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Aux églises

Publié le 27 mai 2011 par Marc Lenot
Aux églisesDans les églises, on voit parfois au sol sur le pavement des traces énigmatiques, des labyrinthes, des pentogrammes ésotériques dont le sens s’est perdu, hybride de paganisme et de chrétienté. Les églises de Chelles sont deux, accolées, qui furent pendant deux siècles logements, boutiques, entrepôts et même garage, et abritent aujourd’hui un centre d’art. Et, baigné par la lumière qui inonde l’église aux vitraux clairs (et la lumière se diffracte à la jonction des panneaux de verre et anime de petits arcs-en-ciel qui flottent au milieu des œuvres), un dessin cabalistique se révèle au sol : lignes pointues, angles aigus, est-ce un chemin que nous devons suivre, un signe magique ? Ou, connaissant l’intérêt d’ Élodie Lesourd pour le Aux églisesrock, serait-ce une partition, un rythme ? Pour peu qu’on ait fait ses Humanités (comme on disait), le titre, si on le connaît, donne un léger indice : « 36 lines to Herostratus ». Hérostrate brûla le temple d’Artémis à Ephèse (la nuit de la naissance d’Alexandre) afin de passer à la postérité. Il s’agit aussi de temples brûlés ici, de la vingtaine d’églises norvégiennes brûlées par des fans de Black Metal adeptes d un paganisme antichrétien. Cette méta-carte recensant les emplacements de ces églises est un signe de correspondance vers un ailleurs, un au-delà. Élodie Lesourd, pétrie de cette culture rock / métal (ne m’en demandez pas trop là-dessus) en utilise les symboles, les mythes, les traces pour construire ses pièces. Un grand triptyque Aux églisesbarre l’entrée, de biais (ainsi le diable peut passer, comme dans la maison de Faust), forçant à une marche en diagonale, à un regard oblique : c’est une peinture étrange qui reprend une photographie évoquant un épisode d’un concert, des sons étouffés, des images oblitérées. Plus fascinant est le petit tableau caché derrière, quasi monochrome, lumineux comme une toile religieuse, comme une icône, plein de profondeur et de pulvérulences, où se dessine un cadre, une clôture, entre lumière et ombre, comme un jugement dernier (The things that we’ve learnt are no longer enough, 2011). Et le rock n’est plus ici, je crois, qu’un prétexte, une anecdote à partir de laquelle se développe un travail de peinture exigeant. Aux églisesDans la première nef, Farah Atassi montre quatre tableaux, poursuivant sa recherche d’une pureté picturale, de la construction de l’espace qui la caractérise. L’un est un monochrome rougeâtre vibrant, les trois autres déclinent des tons entre noir et blanc (ci-contre : à gauche Dirt house, 2009; à droite Communal kitchen, 2011). Les toiles, ici posées au sol sous des néons, évoquent une atmosphère d’atelier et leur Aux églisesscansion géométrique, leurs repentirs, leur luminosité résonnent avec le dépouillement du lieu (Dirt house IV). On replonge dans l’atmosphère étrange que Farah Atassi sait si bien créer. Photos de l'auteur, excepté la dernière courtoisie de l'artiste.        

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