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Buzz : Y a pas à dire, les Anglais sont fortiches pour nous faire rire avec des choses pas drôles qui plombent leur quotidien. Et donc le nôtre. Cf. notamment The Full Monty qui nous a bien fait poiler avec des hommes qui se mettent à poil justement, pour échapper à la misère. Dans cette veine comico-sociale, We Are 4 Lions, qui sort en vidéo chez Studio Canal, nous fait exploser de rire avec cette histoire de British musulmans bien décidés à se faire exploser justement, pour porter le djihad au coeur de l'Angleterre.
Fallait oser. Sujet sensible. Risques de dérapages assurés. Et pourtant, Chris Morris nous sort un film - et un premier film, en plus - très drôle et intelligent. Politiquement incorrect et cru. Tout ça à la fois. WA4L nous emmène dans l'Angleterre profonde. Celle d'une ville aux maisons en briques entourée par de gras pâturages où broutent de dociles moutons. Une ville tranquille qui suinte l'ennui. De même que les trois Mousquetaires étaient quatre, nos quatre lions sont cinq. Cinq musulmans unis par un même rejet de l'Occident. Il y a l'exalté, qui fait partager son projet à sa femme et son fils comme s'il préparait un pélerinage à la Mecque ; le converti, un psychopathe prêt à tout, surtout à s'attaquer à une mosquée ; et puis, trois naïfs, pour ne pas dire idiots, qui se laissent embarquer dans ce sale plan sans rien y comprendre. Cinq pieds nickelés du djihad qui foirent tout ce qu'ils entreprennent, y compris leurs vidéos de revendication.
Con et crédible
Gags très cons et vannes qui claquent s'inscrivent dans une description sans concession de l'Angleterre actuelle, et sans que l'histoire, très bien construite et sans temps mort, en pâtisse. Tout le monde en prend pour son grade : les jeunes Asians sans repères, les rosbifs apathiques ou indifférents à l'égard de leurs compatriotes de couleur, les flics à la ramasse - mention spéciale à Benedict Cumberbatch (le Holmes de Sherlock) qui interprète un négociateur très, très peu psychologue. Les comédiens (Riz Ahmed, Arsher Ali, Nigel Lindsay, Kayvan Novak, Adeel Akhtar) donnent à leurs personnages une humanité qui les rend crédibles et attachants.
Outre les classiques scènes coupées et coulisses de tournage, les bonus comprennent deux mini-reportages très édifiants. L'un sur la situation des jeunes Anglais d'origine pakistanaise dans un bled paumé : rejetés par la communauté, ils réagissent par la provocation gratuite : l'autre sur un jeune converti anglais emprisonné à tort pour de supposées activités terroristes. Un éclairage bienvenu qui complète les propos du film.
Anderton