Vous allez comprendre. Vous allez très très bien comprendre. Tout a commencé par une simple envie de chaussures. Comme un besoin évident qui naît et qu’on ne peut pas repousser : il me faut des chaussures ! Mieux : il me faut des spartiates dorées. La suite, je vais vous la raconter. La conclusion, je vous la donne maintenant : quand on veut des chaussures, c’est un peu comme quand on veut du chocolat : c’est maintenant, tout de suite, zéro barrière entre nous et ladite chose, mode calculatoire zéro (calories, prix, même combat, on les refoule), et surtout : on devient faible. Oui, c’est comme ça, on devient ultra faible. Récit d’une accro aux chaussures qui tombe dans son propre piège. Récit.
Quand l’envie vous prend, vous filez donc rue de la Glacière, dans une de vos nombreuses boutiques préférées, qui accessoirement revend chaque été les fameuses spartiates. Politesses d’usage, bise au vendeur (non vous n’êtes pas intimes mais le goût des belles choses ça crée des liens !), et vous lui demandez s’il peut vous procurer vos jolies spartiates dorées… Il ne peut point. Il a bien des ballerines dorées à vous proposer… Vous hésitez mais résistez !
Ainsi, c’est sur le site en ligne de K-Jacques, que vous décidez de faire vos emplettes ! C’est simple… Pointure 39, modèle Ginas, en cuir métal doré, vous savez exactement ce que vous voulez ! Vous passez donc votre commande. C’était samedi soir dernier ! L’aboutissement, la jouissance, le clic ultime. Reste plus qu’à attendre.
Mais soudainement, lundi 13h30, votre téléphone sonne… Votre homme bricole à vos côtés.
- Allo madame Gaillard ?
- oui !
- Bonjour, Sophie de la boutique K-Jacques de Saint-Tropez, je vous appelle suite à l’achat que vous avez effectué samedi soir sur notre site Internet. Ce sont biens des
- Oui… Et vous voilà embêtée car vous n’avez pas envie que l’homme entende que vous avez acheté des spartiates dorées
- Il y a eu un pb avec le paiement qui a été refusé Madame !
- Ah bon ? Re-très embêtée car si le paiement a été refusé, c’est que vous avez trop dépensé ce mois-ci… Aie, aie, aie, faut pas que l’Astre entende cette conversation !
- Votre compte est solvable madame Gaillard ?
- Ben oui !
- Pouvez-vous me confirmer votre numéro de CB, svp ?
Vous l’avez justement à portée de main, aussi vous confirmez, vite l’Astre est parti chercher un outil à la cave (ouf !)… Et là, soudainement la communication est coupée. Bizarre, vous dites-vous. Bon, ils vont me rappeler. Quelques minutes se passent, pas d’appel. Vous envoyez un mail au service client de la boutique en ligne, vous vérifiez votre compte… Tout va bien, la somme en question n’est pas encore débitée sur votre relevé, le compte est positif. A priori, il y a du avoir un bug… Vous décidez de patienter, ils vont bien finir par vous rappeler ou répondre à votre mail.
Une heure passe, vous êtes contrariée par cet appel, quelque chose vous chiffonne mais vous n’avez pas le temps de vous en préoccuper plus que cela… Il faut dire que vous avez du travail, une émission à préparer et puis vous mettez votre contrariété sur le compte de la culpabilité « Je n’aurais pas du acheter ces spartiates, j’ai déjà ces tongs dorées, je dépense trop d’argent en futilités… »
15h00 Votre Astre vous propose de l’accompagner pour quelques brasses à la piscine. Toujours contrariée, vous décidez d’y aller afin de vous détendre… Arrivée à la piscine, vous tombez sur votre amie Céleste à qui vous confiez votre état d’âme coupable mais aussi ce que votre intuition vous dicte de façon lancinante depuis cet appel, « est-ce que ça ne serait pas une arnaque ? » Vous appelez votre banque, la boutique K-Jacques en direct… Confirmation de leurs parts : vous venez de vous faire arnaquer en toute beauté ! Vous avez donné votre numéro de CB, la date de validité et les 3 petits chiffres derrière à une bande bien organisée (pour ne pas dire d’E–UL-S !)
Grrrr ! Vous faites immédiatement opposition sur votre CB, votre conseiller vous rassure, vous êtes couverte par l’assurance, vous allez devoir attendre quelque jours afin de constater l’étendue des dégâts, il vous envoie sous 8 jours une nouvelle CB… En attendant, vous avez votre chéquier pour vous débrouiller. Oui mais non car votre chéquier vous avez oublié de le commander… Zut ça tombe mal, vous aviez justement l’intention d’aller faire un petit tour chez Z&V pour leurs soldes privées ! 8 jours sans CB, malheur !!! Et demain, vous prenez le TGV … Vous êtes coincée, vous n’avez pas d’autres choix que d’en parler à l’Astre…
- Astre chéri ! J’ai un problème… On a piraté ma CB
- Hein, mais comment c’est possible ?
- Ben, j’ai fait un achat sur internet et voilà… Vous dites ça l’air hyper décontracté bien sûr !
- Comment ça, voilà ? Tu as acheté quoi sur Internet ?
- Ben des spartiates mon amour !
- Comment ça des spartiates ! C’est quoi ça d’abord ! Votre Astre est d’une inculture en matière de spartiates, c’est désolant !
- Mais oui, tu sais ce sont ces petites sandales d’été, les mêmes que j’avais l’année dernière que j’ai tout simplement remplacées, elles étaient trop usées…
- Et combien tu les as payées ?
- Oh écoute, moins chères qu’en boutique, c’est dingue les affaires que l’on peut faire sur Internet !
L’astre vous regarde d’un drôle d’air et vous vous demandez si votre nez n’est pas entrain de s’allonger… Vous décidez de contre attaquer :
- Oui bon, on ne va pas en faire une histoire, je suis majeure et vaccinée, j’ai quand même le droit de m’acheter des chaussures sur internet, non ? Là, le pb c’est que je suis sans CB…
- Ben je vais payer tes billets de train et te filer du cash ! 300 ca ira ?
Vous faites un rapide calcul, le frigo est vide, il y a les taxis à payer, le parking, l’essence c’est bon … Hum, pour les soldes privées, c’est raté mais vous sentez bien que ce n’est pas vraiment le moment de lui en parler… Aussi, vous remerciez l’Astre chaleureusement et histoire de faire diversion vous vous interrogez :
- Comment ais-je pu être aussi nouille ? », C’est dingue quand-même de se faire avoir ainsi ?
- Bah, j’ai bien une petite idée, vous répond l’Astre avec une pointe d’ironie mais je ne suis pas sûre que ma théorie va te plaire ?
- Non, non développe je t’écoute…
- En fait, quand on te parle de chaussures, t’as plus de cerveau !
pffffft !
Vexée mais penaude vous remerciez l’Astre de son analyse ô combien pertinente et décidez avec votre tête bien faite que c’est la dernière fois que vous laissez quelqu’un se jouer ainsi de votre culpabilité ! Certes, aimer les chaussures rend faible. Mais si vous parveniez à le déconcentrer en vous affichant face à lui, dans une nuisette affriolante & sexy par exemple, est-il sûr que personne ne lui piquerait sa CB ?