DEAUVILLE SOUS LES FEUX de l'ACTUALITE

  

Assignés à domicile, tel sera le sort des quelques milliers d’habitants de la Côte Fleurie en ces journées des 26 et 27 mai 2011 pour cause de G8. Cet événement a fondu sur le département du Calvados sans que la population y prenne garde pour les raisons que je suppose être … la proximité de Paris, un aéroport international proche et les agréments d’une station balnéaire en mesure d’offrir des prestations haut de gamme. Car il en faut pour recevoir 18 chefs d’état et 8000 invités. Si bien que durant 48 heures, les résidents de Trouville- Deauville, les villes jumelles des deux rives de la Touques, ne pourront sortir de chez eux que badgés et, pour ceux des zones sécurisée et «　sanctuarisée　», que s’ils ont pris la précaution de transmettre à la police - il y a de cela plusieurs semaines - leurs références personnelles et prévenu celle-ci des heures et dates de leurs entrée et sorties et les raisons qu’ils ont de les faire.

Que signifie zone «　sanctuarisée　» - me demandais-je, dans un monde laïc ? C’est celle où se dérouleront les travaux du G8, zone réservée au seuls célébrants et à leurs délégations et dont est proscrit le péquin ordinaire. Son accès - qui comprend les sites les plus importants de la station : casino, grands hôtels, planches, boutiques de luxe, restaurants - se fera par trois points d’entrée incontournables et cette zone sera évidemment interdite à la circulation et au stationnement, à la baignade, à la promenade, aux causeries dans les cafés et autres lieux de rencontre, enfin interdite aux chiens, aux poussettes, aux cyclistes, aux rollers, aux rêveurs et aux distraits…Il ne faut pas oublier que durant ces deux jours, du mercredi 25 mai 0 heure au 27 mai 20 heures, la gare, l’aéroport, la piscine olympique, les cinémas seront fermés et que de Villers-sur-Mer à Honfleur, la navigation et le mouillage des embarcations seront eux aussi interdits, à l’exception des croiseurs de la marine nationale.

Deauville et ses proches environs vont devenir, grâce à 30 hélicoptères, un drone, deux batteries de missiles sol-air et 12 000 policiers, gendarmes et militaires, des lieux morts qui ne verront plus courir les enfants, crotter les chiens, planer les cerfs-volants, galoper les chevaux à la lisière des vagues, claquer au vent les voiles colorées et voler les oiseaux dans un ciel qui ne sera occupé que par les hélicoptères de surveillance, plus bruyants que les mouettes et les goélands.

C’est ainsi que l’on a préparé, avec le souci du plus menu détail, le décor virtuel dans lequel évolueront les hommes chargés de gouverner les peuples, après que ceux-ci aient été soigneusement écartés de leur champ de vision. Et on s’étonnera que les gouvernants et les gouvernés n’aient pas du quotidien et du coutumier la même expérience et la même approche ! C’est simplement que nous vivons dans des univers étanches les uns aux autres. Pour les monarques d’aujourd’hui, le contact avec le monde réel se résume trop souvent aux relations qu’ils entretiennent avec les journalistes, dont certains me font penser aux petits marquis de l’Ancien Régime, s’employant à faire leur cour de manière tout aussi servile, car, dès lors qu’il s’agit de pouvoir, peu de choses bougent ! Au pire, elles transitent.

Bien entendu, je n’écarterai pas de mon propos que la sécurité doit être assurée, surtout de nos jours, et elle le sera de façon pharaonique, mais je ne peux m’empêcher, demeurant dans les lieux, de formuler à l’intention de ces extra-terrestres, un souhait de bienvenue : qu’ils prennent un instant, à la tombée du soir, pour contempler la vraie vie et admirer le soleil en train de décliner sur la mer dans une atmosphère humide et douce, alors que s’épanouissent, en quelques instants, de ces bouquets célestes bleus et roses qui sont incomparables et mettent des heures à se faner - écrivait Marcel Proust.

Pour consulter la liste complète des articles de la rubrique L'HUMEUR VAGABONDE, cliquer  ICI