"On ne choisit pas de mourir de la sorte, massacré comme un sanglier un jour de battue. On ne choisit pas de naître entre les hévéas, au fin fond du Brésil de 1944, au bout de l’Amazonie, le nez contre les frontières du Pérou et de la Bolivie, à plus de deux jours de marche des premières cases de Xapuri, qualifiée un peu vite de village. Survivre sans médecin, vivre sans électricité, grandir sans école et, dès l’âge de neuf ans, se lever à l’aube pour aller entailler le pied des arbres géants de la forêt. Le chemin est tracé, droit jusqu’à l’ignorance et au désespoir tranquille. A moins de rencontrer un extra-terrestre." Jean-Paul Mari, Lettre à un défunt publié sur le site grans reporters après la mort de Chico Mendés
lls n'auront pas la une des quotidiens du vaste monde, ni l'ouverture, ni même une minute de JT alors qu'ils le valaient bien pour leur courage et leur action. José Claudio Ribeiro da Silva, 52 ans, et son épouse Maria do Espírito Santo da Silva, 51 ans, tous deux membres de l’ong Conselho Nacional das Populações Extrativistas (Cns), ont été abattus mardi par des tueurs à gages, probablement à la solde de propriétaires terriens locaux. les deux victimes étaient l’objet de menaces de mort depuis 2008, où ils avaient commencé à dénoncer les agissements des trafiquants de bois pour la production de charbon et la création de pâturages. Ils sont les dernières victimes en date d'une liste de défenseurs de leur nature et des droits de l'Homme qui s'allonge. (Pour rappel, le célèbre Chico Mendes, assassiné lui aussi par des tueurs à gages en 1988 en Amazonie.)
Ils avaient fondé une réserve regroupant près de 500 familles pauvres d’agriculteurs qui cultivent une vingtaines d’hectares de terres dans le respect de l’environnement.La présidente brésilienne Dilma Rousseff a ordonné une enquête rigoureuse de la police fédérale pour arrêter les responsables du double meurtre dans cette région où les grands propriétaires terriens, commanditaires présumés d'assassinats de petits paysans, bénéficient le plus souvent d'une impunité totale.
"Le Brésil s'est réveillé avec la nouvelle de l'assassinat d'un défenseur de la forêt amazonienne et est allé se coucher avec la nouvelle selon laquelle la majorité des députés approuvait l'assassinat de nos forêts", a déclaré à l'AFP un responsable de Greenpeace, Paulo Adario.La forêt en deuil n'arrachera pas une larme aux multinationales de l'agroalimentaire.