Il n’y a pas que la biologie dans la vie, y’a de la géol
aussi ! L’éruption du volcan islandais Grimsvötn est d’ailleurs là pour me
rappeler que ce blog à déjà traité de géologie, il y a un an avec
l’imprononçable Eyjafjöll. Mais cette
fois je vais faire dans le local et m’intéresser à la géologie de la côte
basque que j’ai pu explorer rapidement lors de pérégrinations printanières. Voyons comment avec un seul site, on peut passer en revue tous les thèmes de la géologie :
sédimentation, crises géologiques, déformation et tectonique, et érosion. En route pour le terrain !
Géolocalisons !
Alors la côte basque, c’est plutôt facile à trouver, prenez
une carte de France tapez à l'extrême Sud-Ouest et bim vous y
êtes ! St Jean de Luz, Hendaye, Biarritz, Bayonne, Bidart, sont quelques
localités à connaître dans cette région… A noter évidemment les Pyrénées qui
surplombent St Jean de Luz avec la Rhune, colline emblématique du Pays basque,
offrant une vue magnifique, et des poudingues remarquables pour le géologue
(Cette roche, c’est un peu le pudding du géologue).
[Vue de la cote basque et de sa géologie sur GoogleEarth - exagération du relief *3]
Mais concentrons-nous sur un site particulier aussi
splendide qu’intéressant : la route de la corniche (D912) entre Hendaye et St
Jean de Luz. Voici les coordonnées GPS exactes du site : 43.394,-1.694 (visible dans street view - un x marque l'emplacement du trésor géologique ci dessus !)
Les flyschs de Socoa…
Et voilà ce magnifique paysage avec cette superposition de
strates avec un pendage d’environ 45° comme en témoigne le second cliché qui
retourne un peu le cerveau (quand l’horizontalité est en contradiction avec la
logique et la gravité, le cerveau n’aime pas trop…).
- Le faciès : Ces roches sont formées par des avalanches
sous marines de sédiments, il s’agit d’un cas particulier de turbidites :
les flyschs. Aux bords des continents il existe en effet une zone assez
pentue : le talus continental où le plancher marin passe de quelques
centaines de mètres de profondeur (plateau continental) à 4500 mètre de
profondeur (la plaine abyssale). Les flyschs sont donc des sédiments qui
se forment après avoir dévalé le talus continental (au moins en partie).
- Nature de la roche : La roche est de type calcaire ou marno-calcaire :
ce sont des petites particules issues de l’érosion qui dans chaque banc vont se
déposer en fonction de leur granulométrie : les plus gros éléments se
déposent en premier, les plus petits restant en suspension plus longtemps se
déposent plus tardivement et constituent le haut de la strate.
[Carte géologique simplifiée de la côte basque]
- Age de dépôts : La datation relative indique que ces
roches se sont déposées à la fin du crétacé entre le Coniacien (définit à
Cognac) qui démarre il y a 89 millions d’années (Ma) et le Maastrichtien (définit à Maastricht
évidemment) et qui s’achève il y a 66
Ma. Au cours de cette période une épaisseur estimé à environ 400m s'accumule pour former ces falaises!
En fait ce sont les dernières roches qui se déposent avant
la crise K/T (Crétacé-Tertiaire) qui a vu les dinosaures disparaitre il y a 65
Ma. Cette limite est d’ailleurs visible aux environs de Bidart (plus au nord),
avec la célèbre couche riche en iridium (18ng/g). L’iridium est un élément
très rare à l’échelle du globe (teneur de l’ordre de 0,05 ng/g) mais très
présent dans les météorites (teneur de l’ordre de 500 ng/g) d’où l’idée d’une
origine cosmique pour la crise K/T. Comprenez : « les vilains dino
ont pris un gros caillou sur la tête ! »
Témoignage de l’orogénèse Pyrénéenne.
Évidemment un flysch ne se dépose pas avec un pendage de 45°; le talus continental n’est pas si pentu - 1 à 5°. Il faut donc expliquer se redressement assez
surprenant. Le responsable est à chercher en arrière plan, derrière le
photographe, j’ai nommé : les Pyrénées.
Cette chaîne de montagne se forme
par collision frontale de la plaque ibérique avec la plaque européenne entre -53 et -33Ma
soit peu de temps après le dépôt de nos flyschs. En fait la déstabilisation des
sédiments en bordure de plateau continental (à l'origine des flyschs) est à mettre en lien avec les
mouvements de plaques qui donneront lieu à la formation des Pyrénées un peu
plus tard. En bref, les flyschs annoncent les Pyrénées.
Évidemment cette remontée des flyschs, lors de la surrection générale des Pyrénées
s’accompagne de déformations. Deux modalités peuvent alors s’appliquer :
Soit la contrainte est modérée
s’applique sur une durée importante, on alors un pli (photos de plis sur la cote basque). Soit la contrainte est
importante et aboutit à la cassure rapide de la roche avec la formation de failles.
[Une faille bien visible depuis la corniche avec un décalage de quelques centimètres]
Quand la mer ronge la terre…
Enfin terminons l’analyse de ce site avec le constat évident
de l’érosion, et de l’effet de la mer qui petit à petit, strate après strate
ronge cette falaise.
On peut penser que ce processus et suffisamment lent pour
ne pas poser problème, mais il n’en est rien. Ainsi, la ligne de côte se rapprochant rapidement de la route de la corniche, le conseil général à
décidé en 1999 de reculer celle-ci.
Ici
comme ailleurs en Aquitaine, la mer gagne du terrain sur les terres de
façon très rapide: entre 20 et 80cm par an, et jusqu’à 8m par an plus au nord
vers l’estuaire de la gironde (Soulac-sur-mer). Seule solution à l’heure
actuelle : ajouter des rochers pour freiner les assauts de la mer. ( Les surfeurs implantés dans les années 50 se révélant inefficaces pour briser
les vagues… )
Sources :
-Carte Géologique de Bayonne gratuite à télécharger ici (notice)
-Etude de l'érosion de la Côte Basque - BRGM
-Etude géologique simplifiée de la Côte Basque - BRGM
- Autres infos :
Géolval, Observatoire de la cote aquitaine, Géologie et gisements minéraux du Sud de l'Aquitaine, Exposition virtuelle "Aquitaine sortie des eaux".
Pour poursuivre les découvertes géologiques je vous invite à
visiter le site « planète Terre » de l’ENS, notamment avec la
rubrique « l'image de la semaine ».
Autre pratique incontournable pour le géologue amateur,
l’utilisation des cartes géologiques du BRGM sur le relief de Google Earth. Il
suffit d’appliquer le .klm fournit par le BRGM pour découvrir la géologie de la
France au 1/50 000ème encore mieux que sur une carte papier et ce
gratuitement !
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