Donnes moi le sommeil, dont on ne revient pas
Oh Morphée conduit moi au delà du trépas
Pour rencontrer les dieux du présent, du passé
Ceux qui sont à venir et les dieux dépassés
Ceux qui n'existent pas, ceux qui sont embryons
Inventions, tromperies dans lesquelles nous croyons
Divinités sans vie car trop mal inventés
Odeur de vieux moisi, de parfum éventé.
Leur dire ce que je pense de cette vie donnée
Ce destin de pourri, cette vie ordonnée
Plongée dans l'océan de toutes les laideurs
Cette âme de poète aimant avec ardeur.
Leur dire à ces pantins qui me firent assassins
Le mépris que m'inspire leur si sombres dessins
La haine que je leur porte les voue aux gémonies
Assassins des enfants est leur ignominie.
Les armes mises en main, dans la main d'un enfant
Pour que coule le sang celui de l'Allemand
De ces monstres maudits assassins de ma femme
Que j'ai exécuté comme on tue des infâmes.
Ces années de prison pour justice rendue
La haine de ma vie, vouloir me voir pendu.
La vie revient en force et vous force à rester
Et un jour de soleil je n'ai pu résister
Au sourire de ma brune qui me donna ses lèvres
Pour que revienne encore de cet amour la fièvre.
J'ai connu en ses bras des années de douceur
Le crabe me l'enlève, me plonge dans le malheur.
Un diadème d'or pur, un pleur au coin du cil
Provoque en moi l'émoi, l'émoi d'un imbécile
Il traversa ma vie moment d'exaltation
Je ne vis rien venir aveuglé de passion.
Le mirage est passé laissant un goût amer
Odeur de pourriture, pourri fruit de la mer.
Ma raison en chancelle, reste un profond sillon
Une blessure vive dans un coeur en haillon.
Je vous le dit à vous, dieux des amours perdues
Que malgré mes années et mes membres perclus
Je vous combattrais tous pour éviter ses pleurs
Pour que nos yeux se mêlent au souffle du bonheur.
Ne voulant pas la guerre vous fait cette supplique
Laissez-moi avec elle dans des amours pudiques.