Philippe Rapiteau, le trente sixième président des Vendredis du Vin, nous invite à descendre à la cave, pour remonter, et ouvrir une bouteille d’un millésime antérieur à 2000. Vaste programme…comme disait un des nos anciens présidents de la République.
J’ai choisi une bouteille d’un vin que je suis assez régulièrement depuis le millésime 1994. De nombreux critiques professionnels soulignaient les progrès réalisés par cette propriété depuis ce millésime. J’ai donc acquis des vins des millésimes 1994, 1995,1996 et 2000 à des prix tout à fait convenables, et j’ai retrouvé dans le verre ce que j’en attendais.Lors de la dégustation des primeurs 2004, avec Olivier Grosjean (devenu depuis, le « king » de la blogglouglou), un vin avait, à notre avis, dominé la dégustation des Pauillac (hors Premiers crus classés que nous n’avions pas goûtés) : le même vin ! Pontet Canet
C’est en 2004 que Jean Michel Comme et Alfred Tesseron ont décidé de commencer à travailler le vignoble en agriculture biologique, avec une évolutionvers la biodynamie, et rapidement, ils élaborent un superbe 2005, suivi de près par un excellent 2006. Les vins ont gagné en pureté aromatique, en raffinement des tannins, sans perdre de leur puissance en milieu de bouche. Le calamiteux millésime 2007, qui les oblige à recourir à des traitements chimiques conventionnels ne leur permet pas d’obtenir la certification. Mais les convictions sont là, et dès le millésime 2008, ils poursuivent dans la voie de la biodynamie, dont ils sont persuadés des bienfaits, tant sur la qualité des vins que sur celle de l’environnement naturel et la santé des femmes et hommes qui travaillent sur la propriété. Les vins gagnent encore en qualité, 2008 est une des grandes réussites du millésime, 2009 et 2010 sont exceptionnels, dans la foulée des premiers crus classés.
Je ne discuterai pas ici, de savoir si la biodynamie (avec à l’origine un aspect ésotérique), et l’agriculture conventionnelle sont assimilables à l’opposition entre l’homéopathie versus la médecine traditionnelle (croyance et science)
Je laisse aux scientifiques des instituts d’agronomie le soin de se pencher sur ces questions. Il devrait bien y avoir quelques thèses traitant de la biodynamie dans les prochaines années…
A lire cette synthèse de Franck Dubourdieu
Je resterai factuel : les sols retrouvent une vie et de la souplesse, ce qui favorise un bon enracinement, les vignes sont en bonne santé avec des rendements naturels qui permettent l’élaboration de grands vins, sans polluer l’environnement, et en respectant la santé du personnel employé, le tout sur une propriété de 80 hectares ! Ce formidable pari est en passe d’être gagné, et d’être même un modèle pour une grande partie de la viticulture bordelaise. Au moins pour une agriculture biologique. Les futures directives européennes, centrées sur la protection de l’environnement, devraient être favorables au développement del’agriculture biologique.
Je me contenterai donc, modestement, en commentantcette bouteille de Pontet Canet 1996 de rendre hommage au remarquable travail, aux convictions, et au courage du duo Jean Michel Comme et Alfred Tesseron à Pontet Canet.
Pontet Canet 1996 dégusté sur 24 heures
La robe est très foncée, avec des teintes de couleur rubis à grenat, très légèrement évoluée au bord du disque. L’olfaction est nette, et assez complexe, avec des arômes, de cassis écrasé, de tabac ( cigare), d’épices, de résine, et des notes forestières (truffe et humus), la bouche est puissante, avec des tannins mûrs et assez serrés qui commencent à se fondre, et qui charpentent le vin avec une bonne énergie, en milieu de bouche, la finale est persistante, fraîche, avec une association de saveurs (fruits, épices, tabac) qui donnent de la complexité au vin. Noté 16,5