport stratégique de l'OCDE, ils appellent « tous les acteurs », publics comme privés, à chercher une croissance verte (point N°32). À cette fin, ils promettent de mettre en oeuvre « un large éventail d'actions comportant des dispositifs fondés sur des mécanismes de marché, des dispositifs réglementaires et des mesures volontaires » (point N°33)... en coordination avec les les instances internationales compétentes (point n°34), visant au développement de l'emploi (point N°35), notamment vert, et à la coopération internationale (point N°36).
Evidemment, les 8 affirment leur soutien à « une utilisation efficace et durable des ressources par les acteurs nationaux et d'autres acteurs », notamment en recourant aux énergies renouvelables (point N°37)
Le chapitre 4 est consacré à la sûreté nucléaire. La catastrophe de Fukushima est dans tous les esprits. Les 8 rappellent « l'importance vitale de la sûreté nucléaire » (point N°38). Mais il n'est pas question de remettre en cause l'énergie atomique : « nous reconnaissons que les pays qui ont choisi d'avoir recours à l'énergie nucléaire accordent d'ores et déjà l'attention nécessaire à la sûreté de l'exploitation de leurs installations nucléaires » (point N°39), et que chacun est libre de ses propres choix « quant à l'utilisation de l'énergie nucléaire ».
Compte tenu des événements survenus au Japon, les 8 Grands invitent « tous les autres pays exploitant des centrales nucléaires à mener des évaluations [ de leurs équipements ] dans les meilleurs délais », sur la prévention des accidents, la préparation des interventions d'urgence, la gestion et l'atténuation des crises et la gestion post-accidentelle (point N°40).
Les 8 insistent sur la nécessité d'un « examen périodique des évaluations de la sûreté », et « à tous les stades de la durée de vie d'une installation nucléaire » (point N°41). Une lapalissade ? Pas sûr...Ils promeuvent « la coopération internationale dans le domaine de la sûreté nucléaire » (point N°42), le rôle de l'AIEA pour son renforcement, et demande aux pays qui ne l'ont pas encore fait, « de ratifier les conventions internationales pertinentes adoptées sous l'égide de l'AIEA » (point N°43). Concernant la Convention sur la sûreté nucléaire, une réunion extraordinaire des parties contractantes sera organisée en août 2012 (point N°44).
Aux pays en phase d'équipement nucléaire, les 8 conseillent « de mettre en place des infrastructures adaptées, dotées de ressources humaines qualifiées et en nombre suffisant » (point N°45). On se pince pour le croire.... Sans blague !?!
A minima, les 8 concèdent qu'ils « étudieront » un éventuel renforcement des normes internationales actuelles (point N°46). Rien de plus.Mais rassurez-vous, ils sont « déterminés à promouvoir les plus hauts niveaux de sûreté partout dans le monde » (point N°47) !
A Deauville, les 8 ont pu se féliciter que les derniers investissements requis pour la sécurisation du site de Tchernobyl aient pu être mobilisés ces derniers mois... 25 ans après la catastrophe (point N°47) !
Et le climat ?
Chapitre V, le changement climatique et la biodiversité, gros sujets !
Les 8 enfonçaient une nouvelle porte, ouverte bien sûr : « la lutte contre les changements climatiques est une priorité mondiale », et il faut faire des « efforts de long terme » pour « limiter effectivement la hausse globale des températures à 2 degrés Celsius au-dessus du niveau préindustriel, dans le respect de la science » (point N°49). Ils répétaient leur « volonté de partager avec tous les pays du monde l'objectif de réduire d'au moins 50 % les émissions mondiales d'ici 2050 » (point N°50). Dans cette optique, ils veulent « une réduction cumulée des émissions de gaz à effet de serre dans les pays développés d'au moins 80 % d'ici 2050 par rapport à 1990 ou à des années plus récentes ». Ils étaient évidemment « déterminés » à remplir leur « rôle » pour atteindre ces objectifs et « passer rapidement à une économie sobre en carbone »...
En France, Nicolas Sarkozy, depuis sa débâcle aux élections régionales du printemps 2010, répète tant qu'il le peut que « l'environnement, ça suffit » (point N°51). En quelques phrases, ils se félicitent de « l'issue fructueuse de la Conférence de Cancun » (point N°52). Le compromis adopté en décembre dernier était pourtant modeste.
En fin d'année, la Conférence de Durban constituera « une nouvelle avancée importante », promettent les 8. On se croirait revenu à Copenhague, en décembre 2009 : cette réunion de Durban, expliquaient-ils, « permettra de travailler en faveur d'un accord global, ambitieux, équitable, efficace et juridiquement contraignant impliquant tous les pays et incluant les responsabilités respectives de toutes les grandes économies dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre » (point N°53). Les 8 s'indignèrent du «rythme actuel de perte de la biodiversité » qui est « inacceptable » (point N°54), se félicitèrent, encore, d'une réunion récente sur la diversité biologique à Nagoya, et d'une étude sur l'économie des écosystèmes et de la biodiversité (point N°55). On est content pour eux.
Développement
Pour les pays pauvres, « le développement est un défi que nous devons relever ensemble » (point N°56). Quel engagement ! Les 8 plus grosses dettes occidentales promettaient donc de surveiller la mise en œuvre de leurs engagements en la matière, « de manière totalement transparente et cohérente » (point N°57). Ils ont même signé un rapport à Deauville, baptisé « Engagements du G8 pour la santé et la sécurité alimentaire - bilan et résultats », pour se féliciter du document final sur les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) intitulé « Tenir les promesses » (point N°58). Les 8 ont dû reconnaître que l'aide publique au développement (APD) promise pour la période 2004-2010 n'avait pas été versée comme prév (point N°59). Damned ! « Tous les engagements n'ont pas été totalement honorés, mais nous nous efforcerons, avec d'autres donateurs, de maintenir nos efforts ».
On a cru qu'il y aurait quelques décisions. Dans leur point N°60, les 8 promettent de « soutenir le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme », « d'améliorer la santé maternelle et de réduire la mortalité infantile », de verser les sommes qu'ils ont promises en 2009 pour la sécurité alimentaire. Pour le reste, ils se félicitent (de l'alliance GAVI pour la vaccination), ils reconnaissent, ils encouragent (« une réponse bilatérale et multilatérale globale et forte pour améliorer la sécurité alimentaire ») ils applaudissent, ils recommandent ( « l'éradication de la poliomyélite » ou « la facilitation des brevets pour faciliter la production de médicaments génériques »).
Les 8 aimeraient que la prochaine réunion du Forum de haut niveau sur l'efficacité de l'aide à Pusan en Corée du Sud fin 2011 soit l'occasion « de revoir le programme en matière d'efficacité de l'aide » (point N°61), promettent d'améliorer la transparence de l'information sur l'aide versée par le G8.
On se souvient que la Sarkofrance a assez rapidement ajouté les prêts bilatéraux aux sommes de l'APD pour gonfler les chiffres. Mais les membres du G8 aimeraient que « les pays partenaires eux aussi améliorent la transparence ». En Sarkofrance, les enquêtes sur les détournements d'aide publique par quelques dirigeants africains sont découragées par le parquet, c'est-à-dire le gouvernement, avec une agilité et une obstination déconcertantes. Le G8 ose même déclarer soutenir la transparence dans le secteur des Industries extractives.
Paix et sécurité
En matière de paix et de sécurité, le G8 avait beaucoup à dire, beaucoup plus qu'en matière de régulation internationale. Ils exigèrent « l'arrêt immédiat de l'usage de la force contre les civils par les forces du régime libyen, ainsi que la cessation de toute incitation à l'hostilité et à la violence contre les populations civiles ». La nouveauté du sommet fut le ralliement de la Russie, qui s'était abstenue lors de l'adoption des résolutions 1970 et 1973 du Conseil de sécurité en mars dernier, à l'intervention militaire (point N°64). Pour le colonel Kadhafi, la messe est dite : « M. Kadhafi et le gouvernement libyen ont failli à leur responsabilité de protéger la population libyenne et ont perdu toute légitimité. Il n'a aucun avenir dans une Libye démocratique et libre. Il doit partir.» Les 8 veulent soutenir « une transition politique qui reflète la volonté du peuple libyen » (point N°65), et accueillent favorablement la « feuille de route sur la Libye » du Conseil national de transition.
En Syrie, les 8 sont « consternés par la mort d'un si grand nombre de manifestants pacifiques due à l'emploi massif de la violence » (point N°66), mais l'indignation s'arrête là. Ni la Russie ni la France ne souhaitent le départ du dictateur El-Hassad. Les 8 se contentent d'un appel aux « dirigeants syriens » (notez le pluriel) « à cesser immédiatement de recourir à la force et à l'intimidation contre leur peuple et à répondre à ses exigences légitimes de liberté d'expression, de droits et d'aspirations universels ». A l'égard des Israéliens et des Palestiniens, les 8 demandent de « reprendre le processus de paix » (point N°67), affirment leur soutien « à la conception de la paix israélo-palestinienne énoncée par le Président Obama le 19 mai 2011 » (c'est-à-dire la création d'un Etat palestinien sur la base des frontières de 1967). Les 8 demandent aussi un assouplissement du blocus de Gaza et la libération inconditionnelle et sans délai du soldat Gilad Shalit.
Ils s'inquiètent aussi de la situation au Yémen (et condamnent « l'usage de la violence en réponse aux manifestations pacifiques partout au Yémen », point N°68) ou en Iran (et sa « répression actuelle des droits démocratiques », point N°69). Justement, quarante-huit heures plus tard, l'administration américaine demandait à ses ressortissants de quitter le pays.
Le climat international stresse les 8 Grands, au point qu'ils dénoncent « la prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs » (point N°70), promettent de renforcer « l'architecture internationale de non-prolifération » (point N°71), et s'inquiètent des agissements de l'Iran (point N°72), de la Corée du Nord (point °73), et même de la Syrie (point N°74). Ils se félicitèrent d'un nouvel accord de dénucléarisation signé entre la Russie et les USA (point N°77), affirment lutter contre la prolifération, mais souhaitent « étudier des possibilités d'assurer un accès équitable et responsable aux bénéfices des utilisations pacifiques des technologies.» Pompiers pyromanes ? Ils aimeraient la tenue en 2012 d'une conférence sur une zone exempte d'armes de destruction massive au Moyen-Orient (point N°80), rappellent combien le terrorisme, c'est mal (point N°81), pointent le Pakistan, le Yémen, la Somalie et le Sahel comme des zones dangereuses, et réaffirment leur attachement à « un Afghanistan stable, pacifique et souverain » (points N°85 à 89).
Enfin, les 8 aimeraient que « le Pakistan remédie lui-même à ses problèmes sociaux, économiques et politiques en entreprenant les réformes nécessaires de toute urgence avec l'appui de la communauté internationale » (Amis pakistanais, démerdez-vous !), se préoccupent « vivement » de « la montée récente des tensions politiques et de la culture d'impunité au Zimbabwe », se félicitent du renforcement de la lutte contre le piratage maritime (point N°92), et encouragent la mutualisation de leurs opérations de maintien de la paix sous l'égide de l'ONU (point N°93).
Cette (trop) longue énumération ne révèle qu'une chose, l'incapacité des dirigeants de 8 vieilles économies à décider quoique ce soit de concret en matière de régulation, mais leur tout aussi grande détermination à faire croire de l'inverse.
Et à ce petit jeu, Nicolas Sarkozy est très doué.